Portrait de madame Verdurin
Par Raze • 8 Décembre 2017 • 1 812 Mots (8 Pages) • 1 408 Vues
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champ lexical de la peine
verbe d’état (avoir l’air) à l’imparfait, succession des infinitifs : insister sur la durée pour mettre en relief les efforts de Madame Verdurin pour contenir les excès d’un rire…
…un rire qui, si elle s'y fut abandonnée, l'eût conduite à l'évanouissement / accès mortel
modulation dramatique : le rire peut être dangereux
- La métaphore animalière
Madame Verdurin est animalisée par cette métaphore filée, elle devient un oiseau :
Par la place qu’elle occupe
juchée sur son perchoir
Par la mécanique du rire (trait physique) + cf définition du rire de Bergson = « du mécanique plaqué sur du vivant »
elle poussait un petit cri, fermait entièrement ses yeux d'oiseau qu'une taie commençait à voiler
Par son caractère (aspect moral)
pareille à un oiseau dont on eût trempé le colifichet dans du vin chaud
= comparaison naïveté, caractère enfantin, candide (Madame Verdurin, une cervelle d’oiseau ?)
Par peur d’être surpassée par un fidèle dans l’observance des codes du « salon » d’être suspectée d’un défaut d’amabilité ou de sensibilité, elle pratique la surenchère jusqu’à l’outrance : application que met le narrateur à décrire scrupuleusement la gestuelle de simulation du rire mise au point par la patronne.
23- Une satire héroï-comique
3 longues phrases seulement dans cet extrait : la phrase longue, marque de fabrique proustienne, rappelle la complexité des phrases latines mais elle impose surtout un rythme particulier au service du fond
- Effet de décalage
Proust renouvelle le registre héroï-comique, procédé comique de l’âge classique qui consistait à exprimer dans un langage noble des contenus prosaïques (parodie de l’épopée).
aspect littéraire des temps employés, peu usités, dans le respect de la concordance des temps + danger du rire
= décalage entre le ton soutenu et le sujet traité qui est le rire feint de Madame Verdurin et cette microsociété du paraître.
- Un tableau lapidaire
Telle
Monosyllabe, début de phrase lapidaire pour désigner Madame Verdurin, saisissant résumé de la longue phrase qui précède
et brusquement, comme si elle n'eût eu que le temps de cacher un spectacle indécent ou de parer à un accès mortel, plongeant sa figure dans ses mains qui la recouvraient et n'en laissaient plus rien voir…
Ici, le narrateur détaille avec beaucoup de sophistication la ruse trouvée par Mme Verdurin pour se soustraire au traumatisme laissée par l’accident de la mâchoire
si elle s'y fut abandonnée, l'eût conduite
- une satire savamment orchestrée par l’ironie proustienne + lexique péjoratif :
celle de cette mondanité du début du XXème siècle. On parle de snob, terme d’origine britannique mais dont l’étymologie prête à controverse.
Sources Wikipédia :
Au lendemain de la bataille de Waterloo, le Royaume-Uni a connu une importante révolution industrielle. Dans cette génération, nombreux furent les fils de la bourgeoisie qui eurent accès à de prestigieux établissements scolaires jusque-là fréquentés essentiellement par les enfants de l'aristocratie. L'appellation de snobs aurait alors désigné ces fils de la bourgeoisie par opposition aux nobs, les enfants de la nobility (noblesse), trop jeunes pour porter un titre nobiliaire et simplement qualifiés de « Honorables » : il importait de bien marquer la différence entre les deux classes sociales. Dans cette hypothèse, l'étymologie de snob correspondrait au latin sine nobilitate (sans noblesse).
Un snob, c'est-à-dire une personne qui fait preuve de snobisme, cherche à se distinguer du commun des mortels. Désireux d'appartenir à une élite, le snob tend à reproduire le comportement d'une classe sociale ou intellectuelle qu'il estime supérieure. Souvent, il imite les signes distinctifs de cette classe, qu'il s'agisse du langage, des goûts, des modes ou des habitudes de vie. Il traite avec mépris ceux qu'il considère comme ses inférieurs.
Dans cette microsociété qu’elle recrée et qui s’apparente aux salons précieux, Madame Verdurin préside, occupe la place d’honneur. Bourgeoise excessive, elle déploie de formidables efforts pour paraître une femme du monde digne et convenable. Proust nous la dépeint avec une veine satirique qui met en relief tout le ridicule du personnage. Cette caricature rappelle celle des pièces de Molière et l’ironie d’un Flaubert.
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