Cas pratique et correction de droit des entreprises en diffictulé
Par Ninoka • 21 Septembre 2018 • 2 994 Mots (12 Pages) • 830 Vues
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Le prix de cession offert correspond, dit l’énoncé, à environ 50% du passif privilégié, qui est donc de l’ordre de 240000 euros. Les créanciers chirographaires – payés par hypothèse après les titulaires de sûretés – ne seraient donc pas payés. Il apparaît ainsi que la SA NOURRY envisage de réaliser une assez bonne affaire puisque, en déboursant 130 000 euros, elle deviendrait propriétaire des deux immeubles, dont la valeur totale est de 160000 euros, et de tous les autres actifs mobiliers.
Parce qu’elle inclut l’immeuble de bureaux ainsi que des délais de paiement interdits par les textes, et en dépit des engagements d’ordre social importants qu’elle comporte (reprise de tous les contrats de travail et promesse d’embauche), cette proposition devrait, en l’état, être écartée par l’administrateur, qui pourrait inviter la société NOURRY à la reformuler tant qu’il en est temps (art. R.642-1).
B. Proposition n° 2 (cession à la société CABLOR)
1. Maintien de l’activité et de l’emploi
La société CABLOR conserverait une partie seulement de l’activité et des emplois, et neuf salariés devraient être licenciés. Mais, pour les emplois maintenus, elle accepte la mise en place d’une garantie sérieuse (pénalité de 10000 euros par emploi avec cautionnement bancaire), ce qui est de nature à inspirer confiance. L’est également le fait qu’elle a réfléchi aux besoins de financement du débiteur et qu’elle a pris en compte le besoin d’argent frais pour financer l’exploitation (avance de 40000 euros), quoiqu’elle n’ait rien précisé sur la durée de cette avance. L’administrateur pourrait l’inviter à le faire. Est tout aussi encourageant le fait qu’elle ne sollicite la cession que des actifs afférents à l’activité reprise (et non de l’immeuble) et ne réclame aucun délai pour le paiement des échéances futures des contrats repris.
Enfin, sans exercer la même activité que la SA ÉLECTRIX, dont elle est cliente, elle est loin d’être étrangère à ce secteur économique, ce qui est aussi un atout pour réussir le redressement de l’entreprise.
2. Apurement du passif
Le prix de cession proposé, 70000 euros payables sur trois ans, est assez faible: il représente environ 30% du passif privilégié antérieur du cédant, la SA ÉLECTRIX, ce qui est peu. De surcroît, va s’ajouter à ce passif le coût des licenciements: en effet, lorsqu’ils interviennent dans le mois qui suit le jugement arrêtant le plan de cession et en exécution de celui-ci (art. L. 642-5, al. 4), la charge en est couverte par la garantie de l’AGS (art. L. 3253-8, 2°), mais celle-ci doit être ensuite remboursée par le débiteur, dans les conditions prévues pour le règlement des créances antérieures, l’AGS bénéficiant du privilège général des salariés (art. L. 3253-16, 2° C. trav.).
L’étalement proposé sur trois ans du paiement du prix de cession présente de surcroît l’inconvénient de retarder le paiement des créanciers de la société ÉLECTRIX. En même temps, il démontre aussi que la société CABLOR n’a aucune intention spéculative, puisque, en application de l’article L. 642-9 C. com., elle ne pourra, avant paiement complet, disposer des biens repris autres que des stocks. Même en tenant compte du fait que l’immeuble de bureaux sera réalisé séparément, le prix (environ 120000 euros) sera absorbé par les créanciers privilégiés et il apparaît que les créanciers chirographaires de la SA ÉLECTRIX ne seront pas payés.
II. Choix du projet de plan
L’administrateur a également reçu une proposition émanant de l’associé majoritaire de la SA ÉLECTRIX et tendant à assurer la continuation par celle-ci de son exploitation dans le cadre d’un plan de redressement: il nous faut donc analyser cette proposition (A), avant d’évoquer les critères qui permettront de choisir le (ou les) projet(s) de plan à soumettre au tribunal (B).
A. Proposition n° 3 (proposition de la SA MILANO en vue du redressement de la SA ÉLECTRIX)
La proposition de la SA MILANO, actionnaire majoritaire de la SA ÉLECTRIX, tend à l’adoption d’un plan de redressement (anciennement dit plan de continuation): le débiteur, la SA ÉLECTRIX, continuerait son activité, dans des conditions à préciser (1.).
Il bénéficierait, pour le paiement des créances antérieures et assimilées, de certaines facilités (2.).
- Maintien de l’activité et de l’emploi
Le redressement économique de la SA ÉLECTRIX reposerait sur deux mesures:
- La première est d’ordre financier: un prêt de 80000 euros, d’une durée de huit ans, et sans intérêt, lui serait consenti par la SA MILANO.
- La seconde est relative à l’emploi: huit licenciements immédiats sont prévus, l’allégement des charges en résultant devant permettre de rétablir la rentabilité de l’entreprise. Dans le cadre d’un plan de redressement arrêté par le tribunal, ces licenciements peuvent intervenir selon des conditions très simplifiées (art. L. 631-19, II) et l’AGS peut, à certaines conditions, avancer les indemnités dues aux salariés, sans pouvoir bénéficier pour leur remboursement du privilège des créances postérieures utiles. Ces sommes devront lui être remboursées, mais sa créance est assimilée à une créance antérieure (art. L. 3253-16, 2° C. trav.; l’art. L. 622-24, al. 4 impose à l’AGS de la déclarer).
2. Apurement du passif
Le passif antérieur – auquel s’ajoutera le coût des licenciements – serait réglé grâce à un premier versement de 20%, avec étalement du solde sur six ans, ce qui est relativement favorable aux créanciers: pas de remise de dette sollicitée; paiement sur six ans, et non sept ou huit, comme il est fréquent; premier versement immédiat, alors que l’article L. 626-18 exige simplement qu’il intervienne dans le délai d’un an.
En application de l’article L. 626-5, al. 2, les créanciers qui n’ont pas répondu à cette proposition que leur a transmise le mandataire judiciaire sont censés l’avoir acceptée. Le tribunal devra en conséquence, s’il arrête ce plan
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