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La CJUE et l'autonomie du droit de l'Union européenne.

Par   •  5 Avril 2018  •  2 148 Mots (9 Pages)  •  832 Vues

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Mais la CJUE, saisie par la Commission, va affirmer sa compétence exclusive en la matière, sur la base de l'article 344 TFUE, et malgré la présence de ces conventions, et venir par la même occasion condamner l'Irlande pour avoir méconnu son devoir de coopération loyale. L'avocat général Poiares Marduro, lors de ses conclusions affirma que la justification de la Cour a été menée « en exposant que de telles pratiques pouvaient porter préjudice à l’autonomie de l’ordre juridique communautaire et au devoir de loyauté au système judiciaire ». Il s'agit donc bel et bien de l'application de la portée de l'arrêt Van Gend en Loos sur le point de vue de l'autonomie, mais cette fois ci concernant les relations extérieures.

Un autre arrêt, qui a fait couler beaucoup d'encre, appuie également cette extension des rapports internes aux rapports externes, il s'agit de l'arrêt Kadi, rendu en 2008.

Ici, la Cour va se montrer on ne peut plus explicite. « Le contrôle, par la Cour, de la validité de tout acte communautaire au regard des droits fondamentaux doit être considéré comme l’expression, dans une communauté de droit, d’une garantie constitutionnelle découlant du traité CE en tant que système juridique autonome à laquelle un accord international ne peut pas porter atteinte ».

Cette affaire, portant sur le contentieux des "listes noires" de terroristes, a permis à la Cour de se positionner clairement sur l'autonomie du droit européen dans les relations externes, ici face à une résolution de l'ONU, et de créer un véritable pendant à l'affaire Van Gend en Loos qui prévaut au niveau interne.

Mais cette jurisprudence de la Cour, largement commentée, appuie l'impression d'une juridiction à double visage, opportuniste, utilisant la notion fondamentale d'autonomie à la manière d'un talisman pour se justifier et se sortir de toute situation.

II) La liberté européenne sous couvert de l'autonomie

S’il parait évident à travers les arrêts cités ci-dessus que la Cour tient à défendre l’autonomie du droit de l’Union, dans un but de réalisation des objectifs de l’UE, elle n’est pas néanmoins exempte de toute critique quant à la manière utilisée. Car au nom du principe d’autonomie, la Cour semble appliquer à deux situations semblables, à savoir les rapports internes et externes mettant en confrontation deux droits, un raisonnement opportuniste (A). Une impression de couverture derrière le principe autonomie confirmée au travers de l’affaire autour de l’adhésion de la Cour à la Convention Européenne des Droits de l’Homme. (ci-après CESDH) (B)

A) Un raisonnement opportuniste de la Cour

L’affaire Kadi énoncée-ci-dessus en est l’exemple, l’autonomie semble alimenter deux conceptions des rapports de normes différents selon l’ordre juridique concerné. Si d’un côté la Cour affirme la primauté du droit communautaire sur le droit national, même sur les constitutions, elle se permet de l’autre côté de faire primer également son droit communautaire sur le droit international.

Ainsi, cette attitude opportuniste de la Cour semble se montrer particulièrement lors de l’affaire Kadi, et faire évoluer la position de la Cour vers une ambiguïté entretenue qui pourrait être résumée à l’adage « fais ce que je dis, pas ce que je fais ». La Cour interdit aux juridictions nationales ce qu’elle se permet de faire au niveau des rapports externes.

Certes, il est indéniable que ce dualisme pratiqué dans l’arrêt Kadi sert avant tout à la défense des intérêts communautaires, et non pas à contester l’existence d’un droit international. La Cour reconnait d’ailleurs dans l’arrêt que « la validité des actes de droit dérivé peut être affectée du fait de leur contrariété avec une règle de droit international »

Il s’agit donc d’une utilisation stratégique du droit international, pourrait-on dire, pour contrebalancer la critique faite ci-dessus.

La notion d’autonomie dans les mains du législateur communautaire fait donc figure de liberté d’adaptation, mais également d’inspiration du droit international tout en conférant au droit communautaire la primauté.

C’est cette même notion d’autonomie qui a été reprise, une nouvelle fois de manière opportuniste par la Cour dans l’affaire portant sur l’adhésion de la Cour à la CESDH.

B) Une liberté menacée par l’adhésion à la CEDH

L’arrêt Bosphorus en annonçait les prémices en 2005, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) présente en matière d’autonomie une « menace » pour la CJUE et l’autonomie du droit de l’Union.

En effet, dans cet arrêt, la CEDH se déclare compétente pour vérifier la conformité d'une mesure nationale d'application d'un règlement communautaire au regard de la Convention. Ce contrôle indirect du droit communautaire pouvait être vu comme une atteinte au principe d’autonomie. Cet arrêt relançait alors la question de l’adhésion de la CJUE à la CESDH, qui s’était posée déjà depuis de très nombreuses années sans être véritablement traitée.

Si l'article 6 paragraphe 2 du TUE prévoit bien que l'UE adhère à la CEDH, certains États membres ont tenu à ce que cette disposition soit accompagnée d’une réserve afin que cette adhésion ne vienne pas modifier les compétences de l’Union telles qu’elles sont définies dans les Traités.

Preuve de cette préoccupation, le protocole n°8, adopté par la suite est venu réaffirmer cette réserve, disposant également que « les caractéristiques spécifiques de l'UE et de son droit doivent être préservées », sans toutefois les définir. Il s’agit donc bien d’une référence à l’autonomie de l’ordre juridique de l’Union Européenne.

En effet, en contraignant la Cour à modifier son interprétation des normes de l’ordre juridique européen, y compris supérieures, et à privilégier le cas échéant des interprétations concurrentes nationales ou internationales, le principe d’autonomie s’en retrouverait fortement perturbé.

L’avis 2/13, rendu par la Cour en 2014, concernant la question de la conformité aux traités du projet d’accord d’adhésion de l’Union à la Convention européenne des droits de l’Homme était donc très attendu. Dans celui-ci, la Cour, vient prendre à contrepied

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