Histoire des institutions publiques du 13e siècle à la convention nationale
Par Christopher • 22 Mai 2018 • 24 233 Mots (97 Pages) • 665 Vues
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Au cours de ces 3 siècles qui forment la fin du Moyen Age, va se dessiner une nouvelle vision de la puissance royale qui va préfigurer l’Etat. L’Etat est une donnée institutionnelle abstraite qui emporte pour conséquence l’idée que le gouvernant (le roi) n’est pas à la tête d’un patrimoine mais qu’il est le dépositaire passager d’une puissance permanente qui agit au nom de l’intérêt de tous. C’est à ce titre que l’on peut considérer le fondement et le but de sa prérogative. Cet Etat royal qui est en construction va être le fruit d’un effort intellectuel opéré par les légistes du roi. Ces derniers vont élaborer un droit spécial au profit de l’action du royaume contre les pouvoirs autonomes des seigneurs et des villes. Ce droit royal a pour mission de faire triompher les idées de bien commun et d’intérêt général.
A la tête de cette future pyramide institutionnelle, le roi incarne l’Etat mais le roi ne saurait se confondre avec l’Etat. Le roi doit simplement en assurer la direction, veillé au bon fonctionnement des services chargés de sa gestion. Le roi est donc la clé de voute de l’édifice : il va concentrer l’essentiel des prérogatives pour s’emparer des destinés de la communauté. Pour ces raisons, la personne du roi est nécessaire et placé à la tête de ce grand corps qu’est le royaume, le roi doit assumer des qualités supérieures, des qualités morales pour guider le peuple vers le Salut et le bonheur.
Quelles étaient ces qualités du roi ?
Section 1 : « Les deux corps du roi »
C’est une expression reprise par Kantorowicz qui dit que la haute mission assurée par le roi ne meurt pas et est accomplit par des qualités surnaturelles qui dépassent le corps physiques du roi quand il meurt : si le roi meurt l’Etat ne meurt pas donc pour le gérer il faut des qualités immortelles qui se transmettent de roi en roi. Il y a donc un corps physique et un corps surnaturel du roi qui se transmet dans la dynastie. Exemple : Louis 14 a fait une distinction entre son corps et son pouvoir
I- Le charisme du roi
Ce caractère charismatique repose sur des vertus morales héritées de la conformité de la personne du roi aux écritures saintes de la bible. Ce caractère vertueux découle aussi de sa capacité à épouser l’idéal chevaleresque, le courage, la justice, la fidélité. Enfin, ce caractère charismatique se construit par rapport à la conformité du roi aux exigences de bonnes gouvernances.
A/ Un roi très chrétien
Le roi est un modèle pour la communauté publique et la doctrine des 13e et 14e siècles insistent sur l’importance des qualités morales et religieuses des rois. Au 13e siècle la figure du roi saint est celle de Saint Louis car il s’efforce de participer à l’œuvre rédemptrice du christ qui consiste à préparer les hommes au Salut et la mission première du roi est de punir les méchants, protéger les faibles, les bons et l’Eglise. Lors du jugement dernier, le Christ pèse les qualités morales et donnent aux bons le paradis et aux méchants l’enfer. Ce modèle d’un comportement religieux, vertueux est transmis au roi par les hommes d’Eglise qui se chargent de leur éducation. Ces hommes d’Eglise cherchent à inculquer au roi la maxime suivante : « régir les autres c’est d’abord se régir soi même ». Le roi doit donc assurer la paix et la justice, se montrer juste et bon et incarner l’idéal d’un souverain très chrétien de sorte que le roi de France est séparé des autres hommes et que cette mission d’assurer la paix et la justice est digne d’une véritable religion royale qui va se manifester au travers de cérémonie telle que le sacre, les funérailles ou les entrées dans les bonnes villes du royaume. Ce portrait du roi idéal va évoluer au 14e siècle en s’enrichissant de nouvelles inspirations qui ne proviendront plus exclusivement des références bibliques.
B/Un roi sage
14e siècle et 15e siècle : éléments nouveaux dans la théorie politique du pouvoir royal. Introduction de nouvelles lectures par les légistes du roi : philosophie politique d’Aristote. Les rois commencent donc à lire autre chose que la bible : L’Ethique, Nicomaque et les Politiques d’Aristote ou encore les œuvres de Platon telle que la République. Cette philosophie politique contribue à la promotion de nouvelles exigences quant à la bonne gouvernance du royaume. Le roi ne doit plus uniquement lire des livres de moral mais aussi connaitre les grandes chroniques de l’histoire de France et l’histoire romaine. Ce roi qui étudie fait l’acquisition d’un savoir pratique, qui lui permet de choisir la meilleure voie pour atteindre ses fins. Désormais au 14e siècle la maxime ne suffit plus car le roi doit faire preuve de diplomatie, de stratégie, de subtilité. Il a aussi besoin de s’entourer d’un savoir expert, de s’entourer de conseillers qui lui permettent d’acquérir une conduite prudente, sage à l’image de ce que préconisait Aristote.
Ce modèle de vertu politique s’accompagne d’une diversification des missions du roi : le roi ne doit plus seulement garantir la paix et la justice, il doit assumer de nouvelles misions qui sont liées notamment à la vie économique et aux situations d’urgence telle que la guerre. Le roi doit garantir la « vie bonne ». Cette dernière facilitait le développement des échanges (des nouvelles routes sûres, infrastructures, nouveaux ports, services de postes…), la prospérité économique et assurer le bien être matériel de la population. Le changement est considérable puisque la mission du roi ne correspond plus à celle d’une société en attente d’un Salut éternel. Désormais, cette mission s’étend au domaine de l’économie, de la monnaie et de l’assistance. Ce nouveau modèle de la politique est aussi adossé aux cérémonies du sacre et des funérailles qui permettent de révéler le caractère charismatique du pouvoir royal.
II- Le sacre et les funérailles du roi : manifestation de la puissance et du faste de la royauté
Cette vision d’un roi chrétien, sage s’exprime par deux cérémonies qui le mettent en scène quand il entre dans la vie politique et quand il la quitte. A partir du 14e et 15e siècle les sacres et funérailles deviennent un extraordinaire moyen de promotion et de propagande aux bénéfices de l’institution royale.
A/Le sacre
Au 14e siècle le sacre va perdre de sa valeur juridique
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