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Soumission et servitude

Par   •  5 Octobre 2018  •  7 578 Mots (31 Pages)  •  392 Vues

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S’il y a différente manières d’accéder à la position de domination, il n’y a qu’une manière de l’exercer, qui consiste à réduire les sujets à des puissances naturelles sans volonté offertes dès lors à l’exploitation, à l’utilisation, à la mobilisation au profit de l’Unique (les tirants).

Les uns et les autres des tirants sont présentés par La Boétie comme réduisant le peuple à l’animalité. Pour le tirant élu, le peuple est un « taureau à dompter », pour le conquérant, le peuple est une « proie » à consommer, pour l’héritier, le peuple est une masse d’esclaves naturels à exploiter.

Nous avons donc, en vertu de l’analyse ci-dessus mis en évidence, une tendance à la domination présente chez certains hommes.

Qu’en est-il des dominés ? Ne tombe-t-il dans la servitude que sous l’effet de la contrainte qu’exerce sur les uns et les autres la puissance tyrannique ?

Si La Boétie accorde qu’au commencement tout asservissement se heurte à une résistance de la part du sujet. Il explique également qu’à force d’obéir, le sujet va prendre un pli et qu’il finira par servir volontiers. Mais comment peut-on comprendre qu’il en arrive là si à un moment donné, sa volonté n’a pas accepté d’abandonner toute résistance et de céder au tirant le pouvoir de se gouverner soi-même ?

La Boétie s’interroge en effet sur l’acte qui consiste à choisir de ne plus vouloir et à pourchasser ainsi la servitude. Nous pouvons émettre l’hypothèse qu’il s’agit là d’une démarche visant à se soulager du fardeau de la liberté, acte de réduction de la liberté par elle-même, ce que La Boétie juge contre nature, c’est-à-dire comme une atteinte à l’identité même de la personne, de l’humanité de l’homme.

Autrement dit, si certains hommes ont soif de dominé, d’autres désirent manifestement l’être, ce qui nous permet de conclure qu’il existe des rapports de dominations librement consentis par les sujets, autrement dit, qu’il se fonde sur un acte de soumission.

La démarche de soumission volontaire atteint un paroxysme lorsque j’abandonne à un être tout mon pouvoir de gouverner. Cependant la soumission dans sa forme ordinaire ne consiste qu’à céder des degrés de liberté en escomptant par là en tirer quelques avantages.

Dans le discours de la servitude volontaire, nous pouvons analyser la soumission sous conditions en nous appuyant sur l’exemple du rapport de DENYS et des Syracusains. Ceux-ci étant sous la menace de plusieurs ennemis nomme DENYS commandant en chef de leurs armées, comptant bien grâce à lui retrouver une situation leur permettant de vivre dans la sécurité et la prospérité. Remarquons qu’ils ne nomment pas DENYS monarque, qu’ils ne lui donnent pas le pouvoir politique de gouverner la cité. Il s’agit bien plutôt de céder des degrés de liberté en escomptant dans une logique de calculs gain/perte, tiré de cette nouvelle situation un avantage.

On peut donc légitimement parler d’une soumission sous conditions par laquelle les Syracusains n’abandonnent pas à DENYS tout leur pouvoir de se gouverner.

Il s’avère néanmoins que les habitants de Syracuse font un mauvais calcul par manque de lucidité concernant l’ambition de DENYS et se retrouve en fin de compte sous l’empire de la tyrannie de ce dernier, autrement dit bascule dans la servitude.

Nous pouvons en conclure que chez La Boétie, il existe des hommes disposés à dominer et d’autres à obéir mais comment s’explique que la domination des uns sur les autres puissent durer ?

Dans Les Lettres Persanes, peut-on isoler une tendance à la domination présente chez certains hommes ?

Intéressons-nous aux lettres consacrées aux Troglodytes. Ceux-ci sont présentés par Montesquieu comme des êtres mi-homme mi- bête qui ayant cherchés à se doter d’institution les ont très rapidement renversés pour laisser libre cours à leur égoïsme. Cette situation correspond à une recherche systématique de domination des uns par les autres, la sauvagerie et la férocité des Troglodytes alimentant un égoïsme dont le libre jeu donne lieu à une guerre de tous contre tous. Deux hommes ainsi s’allient pour s’emparer de la terre travaillée par un troisième et pouvoir jouir des fruits de son labeur. Il y a donc bel et bien chez certains hommes une tendance à la domination de leurs semblables mais pourquoi dire certains hommes ?

Il faut bien noter qu’en se référant aux Troglodytes, peuplade composée d’individus qui sont à peine des hommes. Montesquieu se réfère sans doute à des hommes corrompus, incomplets, inachevés, dégradés en somme non pas à des exemplaires d’hommes représentant la nature humaine dans sa plénitude. Ceux sont donc plutôt des exceptions que des généralités.

Si nous considérons la première forme de coexistence entre les Troglodytes, nous constations qu’elle repose sur la rencontre des élans égoïstes. Libérés de toutes contraintes institutionnelles se faisant les rapports entre les uns et les autres, se placent sous le signe d’une culture de domination puisque chaque égoïste cherche à tirer profit de tous les autres qui sont envisagés comme des utilitaires, des choses ou des objets ressources et non pas comme des personnes.

Ainsi par exemple, 2 hommes se liguent contre un 3ème pour le chasser de son champ et profiter du fruit de son travail. Ainsi, les conditions d’émergence d’une servitude sont omniprésentes chez les Troglodytes dans la mesure où ils sont tous animés par un égoïsme qu’alimente leur férocité et leur sauvagerie.

Qu’en est-il, non plus des conditions d’apparitions des rapports de domination mais des conditions de leur installation dans la durée ?

Poser cette question, c’et s’interroger sur les degrés de collaborations entre le maître et le serviteur. Pour y réfléchir, intéressons-nous aux relations que les Troglodytes cultivent dans la deuxième forme de leur cohabitation. Après s’être détruit les uns les autres sous l’empire de l’égoïsme, quelques survivants mas par des élans de compassion et de générosité vont bâtir un vivre ensemble mieux que nous pouvons qualifier d’expérience de l’autonomie individuelle au sein d’une collectivité.

Nous pourrions qualifier cette expérience de concrétisation d’un idéal de vie inter subjective. Dans cette situation d’harmonie prospère, la population augmente, ce qui conduit les Troglodytes à envisager de placer l’ordre et le développement de leur société sous le gouvernement d’un monarque.

Comment comprendre

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