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L'Ecume des jours, Boris Vian

Par   •  25 Octobre 2018  •  1 647 Mots (7 Pages)  •  500 Vues

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de deux ou trois minutes, le corps de Chloé avait disparu ». En effet, le lecteur attend des nouvelles du héros : qu’est-il devenu depuis la mort de Chloé ?

- C’est la souris qui prend le relais de la narration, nous apprend que Colin, n’a plus goût à rien, qu’il a perdu toute raison de vivre ; hanté par le souvenir de Chloé (dont il n’a qu’une photo), il guette pour tuer le nénuphar. Il n’a donc plus envie de rien, car, comme on peut le lire dans L’Herbe rouge : « il y a deux manières de ne plus avoir envie de rien : avoir ce qu’on voulait, être découragé de ne pas l’avoir ».

- Contrairement au chapitre initial où Colin était plein de vie et de « bonne humeur », l’image finale de Colin est celle d’un homme brisé, qui dépérit et qui est condamné à faire un faux pas fatal... (cf. film de Gondry où Colin tombe dans l’eau avec le nénuphar, image en N & B, sans son, que musique comme dans les vieux films muets : sorte de régression/ dépérissement/ appauvrissement du cinéma, comme régression du personnage).

III/ La mort de la souris

1) Le raffinement de la mise en scène

- Plan élaboré de la souris : discours qui veut convaincre le chat et lui donne plusieurs arguments : elle est jeune », « bien nourrie », a des raisons de vouloir se suicider, … Du coup, le chat est convaincu, sa sensibilité est touchée.

- Mais c’est un chat humain- et non mangeur de souris : il attend qu’on lui marche sur la queue pour croquer la souris ! Plan élaboré aussi pour la mise à mort de la souris par le chat : laisse dépasser sa queue pour qu’on lui marche dessus, et qu’il ferme la gueule par réflexe. => C’est très élaboré !

- En fait, toute cette stratégie minutieuse, raffinée, c’est celle de Vian ! Son récit se termine par une chute : le lecteur a compris que la souris va mourir grâce au dispositif de guillotine du chat. La souris accepte cette façon de mourir, mais ni elle ni le chat n’en connaissent le moment... Ils s’en remettent donc au hasard, au destin préparé par l’écrivain...

2) Le choix du détail final

Le détail final est à la fois comique et symbolique.

- Comique car la mention des « onze petites filles aveugles de l’orphelinat de Jules l’Apostolique » qui arrivent en chantant clôt le roman sur une dernière référence ironique à la religion catholique. Dans un jeu de mots antithétique, Vian réunit Julien l’Apostat (un empereur romain qui renia la religion chrétienne) et « apostolique » (qui signifie « héritée des apôtres ») => les fillettes sont « aveugles », tel Dieu qui reste indifférent devant la souffrance humaine de Colin...

- Symbolique car ces fillettes incarnent l’innocence : or elles sont ici l’instrument de mort. De plus, leur cécité renforce le tragique de la situation car l’aveuglement symbolise le destin. Orphelines, elles véhiculent aussi le thème de la mort.

- Cette ultime vision est par conséquent pleine de résonances : l’absurdité de la mort, l’aveuglement du destin, l’innocence tuée par l’innocence, ...

- Cependant, nous ne voyons pas mourir la souris : on nous montre seulement l’instrument de son destin en marche, pas plus que nous n’avons vu mourir Chloé (chap. LXIII) ou que nous ne verrons disparaître Colin (différent dans le film de Gondry où on voit Colin sombrer dans le marécage).

· Le chat et la souris ont un rapport inhabituel car amical. Le félin ne veut pas manger la souris : il accepte de la croquer pour lui rendre service. En fait, l’idée de tuer la souris l’indispose parce qu’il ne comprend pas sa motivation ; on voit qu’il fait preuve d’humanité car il ne veut pas qu’elle souffre, et par ailleurs il ne veut pas être complètement responsable de sa mort.

=> Cette scène finale ressemble à un baiser mortel. Son acte s’apparente à un acte d’euthanasie.

CONCLUSION : Ce chapitre achève le roman de façon originale. A la manière d’une fable tragique, le chat révèle son humanité en acceptant d’aider la souris à abréger sa souffrance morale : le texte apparaît alors comme profondément tendre et mélancolique, ce qui émeut le lecteur. En effet, celui-ci comprend, malgré les non-dits, et grâce à une habile mise en scène, que Colin va mourir : le roman prend alors sa dernière tournure tragique. Cependant, l’écriture de Vian reste empreinte d’humour, voire d’ironie, mais elle est aussi chargée de symboles et de bizarreries.

Alors que le romancier a fait mourir Chick et Alise de façon violente, on a l’impression qu’il souhaite laisser au lecteur le soin d’imaginer la mort de ses personnages préférés : Colin et la souris. Il la rend ainsi plus mystérieuse, plus douce également... Au lecteur d’en inventer les détails... (cf. fin du film de Gondry : la souris ne meurt pas mais permet l’écriture de l’idylle entre Colin et Chloé : la boucle est bouclée...)

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