Commentaire d’arrêt du 28 février 1996, 2ème chambre civile.
Par Christopher • 23 Mai 2018 • 1 385 Mots (6 Pages) • 1 374 Vues
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Or ici, la Cour de cassation vient rappeler que le comportement de la jeune Sonia constituait évidemment une faute, faute ayant encouru à la réalisation du dommage (« qu’en statuant par de tels motifs, alors qu’un comportement constituait une faute ayant encouru à la réalisation du dommage, la cour d’appel a violé le texte susvisé »), et donc souligne que celle-ci doit être reconnu comme fautive aux termes de l’article 1382.
En effet, pour la Cour d’appel, l’article 1382 ne peut s’appliquer à un enfant manquant de discernement. Ce qui n’est pas le cas pour la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation. En effet, la Cour de Cassation se réfère aux termes exacts de l’article, sachant que quiconque cause un dommage à autrui doit le réparer, ici l’enfant causant lui-même son propre dommage, qu’il soit enfant ne change donc pas l’interprétation de la loi. D’où la raison qu’à la suite du visa, la Cour rappelle que «la faute d’un mineur peut être retenue à son encontre même s’il n’est pas capable de discerner les conséquences de son acte ».
Le fait d’accepter que l’enfant, victime et fautif ici, soit responsable de ses actes permettrait donc, en l’espèce, d’éviter la pleine responsabilité de l’adulte présent sur les lieux.
- Un arrêt confirmatif de ceux de 1984
Cet arrêt montre une application stricte de la responsabilité du mineur (A) mais aussi que l’on peut la mettre en lien avec une autre responsabilité (B)
- Une application objective de l’article 414-3 du code civil
La consécration de la possible responsabilité de l’enfant mineur, l’infans, trouve avec le temps de nouvelles applications. En effet, en plus de pouvoir imputer la faute à l’infans, la jurisprudence montre que désormais, la faute d’un infans peut être exonératoire. En effet, par un arrêt dit Lemaire du 9 mai 1984, la Cour de Cassation (Assemblée plénière) retient qu’un ouvrier ayant commis une faute d’installation est partiellement exonéré quant à l’électrocution d’un enfant cherchant à changer une ampoule. Toujours selon la Cour, l’enfant de treize ans aurait dû couper le courant, ce qui révèle une imprudence de sa part, et justifie donc l’exonération de la responsabilité de l’électricien.
De même, l’arrêt Gabillet, toujours le 9 mai 1984, retient la responsabilité d’un enfant de trois ans, qui, en tombant d’une balançoire avait blessé un camarade avec un bâton qu’il tenait et dont il a été déclaré gardien. La Cour précisant en l’espèce que les juges du fond n’avait pas « malgré le jeune âge de ce mineur, à rechercher si celui-ci avait un discernement ».
Ici, dans l’arrêt du 28 février 1996, la Cour d’appel retient la faute exclusive de l’adulte chargé de la surveillance de l’enfant, mais la Cour de cassation estime que l’enfant même mineur, est purement responsable de ces actes, et donc l’entière responsabilité de l’adulte, surveillant les enfants, ne peut être engagée.
En retenant la responsabilité de l’infans de plus en plus fréquemment, la jurisprudence en arrive à probablement faire triompher, ce que certains auteurs appellent, la théorie de la responsabilité objective.
- Une responsabilité en lien avec celle des parents
Cet arrêt du 28 février 1996 se trouve donc en adéquation avec la théorie de la responsabilité objective, tout comme la jurisprudence contemporaine en la matière. Il est nécessaire pour la justice de faire réparer un dommage causé par autrui, que ce dommage soit réparer par l’auteur (même manquant de discernement) ou par le chef, surveillant, ou parent responsable, de l’auteur ; cela importe peu du côté de la victime. Seulement, dans un but d’équité et de justice, il apparait plus convenable de laisser triompher la théorie objective de la responsabilité. Chaque auteur de faute, quel qu’il soit, réparera le préjudice commis. De plus, avec la généralisation des assurances en responsabilité civile, que ce soit l’enfant ou le parent qui répare le préjudice, c’est l’assurance qui en épongera la créance.
On peut aussi mettre en lien cet arrêt avec la responsabilité du fait d’autrui et notamment celle des parents du fait de leurs enfants fondée sur l’article 1242 al 4 (anciennement 1384 al 4). De plus, si on suit cette responsabilité du fait d’autrui, un an après l’arrêt à commenter de 1996, un arrêt de 1997 Bertrand, instaurera une responsabilité de plein droit des parents pouvant s’exonérer de leur responsabilité en montrant la faute de leur enfant, ce qui est un grand bouleversement jurisprudentiel.
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