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La hiérarchie des normes

Par   •  9 Juillet 2018  •  2 410 Mots (10 Pages)  •  449 Vues

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- Des mécanismes garants d’une Constitution souveraine

Les idées précédant souvent les faits, l’état de droit a d’abord été une théorie. Et lorsque la Constitution avait été instaurée, les gouvernants n’ont pas immédiatement été tenus de la respecter.

Cela explique pourquoi, pour assurer le respect de la Constitution, une mission de contrôle a été confiée à des juges constitutionnels ayant pour mission de pratiquer un contrôle de constitutionnalité des lois. Si tel n’est pas le cas, ces lois seront déclarées inconstitutionnelles et ne pourra pas entrer en vigueur. La France n’a connu un tel contrôle que sous la Ve République.

Chaltiel écrit que « les constitutions des États européens depuis la fin des années 1950 sont dotées de contrôles de constitutionnalité. » (l.3-4). Ce contrôle est exercé par le Conseil Constitutionnel, mais au départ sa mission consistait essentiellement à faire respecter par le parlement la nouvelle séparation des domaines des articles 34 et 37. Ainsi, lorsque la Constitution du 4 octobre 1958 a donné naissance au Conseil Constitutionnel, elle lui avait seulement prévu un rôle technique, qui ne lui a visiblement pas suffi puisqu’il a développé une jurisprudence originale et s’est permis d’apprécier lui-même la constitutionnalité de la loi.

Deux réformes constitutionnelles ont amplifié cette évolution. Ainsi, à partir de 1974, soixante députés ou sénateurs peuvent saisir le Conseil constitutionnel, alors qu’à l’origine seuls le Président de la République, le Premier ministre et les deux présidents des chambres le pouvaient. C’est en 2008 qu’intervient la réforme très attendue de la Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC), qui va marquer l’entrée du droit constitutionnel dans les prétoires. Depuis, n’importe quel citoyen a la possibilité de soulever un problème de constitutionnalité d’une loi lors d’un procès.

Le principe de suprématie de la Constitution est certain. Fondé sur la doctrine constitutionnaliste, il est l’expression d’une volonté de réglementation des grands principes du droit et de protection contre l’arbitraire exécutif. Napoléon Bonaparte aura justifié ces craintes en déclarant : « Il faut qu’une constitution soit courte et obscure. Elle doit être faite de manière à ne pas gêner l’action du gouvernement ». La Ve République a voulu garantir le respect de la Constitution de 1958, du moins par les lois, et affirme ainsi clairement sa vision du texte comme norme suprême. Mais cette suprématie n’est pas sans limite, et si la Constitution subordonne bien les lois, d’autres normes ne doivent pas être négligées.

- Des limites à la suprématie de la Constitution

La suprématie de la Constitution est un principe auquel la Ve République attache visiblement une importance centrale. Mais en sortant du droit interne, la zone de confort du texte du 4 octobre 1958 s’estompe. La prétendue suprématie de la Constitution n’est pas sans limites, en effet, le texte a un concurrent : les traités et accords internationaux (A). Et l’on remarque malgré tout dans la jurisprudence un réel dogmatisme constitutionnaliste face au droit communautaire (B)

- Les traités et accords internationaux dans la hiérarchie des normes

Le Préambule de la Constitution de 1958 précise que "la République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international". Les traités sont donc intégrés à l'ordre juridique existant, en droit positif français, ce qui fait que le pays est moniste et non dualiste.

Mais le titre VI de la Constitution de la Ve République, comprenant les articles 52 à 55, précise également des conditions pour que ces traités soient intégrés dans l’ordre juridique interne. Ainsi, l’article 55 de la Constitution dispose que "les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie". En résulte que les traités doivent être ratifiés, et ce par le Président de la République, comme le dispose l’article 52 de la Constitution (« Le Président de la République négocie et ratifie les traités »). La « publication », deuxième condition à laquelle fait référence l’article 55, se fait au Journal officiel. Et enfin, l’autre partie signataire doit également respecter le traité ou l’accord, si tel n’est pas le cas ce dernier n’a plus de force juridique.

Il faut néanmoins noter que la convention nouvellement intégrée au droit français, à en croire la hiérarchie des normes, reste subordonnée à la Constitution. Conformément à l’article 54 de la Constitution, le Conseil constitutionnel peut donc être « saisi par le Président de la République, par le Premier ministre, par le président de l’une ou l’autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs » si un doute est émis sur la constitutionnalité de l’une des clauses du traité visé. Il s’agit ici d’un contrôle direct de constitutionnalité.

En réalité, le droit international n’autorise pas un État à utiliser sa constitution pour déroger à l’une des clauses d’un traité dont il est signataire. Ainsi, l’article 54 dispose que si le Conseil Constitutionnel a déclaré inconstitutionnelle la clause contrôlée du traité, la Constitution devra être révisée afin que l’engagement international soit ratifié ou approuvé. L’on remarque ainsi une rupture entre la hiérarchie des normes et les faits, car les traités ont bel et bien la possibilité d’influencer la Constitution voulue suprême. F. Chaltiel écrit que « c’est ainsi que, portant atteinte à la souveraineté, les traités sont inscrits dans la Constitution, sans pour autant que les dispositions constitutionnelles relatives à la souveraineté aient, elles-mêmes été révisées » (l.11-13).

De fait, ce texte de F. Chaltiel estime que la suprématie de la Constitution n’est pas respectée par la Constitution elle-même, car en admettant l’éventualité d’être influencée par des conventions dont l’État est signataire, celle-ci rend questionnable sa position au sommet de la hiérarchie manichéenne des normes. Certes, l’autorité du texte de 1958 a été démontrée à bien des égards, mais seulement dans le domaine du droit interne. La Constitution semble perdre son monopole lorsqu’il s’agit du droit externe, car elle doit s’adapter au lieu

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