La Chambre criminelle, ainsi que l’assemblée plénière de la Ccass ont eu à se prononcer, par ces deux arrêts sur la question de la prescription de l’action publique.
Par Ramy • 27 Février 2018 • 1 829 Mots (8 Pages) • 715 Vues
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Et pour ce qui est de l'affaire en cause, on observera qu'on ne peut « oublier » que ce que l'on a précédemment connu, ce qui n'est pas le cas, lorsque l'infraction est demeurée cachée de tous. (Arrêt n°2) De plus, le développement des preuves scientifiques a fait perdre une grande partie de la pertinence de cet argument, alors que la preuve peut être apportée de plus en plus tardivement, au fur et à mesure des avancées des technologies scientifiques. La chambre d’instruction. Dans cette affaire, l’autorité de poursuite était dans l’impossibilité absolue d’agir dans la mesure où « ni un tiers, ni une autorité n’était en mesure de s’inquiéter de la disparition d’enfants nés clandestinement, mort dans l’anonymat, et dont aucun indice apparent ne révélait l’existence physique »
II) La suspension de la prescription en cas d’obstacle insurmontable à l’exercice des poursuites au jour de la découverte du corps
La Cour de cassation consacre une suspension du délai de prescription (A), ce qui risque de générer une confusion en matière de prescription, par la multiplication des techniques d’évitement de la prescription de l’action publique. (B)
- La consécration d’une suspension du délai de prescription
L'Assemblée plénière consacre, dans le cas présent, une suspension du délai de prescription de l'action publique fondée sur la présence d'un obstacle insurmontable à l'exercice des poursuites pénales. En effet, les grossesses et les accouchements étaient demeurés totalement ignorés tant par l'entourage proche de la mère que par le corps médical. Le défaut de connaissance des grossesses expliquait que nul ne s'était inquiété de la disparition des enfants nés clandestinement et dont aucun indice n'avait révélé l'existence. L'Assemblée plénière approuve les chambres de l'instruction qui avait déduit des faits l'existence d'un obstacle insurmontable à l'exercice des poursuites. En présence d'un tel obstacle insurmontable, « le délai de prescription avait été suspendu jusqu'à la découverte des cadavres », (Arrêt n°2) transformant les meurtres en crimes quasi imprescriptibles.
Ainsi, l’Assemblée plénière s'affranchit des exigences du principe de légalité qui imposent au juge d'appliquer strictement la loi pénale, notamment l’article 7 du Code de procédure pénale. (Arrêt n°1) La Cour de cassation affirme que la loi énonce un principe de prescription de l'action publique auquel elle oppose un principe prétorien d'usage de la suspension. Le risque d'une telle position éloignée des règles légales relatives à la prescription de l'action publique est de faire naître une forme d'arbitraire.
- Un contournement accru des règles de prescription
Le recul du point de départ de la prescription a émergé, dans un premier temps, principalement à l'égard des infractions en matière d'atteinte à la vie privée et des infractions de droit pénal des affaires, telles que l'abus de biens sociaux ou le délit de favoritisme. Ce qui justifie la solution de la chambre criminelle, en décidant de ne pas l’étendre en matière de dissimulation. (Arrêt n°1) La jurisprudence différencie les infractions clandestines par nature pour lesquelles le caractère occulte est un élément constitutif, des infractions dissimulées qui supposent de la part de leur auteur un acte intentionnel d'occultation. En présence d'infractions clandestines par nature ou dissimulées, le point de départ de la prescription est retardé au jour où elles sont découvertes. Dans le cas présent, alors que l’on peut dire que le meurtre n'est pas une infraction clandestine par nature, il est tout à fait possible de concevoir une infraction dissimulée par la volonté de son auteur, en raison des grossesses dissimulées aux yeux de tous, des accouchements dans le secret, des enfants dont personne ne sait qu'ils ont existé, autant d'éléments qui permettaient d'utiliser la notion d'infraction dissimulée pour qualifier les manœuvres de la mère. (Arrêt n°2)
Cependant, la confusion en matière de prescription de l'action publique règne depuis longtemps, mais l'arrêt du 7 novembre 2014 vient considérablement accroître le trouble. (Arrêt n°2) La confusion résulte de la multiplication de procédés jurisprudentiels mis en œuvre afin d'éviter l'acquisition de la prescription de l'action publique et donc l'impunité de l'auteur, notamment par les techniques du report et de la suspension. La Chambre criminelle a ainsi initié depuis quelques années un régime dérogatoire de prescription de l'action publique. Ce système prétorien confus est l'objet de nombreuses critiques en raison notamment de sa création contra legem et de l'insécurité juridique qu'il génère, dans la mesure où la suspension pour des raisons factuelles repose sur une appréciation souveraine des juges.
=> La multiplication des techniques d'évitement de la prescription de l'action publique favorise un désordre conséquent dans le régime de la prescription de l'action publique.
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