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Anthologie de poème

Par   •  15 Novembre 2018  •  2 741 Mots (11 Pages)  •  590 Vues

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Sur le tableau noir du malheur

Il dessine le visage du bonheur.

Jacques Prévert

[pic 5]

Peinture Doury

Toute la vie d'un coeur

J'allais au Luxembourg rêver, ô temps lointain,

Dès l'aurore, et j'étais moi-même le matin.

Les nids dialoguaient tout bas, et les allées

Désertes étaient d'ombre et de soleil mêlées ;

J'étais pensif, j'étais profond, j'étais niais.

Comme je regardais et comme j'épiais !

Qui ? La Vénus, l'Hébé, la nymphe chasseresse.

Je sentais du printemps l'invisible caresse.

Je guettais l'inconnu. J'errais. Quel curieux

Que Chérubin en qui s'éveille Des Grieux !

Ô femme ! mystère ! être ignoré qu'on encense !

Parfois j'étais obscène à force d'innocence.

Mon regard violait la vague nudité

Des déesses, debout sous les feuilles l'été ;

Je contemplais de loin ces rondeurs peu vêtues,

Et j'étais amoureux de toutes les statues ;

Et j'en ai mis plus d'une en colère, je crois.

Les audaces dans l'ombre égalent les effrois,

Et, hardi comme un page et tremblant comme un lièvre,

Oubliant latin, grec, algèbre, ayant la fièvre

Qui résiste aux Bezouts et brave les Restauds,

Je restais là stupide au bas des piédestaux,

Comme si j'attendais que le vent sous quelque arbre

Soulevât les jupons d'une Diane en marbre.

Victor HUGO

« Jeune Femme à la fenêtre » Salvador Dali [pic 6]

Quand l'avenir pour moi n'a pas une espérance

Quand l'avenir pour moi n'a pas une espérance,

Quand pour moi le passé n'a pas un souvenir,

Où puisse, dans son vol qu'elle a peine à finir,

Un instant se poser mon âme en défaillance ;

Quand un jour pur jamais n'a lui sur mon enfance,

Et qu'à vingt ans ont fui, pour ne plus revenir,

L'Amour aux ailes d'or, que je croyais tenir,

Et la Gloire emportant les hymnes de la France ;

Quand ma Pauvreté seule, au sortir du berceau,

M'a pour toujours marqué de son terrible sceau,

Qu'elle a brisé mes voeux, enchaîné ma jeunesse,

Pourquoi ne pas mourir ? de ce monde trompeur

Pourquoi ne pas sortir sans colère et sans peur,

Comme on laisse un ami qui tient mal sa promesse.

Charles-Augustin Sainte-Beuve

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[pic 7]

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« Massacre en Corée », Pablo Picasso

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L'ennemi

Ma jeunesse ne fut qu'un ténébreux orage,

Traversé çà et là par de brillants soleils ;

Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage,

Qu'il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils.

Voilà que j'ai touché l'automne des idées,

Et qu'il faut employer la pelle et les râteaux

Pour rassembler à neuf les terres inondées,

Où l'eau creuse des trous grands comme des tombeaux.

Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve

Trouveront dans ce sol lavé comme une grève

Le mystique aliment qui ferait leur vigueur ?

- Ô douleur ! ô douleur ! Le Temps mange la vie,

Et l'obscur Ennemi qui nous ronge le coeur

Du sang que nous perdons croît et se fortifie !

Charles Baudelaire

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[pic 8]

Wolfgang Willrich, Famille nordique

Quand nous habitions tous ensemble

Quand nous habitions tous ensemble

Sur nos collines d'autrefois,

Où l'eau court, où le buisson tremble,

Dans la maison qui touche aux bois,

Elle avait dix ans, et moi trente ;

J'étais pour elle l'univers.

Oh ! comme l'herbe est odorante

Sous les arbres profonds

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