L’élection est-elle démocratique ?
Par Matt • 1 Novembre 2018 • 3 781 Mots (16 Pages) • 506 Vues
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du manque d’investissement de ce peuple dont on avait si peur.
… pacificateur de nos sociétés en se basant sur un système théoriquement juste
Pour que le système de démocratie représentative soit accepté, il doit néanmoins reposer sur des principes notamment quant au vote, qui semblent pour la majorité, justes. Bernard Manin a mis en évidence ce qui caractérisait la démocratie représentative dans un ouvrage paru en 1995, Principes du gouvernement représentatif.
(1) Il établit que dans une démocratie représentative les élections doivent avoir lieu à intervalles réguliers, de sorte que les électeurs puissent exercer un contrôle sur leurs gouvernants à travers le vote-sanction, ce qui suppose que le mandat est limité.
(2) Les gouvernants doivent recevoir un mandat représentatif : on distingue le mandat représentatif du mandat impératif. A travers un mandat représentatif, les gouvernants sont chargés d’agir pour le bien commun et l’intérêt général : les électeurs lui confient la tâche de chercher le bien commun et l’intérêt général.
(3) la préservation des libertés publiques et des droits fondamentaux : en démocratie doivent pouvoir s’exprimer librement les désaccords. Le temps précédent l’élection permet à de nombreux courants de s’exprimer, on peut y voir le réel moment de Démocratie, peut-être plus que dans l’élection elle-même.
(4) toute décision doit être prise après discussion : une décision doit nécessairement être discutée devant la représentation parlementaire, pour éviter l’arbitraire et pour améliorer les décisions en prenant en compte les objections et les propositions exprimées lors du processus délibératif.
Dans la pratique, la légitimité de la démocratie est garantie par des règles acceptées par les citoyens, et formalisées par les constitutions et les lois fondamentales. Ces constitutions précisent la distribution formelle du pouvoir, et incarnent des valeurs collectives auxquelles la communauté politique s’identifie, les principes fondateurs de l’ordre social et politique : elles rappellent sur quelles valeurs repose le régime. Ce sont ces valeurs qui sont acceptées lors de la participation à l’élection. Enfin, la croissante participation de la population aux scrutins et l’ouverture qui se fait dans les différents milieux sociaux semble montrer que le système électif répond aux attentes de notre société.
Enfin, l’élection aurait pour avantage en fédérant la communauté nationale ou locale autour d’un événement de porter un plébiscite au système, avec une importance historique latente. En participant à l’élection, le citoyen montre son attachement à l’institution, peut-être plus même qu’au candidat pour lequel il a voté. Ainsi, le vote est montré comme un devoir citoyen, par lequel on rend aussi hommage à ceux qui se sont battus pour que cela soit possible.
Ainsi l’élection, comme manifestation de la représentation, apparaitrait comme la voie naturelle pour être support de la démocratie.
L’illusion démocratique de l’élection
Cependant, pour d’autres, l’élection n’est qu’une illusion démocratique qui couvrirait l’absence de pouvoir réel du citoyen et une certaine forme de tyrannie de la majorité.
Non impérativité du mandat
Comme on l’a vu précédemment, la Révolution française a répudié le mandat impératif au profit du mandat représentatif. On peut alors se poser la question de l’utilité de l’élection si l’élu n’a aucune obligation envers ses électeurs. Carré de Malberg écrit à ce sujet en 1920 que « ce que les citoyens remettent à leur député, c’est leur confiance, ce ne sont pas des instructions ».
De plus, on base souvent les élections sur les programmes politiques qui sont censés aider les citoyens à choisir la personne pour qui ils vont voter en fonction des politiques publiques qui seront mises en place une fois le candidat élu. On peut se questionner sur l’utilité de ceux-ci s’il n’y a aucune obligation de respecter ces engagements. Cette situation mène même à une certaine forme de populisme, poussé par les partis basés aux extrêmes de l’échiquier politique, et alimente, par un sentiment général de méfiance envers les politiques, ce que l’on nomme « crise de la démocratie ».
Ainsi, Montesquieu écrit : « Il y avait un grand vice dans la plupart des anciennes républiques : c’est que le peuple avait droit d’y prendre des résolutions actives, et qui demandent quelque exécution, chose dont il est entièrement incapable. Il ne doit entrer dans le gouvernement que pour choisir ses représentants, ce qui est très à sa portée. » Par cette phrase, il met en exergue que le peuple est bel et bien mis à l’écart du champ politique, puisqu’incapable de prendre les décisions. C’est alors qu’on peut véritablement remettre en question le caractère démocratique (reposant sur le peuple) de l’élection. C’est finalement ici deux conceptions qui s’affrontent :
Une première conception où le peuple a un réel pouvoir de décision, un gouvernement du peuple par le peuple. C’est celle à laquelle Rousseau était attaché. Il voyait dans celle qui suit une forme de servitude ponctuée par de brefs instants de liberté. Il ne voulait pas de représentants qui feraient la loi à la place du peuple.
Une seconde conception dans laquelle le peuple est infantilisé, et qui ne serait apte qu’à choisir un candidat dans un liste déterminée qui ensuite choisira pour qui, quitte à ce que ce soit parfois contre lui.
Enfin, il n’existe aujourd’hui aucun contre-pouvoir institutionnel direct du peuple sur ces représentants hormis la possibilité de réélire une autre personne à l’élection suivante, ce qui pose un problème d’équilibre de pouvoir.
Illusion de la majorité
L’autre problème intrinsèque de l’élection comme elle est pratiqué, réside dans ce que les penseurs libéraux nomment par « Tyrannie de la majorité ». En effet, dans la plupart des modes de scrutins aujourd’hui, n’est finalement représenté que les élus de la majorité. Si en première analyse, cela pourrait sembler ne pas poser problème, il s’avère que par répétition, certaines minorités ne sont presque jamais représentées. Ainsi, l’idéal démocratique ne semble pas homogène.
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