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Le Misanthrope, acte I, scène 2, Molière

Par   •  2 Septembre 2018  •  1 148 Mots (5 Pages)  •  2 131 Vues

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Cet exemple de conversation est de nature à justifier la misanthropie d’Alceste.

- Sur la littérature

Molière reprend ici ses critiques contre les poètes futiles et infatués d’eux-mêmes tels que Trissotin dans Les Femmes savantes et les précieux évoqués dans la scène IX des Précieuses ridicules.

Le sonnet d’Oronte est une parodie de poésie. C’est un texte précieux, maniéré, à l’opposé du naturel comme l’explique Alceste des vers 385 à 388. Il s’agit d’une poésie amoureuse à laquelle Alceste oppose une « vieille chanson » qui a le mérite d’évoquer le sentiment amoureux dans son authenticité.

La recommandation de Molière est de ne pas céder aux modes qu’Alceste désigne sous la périphrase v. 392, « méchant goût du siècle » et de rester simple.

- Conduit à une réflexion sur l’honnête homme

Il juge à la lumière de sa raison. Il se fait sur les choses une opinion personnelle. C’est ainsi qu’Alceste invite son fâcheux à enfin dire son texte et ses variations sur le verbe voir, en plus de traduire son exaspération, sont une invitation sincère à entendre le texte pour qu’il puisse juger de sa qualité avec sincérité : v. 309 « Nous verrons bien », v. 312 « Nous allons voir », v. 314 « Voyons ».

Il use de détours pour éviter l’affrontement.

C’est avec élégance qu’Alceste invente l’anecdote de l’ami poète à qui il se serait trouvé contraint de lui conseiller d’arrêter d’écrire et en fait le récit au discours indirect par délicatesse : v. 344-345 « Je disais […] qu’il faut … ». Sa mise en garde est délicate. Le spectateur entend bien que sa dernière phrase v. 373 « C’est ce que je tâchai de lui faire comprendre » s’adresse à Oronte à qui il voudrait épargner le ridicule.

Conclusion : Voici comment Henri Bergson, dans Le Rire, analyse ce passage : « II y a en réalité deux hommes dans Alceste, d'un côté le "misanthrope" qui s'est juré maintenant de dire aux gens leur fait, et d'autre part le gentilhomme qui ne peut désapprendre tout d'un coup les formes de la politesse, ou même peut-être simplement l'homme excellent, qui recule au moment décisif où il faudrait passer de la théorie à l'action, blesser un amour-propre, faire de la peine. La véritable scène n'est plus alors entre Alceste et Oronte, mais bien entre Alceste et Alceste lui-même. De ces deux Alceste, il y en a un qui voudrait éclater, et l'autre qui lui ferme la bouche au moment où il va tout dire. » On peut donc imaginer que chacune des répliques «Je ne dis pas cela» se fait sur un ton de plus en plus emporté, Alceste s'irritant de plus en plus contre l'insistance d'Oronte mais surtout contre ses propres contradictions.

De Philinte ou d'Alceste, quel est le plus proche des convictions de l'auteur ? La réponse n'est pas facile, car la satire que fait le second à propos des écrivassiers, des rimasseurs de tous poils semble un thème constant des comédies de Molière. Sans doute cette complexité explique-t-elle pourquoi les spectateurs des siècles suivants, en particulier Rousseau et les romantiques, ont plutôt admiré l'exigence morale du misanthrope que la froide adaptation sociale de Philinte.

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