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CE, 3 mars 2010, GlG

Par   •  3 Octobre 2018  •  3 230 Mots (13 Pages)  •  350 Vues

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Cette solution s’inscrit dans la problématique plus générale de la caractérisation dans les contrats administratifs de la force majeure par le juge administratif. A travers cet arrêt ce dernier vient à la fois rappeler les conditions d’invocation en droit de la force majeure (I) et, en fait, contrôler l’inopérance de celle ci dans le contrat d’espèce (II).

I ) Le contrôle stricte des règles relatives à l’invocation de la force majeure par le juge administratif

Comme dit précédemment, le partenaire contractuel privé de l’administration peut invoquer un cas de force majeure pour s’exonérer partiellement ou totalement de ses obligations. Néanmoins il faudra rechercher si le contrat liant les parties induit bien la compétence du juge administratif (a). Ce dernier devra ensuite venir contrôler, malgré les stipulations contractuelles, si les caractères de la force majeure ont été correctement caractérisés par les juges du fond (b).

a ) La cession des droits d'exploitation d'un concert : un marché public de service

Avant même de savoir si la force majeure est oui ou non caractérisée, il faut s’interroger sur la juridiction compétente pour connaitre du litige découlant de l’espèce. C’est en substance le premier moyen que développe la société TS3 lors de son appel devant la cour administrative d’appel de Versailles. C’est aussi la première question à laquelle répondra le Conseil d’Etat en tant que juge d’appel. Le contrat de cession des droits d'exploitation d'un concert d’un chanteur la liant à la commune est il un contrat de type administratif, induisant la compétence du juge administratif ? Il serait tentant de le qualifier comme tel à priori, puisque que la commune, l’Administration, est une partie directe au contrat. Il faut aussi rappeler qu’en France existe un service public culturel, notamment consacré par les arrêts Astruc de 1916 du Conseil d’Etat, et Léoni de 1944 de la même juridiction, sur les théâtres municipaux. Toutefois une activité culturelle n'est un service public qu'à condition que la personne publique exerce une tutelle directe ou indirecte sur celle-ci. Ainsi le Conseil d'Etat avait par exemple dénié dans un arrêt Société UGC Ciné-Cité de 2007, la qualification de service public à une exploitation de salles de cinéma par une société d'économie mixte au motif que « la commune n'avait imposé aucune obligation particulière à l'exploitant ni mis en place un moyen de contrôle des objectifs fixés ».

Dans le cas d’espèce, le conseil d’Etat, jugeant l'affaire au fond, vient reconnaitre la qualité de contrat de marché public de services au sens de l’article 1-I du Code des marchés publics. Selon cet article, "les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs et des opérateurs économiques publics ou privés pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services sont des marchés publics soumis aux dispositions de ce code".

Pour la haute juridiction, au vu du dossier il ressortait que la convention confiant à la société l’organisation du concert, rentrait dans le champ d'application du code des marchés publics en son article premier. Il en résulte, en application du premier alinéa de l'article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, que ce contrat présente un caractère administratif dont le contentieux relève, ainsi que l'avait jugé à bon droit le tribunal administratif, de la compétence du juge administratif.

Une telle solution pourrait paraitre inhérent au cas d’espèce, or en reconnaissant la cession des droits d'exploitation d'un concert comme un marché public de service, le Conseil d’Etat vient poser un modèle jurisprudentiel qu’il reprendra par exemple dans un arrêt Commune de Six- Fours-les-Plages du 23 mai 2011 (« la convention confiant à une société privée l'organisation d'un festival de musique est ... un marché public de service »).

b ) La force majeure comme potentielle motif de résiliation d’un contrat administratif de plein droit

Concept essentiellement civiliste, la force majeure trouve toutefois à s’appliquer, si elle est caractérisée, dans les contrats administratifs. Comme dit précédemment, elle permet au partenaire contractuel de l’administration (privé en l’occurrence) de ne pas exécuter tout ou partie de son engagement en invoquant des faits qui l’ont mis dans l’impossibilité de remplir celui-ci. La force majeure répond toutefois à des critères jurisprudentiels strictes. Elle doit être extérieure à la volonté des parties, imprévisible lors de la formation du contrat, et irrésistible dans ses effets. Si ces critères ont tendance à fluctuer dans leur portée devant la Cour de Cassation, il n’en reste pas moins qu’ils sont cumulatifs et que les juges viendront s’assurer de leur présence lors d’un litige. Néanmoins si l’utilisation de la force majeure est admise en droit administratif, se pose alors la question de son évincement par des stipulations contractuelles. En l’espèce, le contrat conclu entre l’administration et la société prévoyait qu’ « aux termes du A de l’article XI le présent contrat se trouverait suspendu, résolu ou résilié de plein droit et sans indemnité d’aucune sorte en cas d’accidents indépendants des parties reconnus de force majeure nécessitant la fermeture de la plupart des salles de spectacles tels que : calamités publiques, guerre, (...) maladie dûment constatée d’un artiste et tout autre cas de force majeure ; ». Le mécanisme par lequel les co- contractants avaient prévu certains cas de force majeure dispensait il le juge de venir s’assurer de la caractérisation de celle-ci ? Non, la haute juridiction vient rappeler que même si le contrat a entendu « illustrer certains cas de force majeure » cela ne fait pas « pour autant obstacle à l’application des critères caractérisant l’événement ». Après avoir écarté la stipulation contractuelle litigieuse, la haute juridiction va selon sa mission première contrôler le droit. En l’espèce elle recherche si pour refuser à la commune tout droit à indemnité du fait de la résiliation, la cour administrative d’appel de Versailles est bien venue caractériser le cas de force majeure selon ses trois critères. Or, selon le Conseil d’Etat, la cour d’appel a erré en jugeant que « l’état de santé de l’artiste relevait du cas d’une maladie dûment constatée, au sens de ces stipulations » et qu’il « était constitutif

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