Oedipe Roi, la place de Tirésias chez Sophocle et Pasolini

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En effet, on peut constater dans un second temps que malgré la place sacrée de Tirésias, il n'en reste pas moins humain par ses réactions. Il n'est que le messager des dieux et ne peut en aucun cas influer sur le destin, il est donc condamné à le regarder se réaliser et en souffre. Comme il dit, il est horrible de savoir quand ce savoir ne peut être d'aucune utilité, il admet son impuissance face aux dieux. Ensuite il affirme avoir choisi l'oubli face à la cruauté de son don, oublier pour moins souffrir de ce qu'il sait : « Je savais. Mais j'ai préféré oublier », il a préféré oublier pour moins souffrir de l'horreur qu'il avait vue. Il tente d'éviter le conflit avec le roi, vers 320 « Laisse moi rentrer chez moi. Si tu veux bien tu t'en trouvera mieux et moi aussi. », mais, même si il obéit aux dieux, il reste soumis aux lois des hommes, c'est pourquoi il obéit lorsqu'Œdipe lui intime de rester. Même lorsqu'il affirme qu'il ne dira rien, il dévoile quelque peu la vérité, lorsqu'il dit par exemple « je ne parlerai pas. Je ne dévoilerai pas tes crimes. », il se trahit et ne contrôle pas tout ce qu'il dit. Tirésias cède à la pression d' Œdipe quand celui-ci l'accuse, et change d'avis : il dévoile ce qu'il tenait à garder caché. Il subit l'insulte sur son « grand âge » et sa « cécité » et il maintient son affirmation : Oedipe est coupable. Il riposte vers 364 « Et dirais-je même plus pour t'irriter davantage ? »,semblant presque se jouer d' Œdipe. Il est horrifié par l'oracle qui concerne le roi, et par ce qu'il voit pour l'avenir. Tirésias est donc présenté comme très humain : même s'il porte la parole des dieux, sa place est avec les hommes.

Tirésias rappelle le phénomène de catharsis, il est l'image du spectateur qui souffre de l'ignorance d'Oedipe mais ne peut la combler. Il évoque à la fois la toute puissance des dieux et l'humilité de la position humaine. L'ambivalence de son personnage est donc mise en valeur, il adopte une position paradoxale et inconfortable : messager de la parole des dieux aux hommes, sa place n'est ni à l'Olympe, ni dans la société humaine. Il reste en marge du monde, et si sa clairvoyance est un don, elle reste aussi et surtout un fardeau puisqu'elle est la cause de cette place ambivalente qu'a le devin Tirésias.