Le pouvoir réglementaire en France : unité ou diversité ?
Par Ramy • 4 Novembre 2018 • 3 428 Mots (14 Pages) • 727 Vues
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Il est clair que le président possède un grand pouvoir sur l’administration française, mais il n’égal pas celui du Premier Ministre. En effet, il est écrit à l’article 21 de la Constitution que le premier ministre « exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils et militaires ». C’est donc à lui qu’il appartient de prendre les règlements nécessaires à l’application des lois ; ceux-ci sont, le cas échéant, contresignés par le ou les ministres chargés de leur exécution. Ces décrets représentent pratiquement l’ensemble des décrets, puisque la plupart ne sont pas délibérés en Conseil des Ministres.
A côté du pouvoir résiduel du président, le Premier Ministre dispose du pouvoir règlementaire autonome en vertu de l’article 37 de la constitution et le Conseil d’Etat, dans son arrêt Labonne, 1919, reconnait au chef du gouvernement le pouvoir de prendre des règlements de police administrative générale à l’échelon national.
Le président et le Premier Ministre sont les principaux membres de l’exécutif, et détiennent en presque totalité le pouvoir règlementaire. Il est clairement affirmé dans la Constitution que le pouvoir règlementaire français est à première vue, unifié, peu diversifié, reposant en grande partie entre les mains du Premier Ministre et de manière résiduelle dans celles du Président de la République. L’unification est bien affirmée, bien qu’elle se voie déconcentrée par délégation à d’autres services permettant aux puissances publiques de se libérer de certaines missions.
- Les autres services centraux de l’Etat :
Les administrations civiles de l’Etat se composent d’administrations centrales, de services à compétence nationale, et à l’échelon territorial, des services déconcentrés.
Ici, ces administrations civiles font partie de l’administration centrale de l’Etat, mais témoignent d’une certaine diversité concernant le pouvoir règlementaire.
La charte de la déconcentration du 7 mai 2015 fixe les principes de l’organisation déconcentrée des services de l’Etat. L’article 2 affirme que les administrations civiles de l’Etat sont placées sous l’autorité du Premier Ministre et de chacun des ministres. A l’échelon national, on trouve l’administration centrale et les services à compétence nationale.
Premièrement, l’article 3 de la charte énonce que « les administrations centrales assurent, au niveau national, un rôle de conception, d'animation, d'appui des services déconcentrés, d'orientation, d'évaluation et de contrôle. A cette fin, elles participent à l'élaboration des projets de loi et de décret et préparent et mettent en œuvre les décisions du Gouvernement et de chacun des ministres ». Elles n’ont pas à proprement parlé de pouvoir règlementaire, mais disposent tout de même d’un pouvoir délégué.
Deuxièmement, les services à compétence nationale sont créés par un décret du 9 mai 1997. Ce sont des services ayant une autonomie renforcée tout en restant sous l’autorité d’un ministre de rattachement mais en utilisant la technique de la « délégation de pouvoir » : le directeur du service aura une délégation de pouvoir du ministre de rattachement donnant une grande latitude d’action. Ce sont des services auxquels on donne des fonctions de gestion, d’étude, de formation, de prestation de service, ou toute mission opérationnelle à caractère national. On trouve par exemple les archives nationales, le mobilier national, le service des achats de l’Etat, le service de retraite de l’Etat. Les missions, attributions de ces services sont déterminées dans l’article 4 de la charte de 2015.
Enfin, hors des administrations civiles de l’Etat, on trouve les administrations de mission. C’est une notion dégagée dans les années 1950 par un ministre nommé PISALI. Ce sont de petites structures administratives ayant pour but de régler des difficultés ponctuelles ou bien très spécifiques mais qui implique de coordonner plusieurs administrations de gestion. Elles sont aussi créées pour développer une mission de type « prospectif », dans le but de prévoir l’avenir de la république. On trouve le DATAR, devenu en 2014 le commissariat général à l’égalité des territoires. C’est un service rattaché au premier ministre qui va faire de la coordination interministérielle en matière de développement du territoire.
Ces services centraux témoignent du besoin de l’exécutif de déléguer certaines compétences pour se décharger de toutes ces missions qu’il ne peut réaliser seul. Ces services utilisent la technique de délégation de pouvoir, qui leur donne une grande autonomie tout en les laissant sous l’autorité d’un ministre de rattachement. Bien qu’elles n’aient pas réellement de pouvoir règlementaire, ces délégations témoignent aussi d’une étendue du pouvoir des règlements. En effet, bien que l’exécutif dispose toujours d’un pouvoir général, il utilise l’aide de services pour l’exécution de ce pouvoir. Mais, s’il existe un pouvoir général, il existe aussi un pouvoir spécialisé, parce qu’il est certain que depuis la loi du 10 août 1871 donnant au département le statut de collectivité territoriale, l’exécutif n’est plus le seul détenteur du pouvoir règlementaire.
- Une unité limitée : Le pouvoir règlementaire spécialisé
Le pouvoir réglementaire général appartient exclusivement au Président de la République et au Premier Ministre. Cependant, la Constitution transfert à d’autres autorités un pouvoir réglementaire spécial, limité. De nombreuses lois ont aussi distribué le pouvoir réglementaire à différentes autorités de l'Etat, des personnes morales spécialisées. Le Conseil Constitutionnel encadre très strictement cette pratique en délimitant leur champ d’application, leur contenu.
Nous verrons alors comment les textes ont conférés ce pouvoir règlementaire limité et indispensable à certaines matières précises, dans un premier temps à l’échelon national puis à l’échelon local.
- Reconnaissance du pouvoir règlementaire spécialisé à l’échelon national
Concernant l’administration centrale, les ministres se voient octroyer par la pratique, des pouvoirs dont ils ne disposaient pas avant. En effet, en théorie, comme l’énonce la Constitution, le ministre ne dispose pas de pouvoir règlementaire. Cette norme se justifie par les risques de contradictions entre les normes si chaque ministre pouvait édicter
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