Le Risque en assurance et la Revolution digitale
Par Ninoka • 15 Février 2018 • 1 953 Mots (8 Pages) • 616 Vues
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Bien qu’il y ait consensus sur le fait que Big Data permettra d’affiner la prédictibilité des événements, affirmer que « grâce au Big Data tout sera prévisible » c’est omettre un point clé du raisonnement: la dimension temps. En effet, à partir du moment où un contrat se signe sur une durée « longue » mêmes les meilleurs modèles ne pourront donner « que » des probabilités d’occurrence sans garantie sur les sinistres à un an/mois, la part de l’aléa demeurera encore non négligeable. La prédictibilité, à la signature d’un contrat, ne sera donc pas parfaite mais va quand même s’améliorer.
L’aléa va diminuer et les risques seront de plus en plus prévisibles. Cependant le fait que la relation assureur-assuré soit contractuellement inscrite dans la durée et que l’erreur statistique persistera, milite en faveur d’un maintien du besoin de couverture.
A terme, l’utilisation des données pourrait permettre d’avoir un système assurantiel avec 2 fonctions: couvrir les aléas qui, immanquablement, subsisteront et prévenir au maximum les sinistres.
Des exemples se multiplient pour démontrer l’exploitation positive de la connaissance des risques : en incitant les clients à conduire de manière responsable (les offres « you drive » de Directe Assurance[12]), en les incitant à installer des capteurs intelligents dans la maison (détecteur de fumée Nest avec Allianz[13]) ou en les incitant à avoir une activité physique (« Pulsez votre santé » avec Axa[14]) certains assureurs sont déjà en train de tester ce type de fonctionnement.
Cet aspect prévention complète l’assurance traditionnelle et rend le modèle à la fois vertueux pour les clients (qui bénéficient d’un service à vraie valeur ajoutée) et économiquement viable pour les assureurs. Savoir que M. X est un client à fort risque sur la santé ne servira pas à l’exclure mais à prévenir l’incident avant qu’il n’arrive.
Comme nous l’avons vu, sous l’impact de la donnée, la couverture du risque change de nature : le service devient plus individualisé, moins mutualisé et soulève une nouvelle complexité en termes de protection de la vie privée et des libertés individuelles.
Prenons l’exemple de l’assurance automobile pour illustrer : A l'été 2014, AXA Direct Assurance lançait l'application AXA Drive qui, connectée à un boîtier, collecte des informations sur la conduite, croisées avec celles du GPS : freinage, accélération, vitesse, comportement dans un virage. Le dispositif établit un score de conduite et un profil du conducteur selon sa prudence ou sa prise de risques. Téléchargée par près de 140.000 clients et prospects, l'application ne faisait pas encore le lien entre comportement et prime d'assurance. Ce pas a été franchi en 2015, avec l'offre d'assurance auto connectée YouDrive. Testée pendant six mois auprès de 500 clients, elle a été ouverte au grand public en octobre. Elle pourrait séduire les jeunes conducteurs vertueux, pénalisés par leur âge, et leur permettre d'économiser jusqu'à 50 % de leur prime et à l'inverse, les plus téméraires verraient leur prime augmenter. Il s’agit d’une petite révolution dans le métier : individualiser l'appréciation des risques non plus seulement en fonction de facteurs sociodémographiques, mais en lien avec les pratiques individuelles. La conduite connectée pourrait progressivement entraîner une individualisation complète des primes payées par les assurés, lesquelles deviendraient fonction de leur seul comportement et non plus de la sinistralité. Tout ne sera pas pour autant sous contrôle, il restera toujours à prendre en charge la part d’aléas, liée à des causes extérieures, comme le climat
Reste que cette individualisation pourrait nourrir bien des effets pervers: de nouveaux entrants dans l’assurance pourraient accueillir à bras ouverts les bons conducteurs, dûment testés grâce aux objets connectés. Et laisser les autres aux compagnies classiques.
La promesse des objets connectés est de permettre à l’assuré de réduire son risque personnel pour payer moins cher. Les objets connectés ont en définitive le pouvoir de remettre en cause le principe de l’assurance basé sur la mutualisation des risques qui risque peu à peu de laisser place à la personnalisation des garanties. Pour Henri de Castries[15], il s’agira plutôt d’une redéfinition de la mutualisation. Il est question de trouver le point d’équilibre entre la segmentation, qui permet d’aller chercher les meilleurs risques, et la mutualisation.
L’assureur doit ajouter à ses produits des nouveaux services afin, de permettre la transformation de la mutualisation classique, telle que nous la connaissons aujourd’hui, en mutualisation « responsable ». Ces services, « gagnant – gagnant » permettent à l’assureur et à l’assuré de se focaliser sur la prévention du risque et de rendre la mutualisation plus sûre.
Le volume de données accessibles laisse entrevoir des perspectives telles qu’une meilleure maitrise des risques, une meilleure connaissance des usages clients. Qui dit volume, dit aussi population importante. Ces nouveaux critères, pour être efficaces, sont lies à leur fréquence d’apparition dans les échantillons observés. Il s’agit alors de faire de la personnalisation mutualisée.
Accompagner les clients, les prévenir, être auprès d’eux pour les aider à anticiper les risques, toutes ces notions seront rendues possibles, grâce au Big Data. La porte a un tout autre business model est donc ouverte : Offrir de la prévention, des conseils ou un accompagnement vraiment personnalisés.
La réflexion à mener, va donc bien au-delà̀, de la mutualisation. Le métier d’assureur peut se recentrer sur la prévention du risque pour définir, dans sa stratégie, les services adaptés à associer au produit d’assurance.
De plus, la révolution des données appelle à voir l’assurance au-delà du risque, François Ewald parle d’ailleurs d’ « AfterRisk ». Le service de l’assurance consiste en effet à isoler dans la masse des données disponibles celles qui ont un caractère prédictif et peuvent servir à organiser des services de protection contre les conséquences patrimoniales d’événements futurs. Mais désormais, les données, débordent les risques, il faut alors à la fois réapprendre que la matière de l’assurance ce sont les données et reconnaitre que les techniques du risque efficaces dans un certain âge des données peuvent devenir des limites dans un autre. L’un des défis pour l’assurance sera alors de se
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