CE 2000 Mlle marteaux
Par Christopher • 2 Avril 2018 • 3 423 Mots (14 Pages) • 579 Vues
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Phrase de transition : Après avoir énoncé au TA la façon d’entreprendre la combinaison entre liberté de conscience et principe de laïcité, le CE rappel la protection pour les agents publics qu’apporte le principe de liberté de conscience.
B- La liberté de conscience : un principe protecteur des agents publics
« Si les agents du service de l’enseignement public bénéficient comme tous les autres agents publics de la liberté de
conscience qui interdit toute discrimination dans l’accès aux fonctions comme dans le déroulement de la carrière qui serait fondée sur leur religion (…) »
Explication : Ce fondement républicain que constitue la liberté de conscience a dès le début fondé la jurisprudence du CE, annulant des décisions administratives prises en raison des opinions publiques des administrés (CE, 1905, Sieur Lespinasse). Dans la période moderne, le CE a solennellement rappelé que l'Administration ne peut se fonder exclusivement sur les opinions politiques d'une personne pour l'écarter de fonctions publiques (CE, 1954, Barel). Les seules opinions politiques d'une personne ne peuvent fonder en soi une décision administrative (CE, 1954, Guille). En effet, l'agent public est libre de ses opinions et croyances, libre de les manifester mais hors du service (CE, 1962, Ministre des Armées c/ Hocdé). De la même façon, qu’il ne peut être reproché ses opinions politiques à un agents public, il ne peut être reproché à un agent public ses convictions religieuses (CE,1938, Demoiselle Weiss). Ainsi une jurisprudence assez fournie témoigne du souci du juge administratif de tracer une ligne claire entre la légitime interdiction de toute expression religieuse dans le cadre des fonctions et la discrimination que constitue la prise en compte d'opinions ou de croyances qui ne se manifestent qu'en dehors du service. Dans une affaire Dlle Jamet (CE, 1950), l'administration avait refusé de titulariser l'intéressée au seul motif de ses croyances religieuses. Etait notamment en cause la fréquentation, à ses heures de loisir, d'un groupement de caractère confessionnel. Après avoir relevé que la requérante n'avait jamais manqué, dans l'exercice de ses fonctions, au devoir de neutralité, le Conseil d'Etat a censuré la décision attaquée pour erreur de droit. De même, le Conseil d'Etat a-t-il annulé une sanction disciplinaire fondée sur le seul fait qu'une institutrice stagiaire avait invité, « par une lettre privée », un élève-maître de l'Ecole normale d'instituteurs à assister, pendant ses vacances, à des conférences dont certaines présentaient un caractère religieux. S'agissant d'une activité purement privée, ces faits n'étaient pas de nature à justifier les sanctions prononcées (CE, 1938, Dlle Weiss).
Analyse critique : A travers ce bout de phrase, la Haute juridiction de l’ordre administratif rappelle qu’elle veille sérieusement au respect de la règle de laïcité telle qu’elle l’entend, c’est-à-dire non au sens de l’exclusion des cadres des croyants, mais au sens de la séparation de la vie privée et de la fonction publique (CE, 1950, Jamet). Sa portée est générale sauf si la loi en a disposé autrement. Ainsi, est exclue la possibilité pour l’autorité administrative de fonder une décision sur des motifs confessionnels, c’est d’ailleurs le sens de l’article 31 de la loi du 31 décembre 1905. Dès, lors, en l’absence de raisons de service, de contestation portant sur l’aptitude professionnelle et le zèle des intéressés ainsi que du manquement au devoir de neutralité qui s’impose à tous fonctionnaires, l’autorité administrative ne saurait exciper de la circonstance qu’ils ont fait leurs études dans l’enseignement privé (CE, 1954, Jaminet), qu’ils fréquentent un groupe confessionnel (CE, 1950, Jamet), ou de leur croyance religieuse, pour les exclure des emplois publics (CE, 1948, Connet). ). En ce sens, la liberté de conscience protège les agents publics contre des décisions arbitraires de l’Administration qui seraient fondées sur des motifs illégitimes. Récemment le Conseil d’Etat a annulé la délibération d’un jury de concours ayant posé à un candidat des questions qui inspirées de son origine sont donc prohibées par la loi (CE, 2009, M. El Haddioui). Dans la sphère privée l’agent public a, en effet, comme tous citoyens, droit d’avoir ses propres opinions ou croyances sans pour autant craindre que ces dernières ne soient une raison valable pour l’Administration de l’écarter d’une quelconque fonction.
Phrase de transition : Si la liberté de conscience de l’agent public est absolue dans sa sphère privée, ceci diffère au sein du service public. Assurément la liberté de conscience se trouve limitée par l’obligation de neutralité dont il doit faire preuve. A ce titre, les termes retenus dans l'avis du 3 mai 2000 rappellent que ce ne sont jamais les opinions religieuses d'un agent ou d'un candidat à une fonction publique qui sont incompatibles avec la neutralité du service, mais leur manifestation.
II- Une liberté de conscience limitée par l’obligation de neutralité des agents du service public de l’enseignement
L’obligation de neutralité corolaire du principe d’égalité, entraîne l’interdiction pour l’agent de manifester ses croyances religieuses dans le cadre du service public de l’enseignement (A) peu importe la nature des fonctions qu’il exerce (B).
A- L’interdiction pour l’agent de manifester ses croyances religieuses dans le cadre du service public de l’enseignement
« Si les agents du service de l’enseignement public bénéficient comme tous les autres agents publics de la liberté de
conscience (…) le principe de laïcité fait obstacle à ce qu’ils disposent, dans le cadre du service public, du droit de manifester leurs croyances religieuses (…) il (en) résulte que le fait pour un agent du service public de manifester dans ses fonctions ses croyances religieuses (…) constitue un manquement à ses obligations. »
Explication : Il n'est pas étonnant que le JA ait été amené à trancher cette question d'abord en ce qui concerne le service de l'enseignement public. Jean-Paul Costa relevait ainsi que « depuis les premières lois républicaines sur l'enseignement public, le problème de la laïcité du personnel enseignant a été un objet de vifs débats » (CE, Avis, 1972). C'est
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