Commentaire du discours de Charles de Gaulle à Bayeux
Par Orhan • 14 Septembre 2018 • 2 290 Mots (10 Pages) • 648 Vues
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A - La crainte d’un retour vers un régime d’assemblée.
Dans ce discours, De Gaulle exprime une forte volonté de ne pas commettre les mêmes erreurs que dans le passé, décidant ainsi de changer de mode de fonctionnement. Il exprime tout d’abord sa propre vision de l’Etat, un « Etat légitime », qui reposerait sur « l’intérêt et le sentiment de la Nation ». Il met également en avant l’importance d’un Etat libre, un état « sauvegardé dans ses droits », et veut ainsi rétablir la liberté des citoyens français. Il basera par la suite beaucoup de ses propos sur une certaine unité, une « unité nationale » et une « unité impériale » et insistera alors sur le rôle de cet Etat, qui doit réunir, en vue de « rétablir l’Union Française ». C’est par cette vision de l’Etat que De Gaulle va chercher à établir une « reconstruction », préservant l’ordre public, et effaçant l’amère sentiment ressortant de la IIIème et IVème République.
De Gaulle se pose ici comme l’incarnation de la Résistance, et porte lors de ce discours une vision plutôt dualiste et aristocratique de la société, nommant avec cette « élite » qui va se « dévouer au combat pour la libération, la grandeur et la rénovation de la France ». Une élite qui va croire « en la victoire et en l’avenir de la partie » entrainant alors derrière elle « tout l’Empire et toute la France ». Une élite, actrice de la libération, qui ne pourrait se faire « sans l’assentiment de l’immense masse française ». Le moteur de cette « masse » fut marqué par une grande « volonté » qui reste néanmoins « instinctive », c’est à dire non réfléchi, s’accordant plus à l’animal qu’à l’homme qui lui, fait preuve de réflexion.
Par ailleurs, le « sage Solon » retrouvé à la fin de ce discours, ayant pour fonction de légitimer et de clore le discours de De Gaulle, est le premier réformateur d’Athènes. C’est en effet celui qui a permis d’aboutir à la démocratie Athénienne. Cette référence culturelle au fondateur mythique de la démocratie appelle à une sagesse qui connote une négativité, une insuffisance du peuple, stigmatisé ici par De Gaulle comme étant « une masse ».
De Gaulle insistera par la suite sur l’importance de donner à la nation des institutions, et élaborera ainsi un projet institutionnel argumenté autour d’une seconde chambre.
B - Un projet institutionnel : un bicaméralisme nécessaire quant à l’exécution du pouvoir législatif.
Lors de ce discours, De Gaulle reposera sa vision sur l’idée que « les pouvoirs publics ne valent… que s’ils s’accordent avec l’intérêt supérieur du pays, s’ils reposent sur l’adhésion confiante des citoyens ». Une adhésion qui doit être également nécessaire en matière d’institutions, car « bâtir » ces institutions sur « autre chose », « ce serait bâtir sur du sable ».En cas de crises majeurs, De Gaulle insiste sur le non respect de l’adhésion confiante des citoyens en matière institutionnelle, qui serait synonyme d’un effondrement : « risquer de voir l’édifice crouler une fois de plus », en rappel des Républiques passées.
Une fois cette « unité nationale maintenue », est alors selon lui « urgente et essentielle » la création, « l’établissement des nouvelles institutions françaises ».
C’est dans ce contexte particulier, d’une France sensible, qui « fut envahie sept fois et a pratiqué treize régimes » que De Gaulle viendra pointer l’un des problèmes majeurs de ces régimes : la division. Cette propension aux divisions est incarnée selon lui par les partis, « une rivalité des partis », où « s’estompent souvent les intérêts supérieurs du pays ». Une unité est donc nécessaire.
Se fermante dans les propos de De Gaulle une nouvelle Constitution que la « Nation et l’unité française attendent », qui se basera sur l’approbation populaire. L’avis du peuple est ici très important, permettant notamment de ne pas céder à la menace de la dictature.
De Gaulle viendra par la suite mettre en place un projet institutionnel, à l’aide d’une deuxième chambre, autre que l’Assemblée Nationale. Le pouvoir législatif ici incarné par le Parlement, mettra tout d’abord en évidence la première chambre : l’assemblée nationale. Celle-ci, « élue au suffrage universel et direct », a pour disposition « le vote définitif des lois et des budgets ». Le « mouvement » identifié par la suite, « d’une telle Assemblée » et qui « ne comporte pas nécessairement une clairvoyance et une sérénité entières » fait référence à la mouvance des partis et des alliances : fruit de la mouvance du vote de la
masse. Nous retrouvons ici en ces allégations une critique indirect du suffrage universel avec ce vote de la «masse» ainsi qu’une critique direct de la capacité de
la représentation nationale à agir pour la nation. Afin de canaliser les passions populaire, une deuxième assemblée doit siéger.
De Gaulle tient un attachement particulier au bicaméralisme. La seconde Chambre a ici un rôle de réflexion et d’amélioration de la législation. Sa composition doit l’ouvrir à des représentants des organisations économiques, familiales et intellectuelles, la rapprochant ainsi d’une Chambre corporative.
Une seconde chambre ici élue au suffrage universel indirect où les « Conseils généraux et municipaux éliront les membres.». Cette chambre ainsi «d’ordre administratif », ayant pour fonction « d’examiner publiquement ce que le premier a pris en considération » ainsi que « de formuler des amendements » et « de proposer des projets ». De Gaulle veut également introduire de nouveaux « représentants », et « organisations économiques, familiales, intellectuelles » pour que toutes les « voix des grandes activités du pays » se fassent entendre. Les membres de cette Assemblée formeront ainsi ce « Conseil de l’Union française », qui est ici qualifié pour « délibérer des lois et des problèmes intéressant l’Union », mais également en matière de « budget, de relations extérieures, de rapports intérieurs, de défense nationale, économique » ou encore de « communication ».
Un projet institutionnel donc prônant ici le bicamérisme, avec deux chambres s’aidant l’une et l’autre, permettant ainsi une certaine cohésion du Parlement.
Mais au-delà de ce pouvoir législatif important, se trouve une séparation des pouvoirs bien distincte, avec un pouvoir exécutif renforcé,
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