Analyse du processus de financement participatif pour les jeunes entreprises innovantes
Par Matt • 19 Octobre 2018 • 5 745 Mots (23 Pages) • 811 Vues
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Les principes du modèle de financement par crowdfunding
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Transparence et confiance
Le premier principe de ce modèle de financement est la transparence et la confiance. Le crowdfunding est né grâce au développement des réseaux sociaux, qui donnent aujourd'hui une confiance renouvelée vis-à-vis d'Internet et permettent l'émergence de pratiques nouvelles et simplifiées. Le crowdfunding tire ainsi des avantages de l'exploitation du potentiel des nouvelles technologies de l'Internet pour rassembler et augmenter l'interaction entre différentes parties à l'intérieur d'une large communauté d'investisseurs et de promoteurs de projets innovants. Les contributeurs peuvent choisir la destination exacte de leur argent et reprendre le pouvoir sur celui-ci. Les plates-formes de crowdfunding présentent des projets portant sur une promesse économique (un objectif de rentabilité attractif) et les crowdfunders sont informés régulièrement des nouvelles du projet et de son avancement.
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Création de lien
Le crowdfunding repose sur un financement créateur de lien. Ce lien est financier, puisqu'il implique une prise de participations ou un prêt d'une somme d'argent, mais il est aussi extra-financier. Les plates-formes de crowdfunding permettent la création d'un lien entre le porteur d'un projet et les individus qui lui permettent de le mener à bien. Elles permettent de fédérer une communauté de clients, de collaborateurs, de fournisseurs en présentant le business model, le produit ou le service à la foule des internautes pour les convaincre. Le phénomène s'inscrit dans l'économie collaborative (Rifkin, 2014) et, plus précisément, dans un mouvement de fond poussé par la volonté du consommateur de devenir un « consom'acteur ».
Les valeurs véhiculées par ce modèle de financement sont le partage et la participation, et la finance participative ne repose donc pas uniquement sur des motivations financières. La motivation de la foule naît aussi du sentiment d'aide et de participation au développement de nouveaux produits et entreprises (Gerber et al., 2012). Bien que les études empiriques se soient intéressées à d'autres formes de crowdfunding (notamment les dons avec ou sans contrepartie), il semble plausible que l'altruisme et des motivations sociales, personnelles et financières animent également les crowdlenders et les crowdinvestors (Pierrakis et Collins, 2013), mais sans doute dans une moindre mesure (ils sont investisseurs ou prêteurs). Par conséquent, les décisions de financement prises par la foule sont aussi impactées par des avantages non pécuniaires. Le choix peut en effet correspondre à des motivations ludiques (par exemple, chercher à deviner le projet qui va fonctionner) ou morales. L'affect est aussi très important dans le choix des projets et dans la réussite de la levée de fonds pour les entreprises (Bessière et Stéphany, 2014). Il faut souligner que ce type de décisions en un « clic » basé sur les émotions est aussi une source de fragilité intrinsèque de ce modèle de financement puisque les décisions peuvent être plus guidées par l'impulsion que par la raison. L'approche financière selon laquelle la relation entre risque et rentabilité est positive peut alors être renversée, pour un projet apprécié par un individu, avec une perception du risque faible et une perception des bénéfices élevée (Slovic et al., 2004). Le crowdfunding se situe ainsi à la marge de la finance.
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Collaboration et connaissance partagée
Le modèle de la plate-forme de crowdfunding est basé sur le principe de la collaboration et de la connaissance partagée. Il mise donc sur l'intelligence collective et bénéficie de sa capacité à mobiliser une expertise industrielle et financière pointue et adaptée à chaque projet. Schwienbacher et Larralde (2012) ont montré, à partir de l'étude de cas du projet Media No Mad, que l'interaction avec le réseau, la communication et l'échange de compétences sont essentiels dans un processus de crowdfunding. En outre, l'étude de Kim et Viswanathan (2014), réalisée dans le cadre d'une plateforme spécialisée dans les applications pour mobiles, a montré que les décisions de la foule sont fortement influencées par celles des investisseurs experts. Les choix de projets des investisseurs compétents fournissent un signal sur la qualité du projet (Bessière et Stéphany, 2014).
Le crowdinvesting permet de lever des fonds pour des projets très risqués (startup, innovation, R&D – recherche et développement –, etc.) que les banques ou les investisseurs financiers traditionnels (capital-risqueurs, business angels) ne sont pas forcément prêts à financer. L'un des avantages du financement de l'innovation par le marché réside dans la diversité des opinions (Allen et Gale, 1999). Contrairement au financement par un intermédiaire financier où la décision d'investissement est déléguée à une personne (ce qui réduit certes les coûts d'information, mais aussi la diversité d'opinions), le financement par le marché implique que chaque participant acquière l'information et prenne sa propre décision. Le même argument peut être avancé pour justifier le financement de l'innovation par la foule : celui-ci est supérieur à un financement par un intermédiaire financier car les nouvelles technologies de l'Internet rendent l'information peu coûteuse et permettent une grande diversité d'opinions grâce à un accès à un très grand nombre d'internautes.
L'existence d'une « preuve sociale » permet par ailleurs de gérer au mieux l'incertitude inhérente au marché d'une start-up en phase d'amorçage (Cialdini, 1984). Le principe de la preuve sociale désigne cette tendance à croire que si la plupart des gens croient en quelque chose ou agissent d'une certaine manière, mieux vaut se conformer à cela en vertu de l'idée qu'autant de gens ne peuvent pas tous se tromper. La preuve sociale est ainsi une forme de persuasion qui provoque une adhésion automatique et donc non réfléchie de la part des individus. Toutefois, de nombreux travaux sur la dynamique des marchés de capitaux se sont intéressés aux phénomènes de contagion des opinions ou encore de comportements mimétiques
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