La servitude volontaire
Par Raze • 3 Janvier 2018 • 1 888 Mots (8 Pages) • 598 Vues
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La Boétie défini la coutume comme étant la première raison de la servitude volontaire : une fois qu’un peuple est soumis, et qu’il le reste, les prochaines générations ne connaitront que cette soumission et ne chercheront même pas à connaître une autre forme de régime. « Il est vrai qu’au commencement on sert contraint et vaincu par la force ; mais ceux qui viennent après n’ayant jamais vu la liberté et ne sachant ce que c’est, servent sans regret et font volontiers ce que leurs devanciers avaient fait par contrainte. (…) Et se contentent de vivre comme ils sont nés (…) » (p.27). Cette conception apparaît avec l’image du cheval : « qui au commencement mordent le frein et puis s’en jouent, et, là où naguère ils ruaient contre la selle, ils se parent maintenant dans les harnais et, tout fier, se rengorgent sous le harnachement ; ils disent qu’ils ont toujours été sujets, que leurs pères ont ainsi vécu ; ils pensent qu’ils sont tenus d’endurer le mal (…) » (p.33). Ce peuple aurait pu se révolter en se renseignant et ne pas se contenter de « regarder ce qui est devant leurs pieds » (p.34) Mais, ce peuple qui est comparé à des bêtes, en est tout bonnement incapable : « ces gens asservis, (…), perdent aussi en toutes autres choses la vivacité, et ont le cœur bas et mou, et incapable de toutes choses grandes (…) » (p.37)
Pour La Boétie, on remarque deux position distinctes du peuple auprès du tyran : la première consiste à épauler le tyran dans le seul but de pouvoir profiter des services dont il dispose: « les théâtres, les jeux, les farces, les spectacles, les gladiateurs, les bêtes étranges, les médailles, les tableaux et autres choses de peu (…) c’étaient, les appâts de la servitude (…), les outils de la tyrannie ». (p.39). Le peuple naïf se fait piégé : « être soupçonneux à l’endroit de celui qui l’aime, et naïf envers celui qui le trompe » (p.39) qui est soulignée avec l’évocation d’un piège à oiseau : « ne pensez pas qu’il y ait nul oiseau qui se prenne mieux à la pipée (…) » et juste après, l’évocation de la pêche: « (…) ni poisson aucun qui, pour la friandise du ver, s’accroche plus tôt à l’hameçon, (…) » La Boétie dénonce également le fait que ce peuple préféré être soumis mais pouvoir jouir de ces plaisirs superficiels plutôt que chercher à obtenir leur liberté, d’où la comparaison du peuple avec un enfant : « amusés d’un vilain plaisir qui leur passait devant les yeux, s’accoutumaient à servir aussi niaisement mais plus mal que les petits enfants qui, pour voir les luisantes images des livres enluminés, apprennent à lire » et « le plus avisé et entendu d’entre eux n’eut pas quitté son écuellée de soupe pour recouvrer la liberté de la République de Platon » (p.40). On va donc souligner cette comparaison dévalorisante par un vocabulaire péjoratif « canaille » (p.40), « populace » (p.43)
Quant à la deuxième, elle consiste non seulement à aider le tyran mais également à l’aider à soutirer de l’argent au reste du peuple : « ce sont toujours quatre ou cinq qui maintiennent le tyran ; toujours quatre ou cinq qui lui tiennent tout le pays servage. Il a toujours été que cinq ou six ont eu l’oreille du tyran et s’y sont approchés (…) les complices de ses cruautés, les compagnons de ses plaisirs, les maquereaux de ses voluptés, et partageant les butins de ses pillages. » (p.47-48). Les personnes concernés se sentent libres alors qu’elle se font duper une nouvelle fois par le tyran : « comme s’ils pouvaient gagner quelque chose qui fût à eux alors qu’ils ne peuvent pas dire d’eux qu’ils sont à eux mêmes, et comme si quelqu’un pouvait avoir quelque bien propre sous un tyran ! » (p.51). Cette situation est associé à l’image du papillon qui se brule les ailes « Ainsi le papillon qui, espérant jouir de quelque plaisir, et se mettant dans le feu parce qu’il reluit, éprouve l’autre vertu, celle qui brûle (…) » (p.56)
Dans l’ouvrage, La servitude volontaire, Etienne de la Boétie met en évidence une image du peuple naïf, et influençable, qui est responsable de sa propre perte. Car selon lui, certes, la liberté est une chose naturelle que tout le monde posséde à la naissance mais il faut savoir la entretenir, or, l’éducation influence la liberté et la soumission du peuple. Il dénonce également la cupidité de ceux qui croient être du côté du tyran.
Nous venons de conclure sur l’image du peuple donnée par La Boétie mais alors qu’en est-il du tyran ? Quelle(s) image(s) La Boétie donne-t-il ?
Est-elle semblable à celle évoquée précédemment dans Le Prince de Machiavel ?
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