Le début des années 1930 représente-t-il l’apogée de l’empire colonial français ?

...

de l’époque. En définitive, on y découvre, avec allégresse et fierté, quantité d’informations sur la vie des populations colonisées. Allégresse et fierté qui ne sont pas partagés par tous car, même si elles sont minoritaires, des critiques.

Le parti communiste français va tenter d’organiser une contre-exposition afin de dénoncer les horreurs des colonies mais celle-ci s’avèrera être un piètre échec. Dans le camp des adversaires de la colonisation, certains courants artistiques comme les surréalistes tenteront de critiquer l’exposition de Vincennes mais peu d’artistes seront entendu. André Gide, par exemple, publiera en 1927 un livre intitulé Voyage au Congo, relatant le malheur des peuples colonisés. Toutes ces critiques ne suffiront pas à entamer un processus de décolonisation car, à l’aide de l’exposition de Vincennes principalement, la France réussit à entretenir dans l’esprit des métropolitains une certaine culture des colonies, insérant une propagande mensongère dans l’imaginaire collectif. Cette démarche fait état d’une arme implacable car, en conquérant ainsi la pensée populaire, la France minimise le risque de se heurter à des contestations massives et accroit, de cette manière, sa puissance coloniale. Malgré cela, il est pertinent de noter l’interrogation du Maréchal Lyautey qui se demandait si l’exposition de Vincennes sonnait le glas ou le renouveau de l’empire colonial. La réponse fut aussi rapide que concise.

En effet, car cette fameuse puissance coloniale n’aura pas duré éternellement. Guidés par les 14 points du président Wilson, évoquant le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, un certain nombre de mouvement contestataires se saisissent de cette idée pour appuyer leur combat. Par ailleurs, les Etats-Unis qui, à cette époque, se replie sur eux-mêmes sont parfaitement hostiles à la colonisation, signe que l’on ne se trouve dans la même état d’esprit qu’au 19ème siècle. De plus, à l’intérieur des colonies, plusieurs indigènes manifestent une vive insatisfaction basée, entre autres, sur le mépris accordé à leur participation pourtant précieuse durant la Grande Guerre. D’où la création de mouvements nationalistes revendiquant leur indécence mais qui sont forcés d’opérer clandestinement car la France n’en permet pas la démonstration. Il est judicieux de mentionner, car c’est tout à fait proche de Vincennes, le parti communiste indochinois formé par Hô Chi Minh en 1930 et qui sera l’un des principaux rouages de la protestation de l’empire colonial français.

Au final, la décolonisation sera excessivement tardive car elle ne se mettra en place qu’après la Seconde Guerre mondiale où la France se comportera bien différemment que durant la première. Tout ce qui était alors en germe durant l’exposition coloniale de Vincennes pourra alors s’exprimer pleinement après 1945. Ce sera à partir de cette date que l’Hexagone commencera à perdre territoire après territoire devant une contestation de plus en plus virulente quant à ses colonies. La Guerre d’Indochine débutée en 1946, achevée en 1954 signera le premier pas (et non des moindres) vers la décolonisation. S’en suivra alors les « évènements » d’Algérie comme on appelait le conflit à l’époque qui se soldera par la reconnaissance de l’indépendance du territoire en 1962. Une guerre absolument terrifiante dont les effluves inaugureront une décolonisation quasiment totale.

Cette décolonisation prouvera bien une chose ; c’est que la France, après avoir gagné un territoire qui n’aura jamais été aussi vaste, adopté une économie florissante et avantageuse ainsi que conquis la pensée populaire, ne fera que perdre progressivement son influence pour retourner à la case départ. Son empire colonial s’effondrera alors graduellement tout comme celui des britanniques qui devront rendre Hong-Kong à la Chine en 1997.

En définitive, l’empire colonial français n’aura jamais été aussi puissant qu’au début des années 1930 car elle aura allié la confiance des métropolitains avec une expansion territoriale jamais atteinte auparavant ainsi qu’un commerce généreusement profitable, chose qu’elle n’avait réussi ni avant l’exposition de Vincennes qui marque une étape décisive dans la propagande coloniale ni après, en témoigne la décolonisation, certes tardive, mais néanmoins quasiment parfaite. De ce fait, il est tout à fait aisé de dire que le début des années 1930 marque bel et bien l’apogée de l’empire colonial français tant il n’aura jamais aussi puissant et commercialement et territorialement tout conquérant la pensée populaire, au passage, réduisant ainsi toutes les critiques qui ne pourront se manifester tout à fait que bien plus tard.