Le régime présidentiel américain
Par Orhan • 18 Janvier 2018 • 3 938 Mots (16 Pages) • 421 Vues
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2. Un exécutif aux pouvoirs limités
Le pouvoir exécutif est d'abord lié à un rôle du président très légitime. En effet, la Constitution attribue au Président la direction du pouvoir exécutif. La nature de sa légitimité de chef de l'exécutif est donc claire et incontestable. On se trouve ici dans une situation très différente de celle de la France, où la Constitution ne donne en aucun cas au Président le pouvoir de diriger l'exécutif, le pouvoir de diriger l'action du Gouvernement étant attribué au Premier Ministre. De plus, le Président est élu au suffrage universel quasi-direct. Cette procédure est un peu complexe, car les candidats sont choisis par les partis dans le cadre d'élections primaires, puis le peuple élit grand électeurs qui par la suite, vont devoir élire le Président, conformément à leur mandat impératif. Du fait de ce mandat, cette élection indirecte du Président est en fait une élection quasi-directe. Tout se passe presque toujours comme si le Président était élu directement par les citoyens. Il n'y a eu que trois cas dans l'histoire constitutionnelle américaine, dans lesquels le candidat élu n'a pas été celui du parti qui avait recueilli le plus grand nombre de voix des citoyens : en 1876, en 1888 et en 2000.
Le chef de l'exécutif est également détenteur de pouvoirs étendus mais limités. En effet, il dirige l'exécutif et intervient dans la fonction législative. La Constitution américaine fait du Président le chef incontesté de l'exécutif, du fait de son caractère monocéphal (pas de Premier Ministre). Il est aussi accompagné par un vice-président, élu en même temps que le Président et de la même manière. Il est là essentiellement pour assurer la continuité de l'Etat en prenant la place du Président au cas où celui-ci décéderait ou serait hors d'état de remplir ses fonctions. Selon la Constitution, il n'a aucun pouvoir exécutif. Ce dernier n'est pas collégial non plus. En effet, contrairement à ce que l'on observe en régime parlementaire, il n'existe pas de Gouvernement entendu comme un collège chargé de diriger la politique nationale. Le Président choisit et révoque librement et individuellement les secrétaires d'Etat, sous réserve de l'accord du Sénat. Chacun d'eux dirige un département, un peu comme les ministres, mais ils ne forment pas un collège et chacun est placé directement sous la direction du Président. Il dispose également de nombreux pouvoirs, comme en matière réglementaire, même si le pouvoir réglementaire du Président américain est très inférieur à celui du Premier Ministre français. En matière de diplomatie, il a des pouvoirs très importants : il est le chef des armées, il négocie les traités et nomme les ambassadeurs. Néanmoins, il faut bien voir que le Congrès vote le budget militaire et doit approuver l'entrée, ce qui limite les pouvoirs présidentiels. Par ailleurs, le Président participe au pouvoir législatif. En effet, même s'il n'a pas l'initiative des lois, le Président des Etats-Unis peut influencer les membres du Congrès en leur indiquant le type de législation qui lui semble adéquat, notamment dans les médias ou dans le "Discours sur l'Etat de l'Union", prononcé une fois par an par le Président (contrairement aux messages du Président français qui peuvent avoir lieu n'importe quand). Surtout l'arme majeure du Président est le droit de véto sur les lois et correspond à une faculté de statuer pour Montesquieu. Ce véto est suspensif, puisqu'il peut être surmonté par les membres du Congrès par un contre-véto, mais seulement à une majorité des deux-tiers dans chaque assemblée, ce qui est très difficile à rassembler. Le président peut aussi utiliser son pocket véto qui consiste à ne pas promulguer la loi en fin de session, de sorte que toute la procédure devra être reprise à la session suivante. Le droit de véto contraint donc les parlementaires au compromis. Ainsi, conçu pour être faible, le Président des Etats-Unis est devenu très important, notamment du fait de plusieurs facteurs.
Cette importance du rôle du Président est aussi lié à sa relative responsabilité. En effet, dans le régime présidentiel des Etats-Unis, le Président n'est pas révocable pour de simples motifs politiques, c'est pourquoi il n'est pas vraiment politiquement responsable. Cependant, les citoyens peuvent soutenir ou combattre sa politique souvent, tous les deux ans, grâce aux élections législatives (Chambre des Représentants) de mi-mandat, aussi appelées les mid-term elections. Les citoyens peuvent alors choisir d'élire une majorité du même bord politique que le Président afin de le soutenir ou au contraire, une majorité qui lui serait hostile pour freiner son élection. En outre, sa responsabilité peut surtout être mise en jeu par la procédure de l'impeachment, même si ce n'est pas une véritable responsabilité politique. Cette responsabilité est essentiellement pénale et est difficile à être mise en place. Aux termes de l'article 2 de la section 4 de la Constitution, il s'agit d'une sanction applicable en cas de "trahison, corruption ou autre crime ou délit grave", qui peut être énoncée par le législatif à l'encontre du Président ou d'un membre de la haute administration, de juges fédéraux et même d'un membre de la Cour Suprême. Cette procédure n'a jamais abouti à la destitution d'un Président, cependant dans trois cas (Johnson, Nixon et Clinton), il s'en est fallu de peu et dans l'un des cas (Nixon), le Président a démissioné par crainte d'une condamnation.
3. Un gouvernement des juges
Les Etats-Unis disposent d'un pouvoir juridictionnel tellement puissant et influent, que l'on en arrive à parler de "gouvernement des juges", comme selon l'expression d'Edouard Lambert. Le pouvoir judiciaire est attribué à tous les juges américains et plus particulièrement à la Cour Suprême des Etats-Unis, qui repose au sommet de l'ordre juridique fédéral. En effet, chaque Etat dispose de son propre ordre juridique et son ordre juridictions. Au niveau des Etats, les juges sont élus. Au contraire, au niveau fédéral, les membres de la Cour Suprême sont nommés par le Président avec l'approbation du Sénat. Ce contrôle très médiatisé des nominations conduit le Président à choisir des juristes éminents. Ces derniers bénéficient d'une grande indépendance, puisqu'ils sont nommés à vie et qu'ils sont irrévocables
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