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De Tripoli à Alep, que reste-t-il du concept de la responsabilité de protéger ?

Par   •  30 Août 2018  •  1 900 Mots (8 Pages)  •  480 Vues

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Ensuite, l'ONU a fait preuve, dans le règlement du conflit en Libye, d'une certaine autorité sur des pays de la communauté internationale. Dans sa résolution 1973, l'organisation exige des autorités libyennes qu'elles cessent "toutes les violences et toutes les attaques et exactions contre la population civile, respectent les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, y compris le droit international humanitaire, du droit des droits de l’homme et du droit des réfugiés, et prennent toutes les mesures pour protéger les civils et satisfaire leurs besoins élémentaires, et pour garantir l’acheminement sans obstacle ni contretemps de l’aide humanitaire". Dans cette même résolution, il est précisé que l'espace aérien libyen a été soumis à une interdiction de vol sauf pour des vols d'ordre humanitaire ou ceux exemptés explicitement de cette interdiction. Ici, la pression et l'autorité qu'exerce l'ONU sur les autorités libyennes pour qu'elles respectent le devoir de protection des populations civiles est considérable.

A l'égard de la communauté internationale ensuite, par cette même résolution, l'organisation autorise les Etats membres à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les populations et zones civiles menacées d'attaque, tout en excluant le déploiement d’une force d’occupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur n’importe quelle partie du territoire libyen.

En outre, si le concept de la responsabilité de protéger a trouvé son applicabilité dans des situations d'urgence humanitaire comme il fut le cas en Libye et particulièrement à Tripoli, des résultats sensiblement différents sont apparus avec le conflit syrien.

II. La difficulté pratique du concept de la responsabilité de protéger

Le concept de protection responsable perd de sa vigueur en raison notamment du conflit d'intérêt entre deux notions fondamentales (A) et l'émergence de groupes armés privés (B).

A. Le conflit d'intérêt entre deux notions fondamentales

Si certaines Opérations de maintien de la paix ont trouvé leurs limites, la responsabilité de protéger, déjà appliquée à de multiples reprises, par exemple au Kenya, en Guinée, en Libye ou en Côte d’Ivoire, évolue encore dans son effectivité.

La principale contestation de sa mise en œuvre vient de ce qu’elle serait contraire au respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’indépendance des États et de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures. Ainsi, en octobre 2010 le représentant de la République islamique d’Iran à l’Assemblée générale qualifiait ce nouveau concept de "notion vague et controversée". En juillet 2009, devant la même Assemblée, il stigmatisait déjà "l’utilisation de la force sous n’importe quel prétexte, comme celui de l’ingérence humanitaire". Il fut alors rejoint par le représentant de la Russie qui affirmait que la proposition du Secrétaire général de l’ONU d’élargir et de renforcer le principe de responsabilité de protéger, est prématuré puisque "les conditions pour mettre ces principes en pratique ne sont pas au rendez-vous, pour le moment". La République populaire de Chine estime quant à elle que toute crise doit être traitée dans le cadre de l’ONU dans le respect de la souveraineté nationale et des intérêts régionaux.

Et pourtant, depuis 1999, date de sa première résolution sur la protection des civils dans les conflits armés, le Conseil de sécurité a fait référence, plus ou moins directement, à cette obligation dans les mandats des missions des forces de paix de l’ONU. Celles-ci ont été autorisées dans plusieurs cas à recourir à la force pour protéger des populations civiles, et l’ont effectivement exercé, notamment en République Démocratique du Congo, en Haïti, ou encore en Côte d’Ivoire, avant la chute du Président Laurent Gbagbo qui refusait d’accepter sa défaite aux élections et dont les forces prenaient les populations civiles pour cibles.

De même, la résolution 66/253 adoptée le 3 aout 2012 par l’Assemblée générale des Nations Unies contre la République arabe syrienne indique que la responsabilité de protéger couvre à présent "la poursuite des violations flagrantes, généralisées et systématiques des droits de l’homme et des libertés fondamentales (…) comme l’emploi de la force contre des civils, les massacres, les exécutions arbitraires, le meurtre et la persécution des manifestants, de défenseurs des droits de l’homme et des journalistes, les détentions arbitraires, les disparitions forcées, l’entrave à l’accès aux soins médicaux, la torture, les violences sexuelles et les mauvais traitements, y compris contre les enfants" commis par les autorités syriennes et les milices progouvernementales. Son champ d’application porte également sur l’usage et le transfert de toutes armes chimiques ou biologiques, sur l’obligation de permettre "sans entrave" les missions humanitaires, et de mettre fin au "nombre croissant de réfugiés et de déplacés résultant de la persistance de la violence". Cette résolution demande enfin la mise en place d’une transition politique. Il est incontestable que l’absence d’unité de la communauté internationale, et son inertie relative ont pu contrecarrer les efforts des missions de médiation mandatées à Damas par l’ONU et par la Ligue arabe.

B. L'émergence des groupes armés non étatiques

L'ONU est intervenue dans de nombreuses situations mais elle demeure parfois impuissante, tel est le cas en Syrie, où les conflits durent depuis plus de six ans. La responsabilité de protéger paraît inadaptée au regard de la lutte contre les exactions des groupes armés non étatiques. De plus, il s'agit de protéger les populations de civils certes, mais aussi les valeurs de la communauté internationale, nécessitant une stratégie globale et une action coordonnée.

Le concept de la responsabilité de protéger est mis à mal par l'évolution du monde. Kofi ANNAN constate dans son ouvrage We the peoples que le contexte international est devenu mondial, et le droit international étatique conventionnel et traditionnel n'est pas adapté aux réalités mondiales. En effet, les conventions internationales ne sont appliquées qu'aux Etats parties. Ainsi, les groupes armés privés échappent aux obligations relatives aux droits de l'homme et

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