Un soin est un acte par lequel on veille au bien être de quelqu'un.
Par Ninoka • 5 Mars 2018 • 3 349 Mots (14 Pages) • 646 Vues
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Isabelle arrive à ce moment. Elle me fait part de sa surprise car d'habitude il faut presque le sortir de force de la douche. J'aide M. C. à s'habiller. Je me contente de le guider et de l'accompagner dans ses gestes.
M. C. est maintenant près à aller prendre son petit déjeuner dans la salle à manger. Je lui demande alors s'il veut bien m'y accompagner. Isabelle et moi l'aidons à se lever. Une fois debout nous le lâchons, il se redresse et marche lentement jusqu'à la salle à manger. Nous restons près de lui.
Son épouse nous rejoint, elle semble plus détendue. Elle regarde son mari tendrement en lui déposant le plateau du petit déjeuner face à lui. Il la regarde avec un grand sourire et lui dit : « Merci maman, c'est très gentil ».
Elle se tourne vers nous. Nous lisons non seulement de la tristesse sur son visage mais aussi de la fatigue, elle semble exténuée et résignée. Elle nous remercie, nous dit « a tout à l'heure » et file dans la cuisine. Nous prenons congés et quittons M. et Mme C. pour nous rendre auprès d'un nouveau patient.
- PHASE ANALYTIQUE
Avant d'aborder l'analyse de la prise en soin de M. C., je tiens à éclairer la situation en décrivant succinctement la maladie d'Alzheimer dont monsieur est atteint. Il s'agit d'une pathologie neuro-dégénérative, progressive et irréversible qui entraîne a la fois une perte de mémoire mais également des fonctions cognitives (apraxie, agnosie, aphasie). L'évolution de la maladie et notamment des troubles de la mémoire et du langage ont des répercutions sur les capacités à communiquer de la personne malade.
Pour cette raison il me semble opportun d'aborder le concept de la communication. En effet, nos relations humaines se fondent principalement sur la communication verbale, pour traduire une pensée, un sentiment, une émotion. Cela suppose une “bonne intégrité” des canaux de communication de l’émetteur et du récepteur.
Or, dans la situation qui nous occupe, M. C., atteint de la maladie d’Alzheimer, a de plus en plus de mal à se faire comprendre et à comprendre les autres. Il lui est difficile de parler de façon fluide et spontanée, de répondre à une question de manière toujours compréhensible. Il me semble que l’aphasie dont souffre M. C. se manifeste par la substitution au mot correct un mot de sens apparenté (par exemple, “montre” au lieu de “temps”) ou encore l'utilisation d'un mot complètement différent sans lien apparent. L’ensemble peut constituer une forme de discours ou une sorte de jargon difficilement compréhensible par les autres. Il est devenu difficile de communiquer avec M. C. et par là même de connaître ses sentiments, ses émotions. Malgré ce « handicap », Il se met rarement en colère cependant il sait encore signifier son désaccord de façon cohérente.
Comme énoncé en introduction toute relation implique un communication verbale et non verbale. En effet, il existe un para-langage, un langage du corps qui traduit nos émotions malgré nous, de façon inconsciente. Pour cette raison l'observation du patient, son regard, sa posture, ses gestes, ses expressions est essentielle car ils traduisent des émotions, des intentions. C'est ce que j'ai tenté de faire pendant la réalisation du soin auprès de M. C. Non seulement Il a formulé son refus à son épouse « Ce n'est pas l'heure !», mais il l'exprimait également physiquement en se contractant et s'agrippant au lit. Il est évident qu'il a une appréhension à la marche. Même s'il ne l'exprime pas textuellement, M. C. se contracte, s'affaisse, s'agrippe comme pour nous le signifier.
De la même manière, il est possible de lire l'incompréhension de M. C. sur son visage face à une sollicitation. Lorsque que je lui demande s'il souhaite se savonner en lui tendant le gant de toilette, certes il me répond « ah oui » mais je perçois un froncement de sourcil ainsi qu'un regard interrogateur devant cet objet dont il semble ne pas percevoir la fonction. Pour cette raison je n'insiste pas dans le but de ne pas le mettre en difficulté. Peut-être aurai-je dû lui en rappeler l'utilité plutôt que d'ignorer le problème ?
Face aux troubles de M. C. et aux conséquences qu'ils entraînent sur la relation avec autrui, il est important de s'y adapter en recourant à d'autres méthodes de communication. C'est ce que je me suis efforcée à faire tout au long du soin en m'inspirant des méthodes d'humanitude. C'est une approche qui correspond tout à fait à l'idée que je me fais du soin auprès des personnes âgées : Agir dans le respect de leur dignité malgré leurs troubles. C'est au soignant de s'adapter et pas au soigné de pâtir d'une carence d'effectif, du manque de temps, des organisations de services non adaptées, de la fatigue du personnel.... Soignons les comme nous souhaiterions l'être. Je me suis donc intéressée à cette philosophie de soins au travers différents articles et ouvrages.
Pour cette raison je souhaite aborder les principaux piliers sur lesquels repose cette approche :
•La parole, notre principal moyen de communication et de mise en contact avec autrui. Ainsi elle demeure importante dans les soins puisqu’elle permet aux patients et aux soignants de se définir comme Êtres humains,
•Le regard, car l’impossibilité de la parole ne signifie pas la fin de la communication. En effet, le regard demeure, il est notre premier outil de communication. Lorsque les mots ne sont plus possibles ou inadaptés, le regard permet encore de dire quelque chose. Pour cela, le regard doit fixer le visage de la personne, s’y accrocher, s’y arrêter et non pas fuir. Ce sont ces principes que met en avant l’humanitude.
•Le toucher est encore une forme de communication, même si elle demeure plus restreinte que les deux précédentes. On peut néanmoins distinguer dans les soins deux types de toucher : le toucher au service de la technique et une seconde forme est davantage une forme de sollicitude, une manière d’entrer en contact. Dans les soins ce toucher apporte réconfort et favorise l’estime de soi chez le malade.
C'est dans le respect de cette pratique que je me suis placée à hauteur de M. C. lorsque je me suis présentée à lui. Il était important que nos regard se croisent pour faire connaissance. Je me suis appliquée à le regarder dans les yeux à chaque fois
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