Rinocéros de Ionesco

...

La forme de la pièce nous expose les dangers de la massification avec sa tonalité et le discours des personnages. La tonalité prend une tournure lorsqu’elle passe du comique au tragique. À première vue, à l’acte I, l’auteur nous fait rire au moyen des discours des personnages qui sont toujours décalés par rapport à la situation. De plus, Ionesco traite de façon absurde l’apparition fantastique de rhinocéros dans la ville, de telle sorte qu’aucun personnage ne voit le danger que présente l’arrivée de ces bêtes. Toutefois, le tragique prend place à l’acte II. La métamorphose de Jean marquera cette tournure. Sa transformation n’a plus rien de comique, comme l’était celle des autres personnages présentés plus tôt dans la pièce. Il se met à raisonner comme un animal se laissant guider par l’instinct. La violence de Jean se manifeste d’une façon autant physique qu’intellectuelle. « Qu’il ne se mettent pas en travers de ma route, je les écraserais» (p. 100). Jean, à l’acte premier, était décrit par Béranger comme étant un « garçon si humain, grand défenseur de l’humanisme » (p.115). Ainsi, il y a un renversement du rôle. L’auteur nous montre que même le plus humain des personnages peut tomber dans l’effet de massification. Ionesco souligne la dangerosité de ces bêtes et des personnages qui sont en transformation.

D’un autre côté, les répétions des situations illustrent la massification. Des répliques identiques montrent que les personnages se retrouvent dans la même situation de manipulation. L’alternance des répliques nous démontre que les personnages sont interchangeables et que le raisonnement reste le même. Le Vieux Monsieur : «C’est compliqué»/ Bérenger «C’est compliqué » (p.35) /Jean : « Oh! Un rhinocéros! » / La serveuse : « Oh! Un rhinocéros! » / L’épicier : « Oh! Un rhinocéros! » (p.41). Il ne forme qu’un troupeau de gens qui semble réagir uniformément. Ils ne disent rien de significatif faisant d’eux une masse de gens, et non pas des individus. En somme, le changement de tonalité de la pièce, du tragique au comique, et les répétions des répliques nous prouvent les dangers de la massification.

En conclusion, l’auteur dénonce le dangereux phénomène de la massification à travers le contenu et la forme de la pièce. L’environnement propice au conformiste et la facilité à assimiler les personnages expliquent le propos de la pièce qui contribue au dangereux phénomène de la massification. Par ailleurs, la forme de l’œuvre nous expose aussi les dangers de la massification par le changement de tonalité du comique au tragique et les répétions des répliques des personnages. La massification rend l’homme identique aux autres. C’est par le théâtre absurde que les auteurs nous font réfléchir sur la condition humaine. Leur œuvre dénonce des problématiques de la société et leur sujet reste encore à l’affut dans notre société d’aujourd’hui.