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Existe-t-il une culture humaine?

Par   •  19 Août 2018  •  3 198 Mots (13 Pages)  •  548 Vues

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Tous les hommes auront aussi tendance à pratiquer des rites funèbres: que ce soit la crémation chez les hindous, l’enterrement chez les chrétiens, la prière chez les musulmans, la momification en Égypte Antique, la pièce pour Charon en Grèce, les tombeaux Inca au Pérou, les monuments aux morts en France, tous les hommes ont toujours rendu hommage à leurs morts, traduisant une fascination envers ce phénomène qu’est la fin de la vie matérielle et physique et souvent une croyance en un au-delà lointain.

Les hommes ont enfin cette capacité presque exclusive de pouvoir distinguer le bien du mal. Comme dit Abraham Lincoln : « Quand je fais bien, je me sens bien, et quand je fais mal je me sens mal. » Vivant dans des sociétés basées sur des interdits, les hommes savent projeter les conséquences de leurs actes et différencier les bons des mauvais. Bernard Werber explique dans sa pièce Bienvenue au Paradis qu’il « existe des lois au-dessus des lois humaines: la bonté, la compassion, la sincérité... ». Il s’agit ici de la volonté de tendre vers un idéal humain dont les valeurs seraient justes et solides, et pencheraient exclusivement du côté du bien. C’est également une caractéristique culturelle propre à l’humanité.

On pourrait alors penser que la culture est un concept universel et qu’il existe effectivement une seule culture humaine. Mais ce serait sans compter toutes les différences de pratiques, techniques, valeurs et habitudes qui font de notre monde un espace « multiculturel ».

Comment parler de culture sans évoquer la multitude de cultures qui définissent les nombreuses sociétés du monde? Une des principales différences culturelles entre les peuples est la langue. En effet, chaque peuple possède sa propre manière de communiquer : avec quelques sept mille langues différentes parlées au quotidien tout autour du globe comment parler de culture universelle? Comme mentionné précédemment, la langue permet l’expression de symboles et de valeurs, or des langues différentes exprimeront souvent des symboles et valeurs différents. Par exemple en langue anglaise, la lettre I, qui désigne Je, n’a pas de considération particulière, tandis qu’en Russe la lettre « ya », qui désigne aussi le Je, est placée à la dernière place de l’alphabet car « On pense toujours d’abord aux autres avant de penser à soi », comme le dit un dicton populaire russe. La langue est donc foyer de culture et source de différences culturelles. Les pratiques vont quant à elles différer à plusieurs échelles, comme à l’échelle intercontinentale, (avec par exemple l’usage de couverts en Europe qui sera remplacé par l’usage de baguettes en Asie), à l’échelle continentale (où l’on distinguera par exemple la forte tradition de consommation de bière en Allemagne contre celle du thé en Angleterre), à l’échelle nationale (on peut citer la sempiternelle guerre entre les partisans du « pain au chocolat » dans le nord de la France contre ceux de la « chocolatine » du sud-ouest.) ou encore à l’échelle régionale, (où des citadins auront accès à une importante culture via le cinéma, la littérature, les arts graphiques ou la musique contre des ruraux dont l’accès à la culture sera plus limité).

Une autre importante caractéristique discriminatoire en termes de culture est la religion. Avec notamment les trois grandes religions monothéistes dominantes, de grands écarts peuvent se faire sentir, et parfois amener à des conflits: chacune d’entre elles se revendiquant légitime et tentant parfois d’imposer sa vision, on assiste à un choc de cultures contradictoire à l’esprit de culture humaine.

Chaque individu isolé possède quand à lui une culture qui lui est propre et qui n’est identique à celle d’aucun autre homme. Comme l’ont montré des travaux des sociologues Bourdieu et Boudon, chaque homme est influencé par une multitude de milieux sociaux qui vont tous l’influencer pour lui faire adopter des normes et des valeurs parfois en contradiction. La famille est cependant l’instante prépondérante de l’enfance et l’adolescence des individus, suivie du milieu éducatif puis des pairs, des médias et enfin des associations. Un simple individu va ainsi être fortement influencé par au moins cinq instances sociales distinctes dont les pratiques et valeurs peuvent différer voire s’opposer, et vont construire un individu unique avec une culture qui lui est propre, composée de valeurs auxquelles il est attaché, d’habitudes qui rythment sa vie et de goûts ciblés pour des activités précises.

Enfin, comment parler d’une culture humaine alors qu’il existe un fort ethnocentrisme? Cela consiste en la négation de l’autre dans sa différence. Autrement dit, il s’agit de ne pas reconnaître autrui, l’alter parce qu’il n’adopte pas les mêmes pratiques culturelles. L’ethnocentrisme, une « hostilité foncière » (William Sumner) souvent véhiculée par l’éducation, consiste en juger subjectivement d’autres cultures par rapport à la sienne tout en étant persuadé de rester objectif, c’est porter un jugement de valeur en croyant juger de fait. D’un point étranger, celui qui est discriminé de par sa différence est le barbare, qui pour les grecs désignait tout homme qui ne parlait pas la langue d’Athènes. C’est devenu plus tard un mot qui désignait toute personne jugée comme cruelle ou sauvage (dont le terme lui-même dérive de silva, la traduction latine de « forêt »), voire inhumaine. Dans La controverse de Valladolid, le moine Sepulveda est convaincu que les indiens d’Amérique sont nés pour être esclaves, puisqu’ils vivent dans la forêt comme des animaux. Il s’agit d’un point de vue ethnocentriste qui place la culture européenne comme référence. Il va par ailleurs tenter de faire rire ces indiens en les exposant à une farce européenne représentant des rois et des reines, dont l’effet ne se fera pas sentir sur les indiens, puisqu’il s’agit de codes comiques qui ne sont pas les leurs mais que le moine, dans son ethnocentrisme, juge universels. Certains Essais de Montaigne sont quant à eux révélateurs d’une société ethnocentriste et satiriques envers cette dernière. On peut citer sa rencontre avec des brésiliens que les siens qualifiaient de « sauvages » du fait de leur habitude à vivre nus et en forêt, mais qui sont horrifiés par les importantes inégalités sociales de la société européenne, et amusés par les procédures politiques dont le sens leur échappe. L’ethnocentrisme est cependant un phénomène qui va s’estomper avec l’arrivée de théories comme l’évolutionnisme anthropologique et le relativisme culturel, dont Lévi-Strauss se montre partisan avec sa phrase

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