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Le système d'Harvard et sa remise en cause

Par   •  25 Décembre 2017  •  3 551 Mots (15 Pages)  •  695 Vues

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- L’école de Chicago, une redéfinition des conséquences de la concurrence dans un objectif ultra-libéral

Les bases de la politique de la concurrence structuraliste reposant sur des fondamentaux de microéconomie, et notamment d’économie industrielle, les économistes de Chicago ne peuvent les rejeter complètement au motif qu’ils préconisent comme solution une intervention étatique pour réguler la concurrence. C’est pourquoi ils vont porter leurs recherches sur les bases de la thèse structuraliste, révélant toute une série de faiblesses qui leur permettront de rejeter ensuite la « solution » comme étant inadéquate au problème, les termes de celui-ci ayant changé. La première critique apportée par les économistes de Chicago porte sur l’analyse de la situation d’oligopole : s’appuyant sur les thèses déjà anciennes de l’économiste Joseph Bertrand, ils rappellent que la situation d’oligopole appréhendée en termes de prix conduit à un tout autre résultat que si l’on choisit les quantités, comme Cournot, Nash et les structuralistes. En effet, dans ce qui constitue le « paradoxe de Bertrand », on observe une transition à moyen-terme de l’oligopole vers un modèle « efficace » prix=coût marginal par la guerre des prix qui s’exercent entre les entreprises pour obtenir des parts de marché supplémentaire : conclusion des Chicagoans, aucune nécessité de réglementer l’oligopole, qui va vraisemblablement se régler tout seul par le marché de la meilleure manière. Les critiques portent également sur la manière dont sont analysées les conséquences des différentes structures concurrentielles, notamment par rapport à la question des barrières à l’entrée. Ainsi pour les néo-classiques de Chicago, le fait que l’absence de concurrence sur un marché réduise le surplus du consommateur n’est pas nécessairement un problème, dans la mesure où cette baisse de l’efficience dite « allocative » est compensée par une efficience productive plus grande grâce à la taille critique (c’est-à-dire les économies d’échelles), qui permet donc un meilleur prix de vente. Cela les amène jusqu’à justifier le monopole naturel (qui, ironiquement, correspondait à l’époque souvent à un monopole étatique) dans la mesure où, face à des activités à économies d’échelle très importantes, il offre le meilleur rapport usage de ressources/production. Les économistes de Chicago considèrent que la situation de concurrence résulte souvent de l’activité économique, qui a permis par la différenciation et l’innovation une « sélection naturelle » des entreprises : dès lors de quel droit priver ces entreprises de leur bénéfice durement acquis ? Elles n’ont pas intérêt à relâcher leurs efforts, comme l’affirme Lebenstein, car c’est la condition de la pérennité leur position dominante. La remise en cause de l’école de Harvard passe donc dans un 1er temps par la contestation des bases microéconomiques qui semblent expliciter l’utilité d’une régulation pour corriger les biais du marché en vue de son efficacité et du bien-être : l’école de Chicago tente point par point d’analyser les mécanismes de marché qui pourraient corriger seuls les déséquilibres. De ces fondements microéconomiques sont nés deux visions opposées de la politique concurrentielle, qui s’attachent cependant chacune à démontrer

II) Une confrontation paradigmatique

La microéconomie établit donc un lien entre structure des marchés et pouvoir de marché c’est-à-dire les profits et performances. L’analyse structuraliste complète cette relation en introduisant les comportements des firmes. Cependant la contradiction de l’Ecole de Chicago et les concepts de contestabilité et d’efficience remettent en cause l’analyse harvardienne.

- Le Modèle SCP – de la Structure aux Comportements.

Le modèle structuraliste SCP (Structure – Comportement – Performance) préconisé par Harvard est issu des travaux fondamentaux de Joe S. Bain (Barriers to New Competition, 1956), qui visent à compléter ceux de Clark à propos des conditions d’une concurrence praticable (workable competition). L’idée est que plus un marché est concentré, plus les profits sont importants, parce que les firmes peuvent mettre plus facilement en place des comportements limitant la concurrence, tel que les ententes.

Les structures de marché concentrées favorisent les comportements anticoncurrentiels, qui engendrent des performances importantes. Ces comportements visent à créer ou accentuer des barrières à l’entrée. Ces critères consistent à permettre à la politique anti-trust d’apprécier la praticabilité de la concurrence et non son degré de perfection, par rapport au modèle de concurrence pur de référence. Bain recense les pratiques d’exclusion des entreprises destinées à leur permettre de s’affranchir des contrainte du jeu concurrentiel praticable : ces contraintes seraient les « barrières à l’entrée », c’est-à-dire les facteurs destinés à prévenir l’entrée de nouvelles firmes dans un secteur alors que les entreprises déjà établies y réalisent un profit excessifs, au regard de l’efficience optimale du système économique.

Pour les structuralistes, l’appréciation des barrières observées sur une structure de marché déterminée constitue donc l’une des activités essentielles des autorités de la concurrence, mais dans cette idée, la marge est souvent très perméable entre structure de marché et comportement, dans la mesure où l’une influence les autres et vice versa. Ceci a notamment conduit à un transfert des travaux de recherches dans les années soixante, vers l’étude des comportements d’exclusion, visant à créer un pouvoir de marché là où il n’existerait pas autrement en vue de la réalisation de rentes économiques. Alfred Kahn décrit cette évolution de l’analyse structuraliste comme une altération de l’Organisation industrielle et sa théorie se focalisant sur la structure comme facteur exogène déterminant les comportements. En effet l’attention portée aux comportements – sur la publicité, les variations dans la qualité des produits etc - peuvent affecter la structure en général. Soulignons que cette Ecole évolue sans cesse au fil des années 80 en accordant plus d’importance aux pratiques créant des barrières artificielles de SCP (autrement nommées « stratégiques » comme on le verra plus loin dans une perspective plus restrictive par Chicago). Ainsi l’école de Harvard se définit bien par rapport à son attitude générale positive vis-à-vis d’une politique de la concurrence

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