Dans quelle mesure et pour quelles raisons doit-on maîtriser ses désirs?
Par Amandine Lemoye • 14 Février 2018 • Dissertation • 1 761 Mots (8 Pages) • 793 Vues
Dans quelle mesure et pour quelles raisons doit-on maîtriser ses désirs?
Avant d’accéder au rang de question, le désir a souvent été considéré par la philosophie classique comme un problème, sans doute parce que sa nature est contradictoire, ou, en tout cas, ambiguë.
Le désir en effet, est la recherche d’un objet que l’on imagine ou que l’on sait être source de satisfaction. Il est alors souvent accompagné d’une souffrance causée par un sentiment de manque et de privation. Et pourtant le désir semble refuser sa satisfaction, puisqu’à peine assouvi il s’empresse de renaître. Seulement, puisque le bonheur semble assimilé à la satisfaction des désirs, il paraît inaccessible et peut même pousser le sujet à agir sans prendre en compte sa raison.
Dans le désir, il y a de la passivité puisque c’est quelque chose qui n’est pas pas le choix du sujet. Concevoir le désir comme le signe de la dépendance de l’Homme à l’égard d’une nature qu’il ne choisit pas revient alors à nier sa liberté. Déterminé, esclave de ses désirs, comment pourrait-il s’en rendre maître ? Doit-il les soumettre par la force, imposer le pouvoir de sa volonté et de sa raison, ou découvrir quelle autorité ou quel savoir lui permet de les orienter sans les renier ? En effet, faire le choix de museler ses désirs n’en épuise pas la réalité, et vouloir que l’Homme ne soit plus un être de désir reviendrait sans doute à se méprendre sur l’essence de l’Homme.
Vaut-il alors mieux renier entièrement nos désirs, les réprimer afin d’être maître de nous-même, de notre raison, ou plutôt trier les différents désirs afin de savoir lesquels peuvent être assouvis et permettent d’atteindre une absence totale de troubles de l’âme ?
Nous verrons d’abord qu’il est censé de penser qu’il faut évincer ses désirs afin de rester maître de soi même, avant de voir qu’il faut savoir trier ses désirs afin d’en être les maîtres et savoir lesquels accomplir pour atteindre l’ataraxie.
Premièrement, puisque les désirs sont prompts à prendre le dessus sur la raison et donc nous mener à faire des actions mauvaises, il faut savoir évincer ces désirs afin de rester maître de soi et pouvoir toujours user de sa raison pour distinguer le bien du mal.
Les Hommes ont tendance à désirer les choses qu’ils ne possèdent pas. En effet Platon définit le désir comme l’expression d’un manque insatiable, qu’il compare même à un tonneau percé. On ne désire les objets que lorsque nous en sommes privés. Le sujet le perçoit alors comme un bien à atteindre. À partir de cette idée, s'entrevoit deux possibilités : soit le sujet parvient à assouvir son désir, soit il n'y arrive pas. Et si il arrivait à assouvir ce désir, soit il renaîtrait à nouveau, étant donc l’origine d’une dépendance comme par exemple la cigarette, soit il n’éprouverai plus de désir ou de plaisir envers cet objet et en désirerai un autre. Par conséquent, l'individu s'expose à la déception car la satisfaction n'est pas durable et que la satisfaction de certains désirs se fait au détriment d'autres désirs d'où un sentiment de frustration. Ce cercle vicieux empêche l’Homme d’atteindre un bonheur par la satisfaction de ses désirs et l’entraîne au contraire dans un cercle vicieux.
Ces désirs qui nous font entrer dans un cercle vicieux empiètent sur la capacité de raisonner, ainsi, face au désir, la raison ne fait plus le poids et nous avons donc à faire avec la passion, qui guide le sujet aveuglement vers l’assouvissement de sa passion. Cette incapacité de la raison de primer sur le désir entraîne un manque de discernement entre le bien et le mal, il est alors probable que le sujet en proie à la passion, le désir, fasse du tort aux autres à cause de son égoïsme, mais aussi à lui-même. Lorsque nous suivons nos désirs, nous ne discernons plus notre intérêt véritable et on se met en danger. La passion rend aveugle, elle trouble notre jugement, notre faculté de discernement. Le désir est producteur d'illusions, il enflamme l'imagination. Ainsi, notre raison est mise à défaut non pas à cause de notre capacité à raisonner, mais parce que la réflexion est faussée. Puisque notre raison n’est plus capable de distinguer le vrai du faux, le bien du mal, nous risquons même d’agir contre notre intérêt. En suivant nos désirs, nous suivons ce qui apparaît comme bien alors qu’il se peut qu'il soit mal, comme par exemple un joueur compulsif qui ne voit pas le risque de la ruine. Le bien et le plaisir sont alors confondus. C’est pourquoi il est important de prendre conscience de cette ignorance afin que la raison reprenne le dessus. Platon explique cela avec la notion de trinité de l’âme, en considérant que l’âme est divisée en trois parties : le désir, la raison et l’énergie. Les passions dépendent de l'intérieur du sujet. Si on parvient à une harmonie intérieure, on peut gouverner nos désirs, chaque partie de l'âme en accord, à sa place. Pour Platon, la raison doit dominer les désirs en s'aidant de l'ardeur car c'est elle qui peut nous indiquer notre véritable intérêt. Le thumos doit être au service de la raison pour combattre nos désirs. Ils ne doivent pas s'allier à l'epithumos contre la raison pour être assouvis. Il faut du courage et de l'ardeur pour résister aux tentations du désir. Pour lui, vivre selon ses passions c'est être désordonné. Le dérèglement de l'individu doit s'identifier à sa raison afin de s'humaniser, de passer au-dessus du côté bestial de nos désirs .
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