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Conscience et perception

Par   •  24 Août 2018  •  3 649 Mots (15 Pages)  •  573 Vues

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Par rapport à la question « Qui suis-je ? », la conscience serait le sujet de l’objet s’intéressant à l’objet du sujet : le quoi, sur le quoi.

Notes complémentaires :

La conception philosophique de la conscience développée au travers de cette piste est principalement essentialiste, c’est-à-dire que la conscience est considérée sous l’angle d’une essence : il y aurait l’essence de la conscience, l’essence de ce que tu es ; et tout le travail de ton être tendrait à connaître cette essence, cette immatérialité immuable. Nous verrons ensuite que dépasser le stade de la réflexion essentialiste pour s’attacher à une méthode plus nietzschéenne, l’investigation généalogique, nous apporte des réponses supplémentaires.

Berkeley est une très bonne transition pour le prochain sujet, qui tourne toujours autour de la problématique de la conscience : la perception.

Perception

Comme brièvement introduit dans le texte, différentes écoles et traditions philosophiques séparent la perception des sensations ; pour autant, si certains affirment ou récusent la potentialité des sensations à être des fondements, il n’en demeure pas moins que l’existence de la perception ne fait nul doute pour chacun d’entre nous. La perception est effectivement vraie, c’est-à-dire qu’elle est vraie en tant que ses conséquences sont observables par le sujet. Et pourtant, entre la perception qu’a Salomé d’un côté, et Sébastien de l’autre, d’une même expérience, (en apparence du moins, et pour un sujet extérieur qu’on imaginerait dépourvu de conscience [une machine, disons – ce qui ne pourra jamais être le cas, il faut bien s’en rendre compte : nous sommes doués de conscience, et réfléchissons en conséquence ; et alors, nous mettons nous-mêmes de la conscience dans ce que nous voulons dépossédé de cet attribut…)] n’y a-t-il pas un fossé, des perceptions différentes du même évènement ? Les mêmes sensations (le parfum d’une fraise, la chaleur d’un corps, la fraîcheur d’un matin d’automne…) n’aboutissent-elles pas, pourtant, à des perceptions différentes ? La perception, c’est ce qui vient après le ‘‘mais’’.

[Exemple : « Je sais que c’est simplement un shampoing à l’amande, mais il m’évoque/me rappelle /me remémore/m’imprègne de…, etc. »]

La perception serait, dans cet exemple, l’appréhension d’une trace, d’une marque, d’un temps évanoui, dépassé, mais qui persiste en tant que relique. Elle serait un lien entre les étapes, les évolutions du sujet. Nous pouvons également remarquer que des perceptions différentes de nous-mêmes entrent en jeu à chaque réflexion… sur nous-mêmes. Quelle perception ai-je de moi à dix ans, aujourd’hui, à vingt ans ? Et quelle perception aurai-je du moi de vingt ans, quand j’aurai quarante ans ? La perception est donc, nous le voyons, très liée au temps, à une temporalité, à un état présent sur un état passé. Un état passé est toujours passé en rapport d’un état présent : et pour autant, ce même présent n’est-il pas terriblement vacillant ? Ce présent, avant même que je n’aie le temps de réagir, est déjà passé ! Et la perception que j’ai de la perception elle-même, n’est-elle pas une construction de ma raison ? Eh bien, n’existe-il pas une perception de la raison, autant qu’une raison variable de la perception en tant que perception ?

Pour simplifier les choses, imagine des dizaines, puis des centaines de miroirs dans une même pièce ; un palais à glaces. Tu vois bien le problème : tu es à gauche, puis à droite, puis sur le plafond, puis, en fait, tu te diriges vers un miroir ; mais ce n’est pas vers un miroir que tu te diriges, c’est bien vers la sortie. Pourtant, tu y vois ton reflet, non ? C’est bien que le miroir était devant toi, non ? Eh bien, le miroir n’y est plus, à présent, parce que tu as détourné le regard. C’est le point important : quand je parle de perception, ce n’est pas tant ce que je constate qui est important, mais plutôt d’où je constate. Et ce d’où lui-même…, d’où est-il examiné ? La perception ? Un jeu de dupes.

Une conception immatérialiste de la perception :

— George Berkeley, Principes de la connaissance humaine :

« XXVIII. Un Esprit est un être actif, simple, sans division : en tant qu’il perçoit les idées, on l’appelle l’entendement ; et en tant qu’il les produit, ou opère sur elles, la volonté. D’après cela, on ne peut former aucune idée d’une âme, ou esprit, car, toutes les idées possibles étant passives et inertes, elles ne sauraient représenter en nous, par le moyen de la ressemblance et des images, ce qui agit. Un peu d’attention rendra évident à quiconque qu’il est absolument impossible d’avoir une idée qui porte la ressemblance de ce principe actif de mouvement et de changement des idées. Telle est la nature de l’esprit, ou de ce qui agit, qu’il ne peut être perçu par lui-même, mais seulement par les effets qu’il produit. »

« XXIX. Je constate que je puis exciter à mon gré des idées dans mon esprit, changer et varier la scène aussi souvent que je le trouve bon. Il ne faut que vouloir, aussitôt telle ou telle idée s’élève dans ma fantaisie ; et le même pouvoir fait qu’elle s’efface et cède la place à une autre. Ce faire et défaire des idées est ce qui mérite très justement à l’esprit la qualification d’actif. Tout cela est certain, l’expérience en est le fondement ; mais quand nous parlons d’agents non pensants, ou d’une excitation des idées sans qu’aucune volition intervienne, nous ne faisons que nous amuser avec des mots. »

[Explications : Pour certains, l’essence précède l’existence ; pour Kierkegaard, et Camus et Sartre à sa suite, et tous les existentialistes, « l’existence précède l’essence » ; pour Berkeley, esse est percipi : être, c’est être perçu. L’existence est réductible à la perception ; nous pourrions même avancer que l’essence de l’existence, c’est la perception. Ici, donc, la perception n’est pas un simple outil, mais bien la clé de l’être-même du monde. Tu peux également pousser avec Schopenhauer, en parallèle, qui établira, dans un titre évocateur (Le Monde comme volonté et comme représentation) l’argumentaire suivant : le monde, c’est moi ; le monde, c’est ma réflexion ; le monde, c’est ma représentation, c’est-à-dire ma conscience en action, et rien

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