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Scène 7 Acte V Lorenzaccio, Musset.

Par   •  1 Juin 2018  •  2 206 Mots (9 Pages)  •  501 Vues

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d’endosser la responsabilité de leur inaction, Lorenzo dénonce encore mieux leur attitude passive après le meurtre du duc. Enfin, le peuple vénitien est présente de manière ridicule à travers l’évocation métonymique du ≪ grand gaillard à jambes nues ≫ (l. 45-46) à la conduite absurde. Son couteau ≪ long comme une broche ≫ et son ≪ air […] penaud ≫ (l. 48-49) en font un personnage grotesque. Lorenzo ne se prive d’ailleurs pas de le railler et, à travers lui, tous les hommes que l’argent promis ≪ rend presque courageux ≫ (l. 45). L’adverbe ≪ presque ≫ souligne ici leur lâcheté de manière sarcastique. A l’inverse, Philippe ne perd pas espoir en l’humanité et a toujours foi en sa nature. Concernant l’action des républicains, il refuse de raisonner ≪ sur un événement qui n’est pas achevé≫ (l. 30) et préfère voir dans le grand gaillard couard qui a suivi Lorenzo ≪ sans doute un honnête homme ≫ dont l’attitude hésitante trahissait ≪ le respect pour les malheureux ≫ (l. 53). C’est cette dernière réplique qui pousse Lorenzo à rompre l’entretien, comme s’il percevait alors le caractère sans issue de cette conversation avec Philippe.

3. Une attitude opposée

Alors que Philippe était présenté comme un être de paroles dans le reste de la pièce (un « faiseur de sentences », selon son fils à l’acte IV, p. 144), c’est ici lui qui incite Lorenzo à l’action alors que Lorenzo, au contraire, se caractérise ici par son inertie. Philippe emploie des verbes de mouvement : ≪ partons ensemble ≫ (l. 18) ; ≪ sortir d’Italie ≫ (l. 31). De plus, pour faire réagir Lorenzo, le vieux patriarche emploie l’impératif (l. 3, 18, 30), pose des questions afin de susciter une réaction chez son interlocuteur (≪ N’avez-vous pas été heureux autrement que par ce meurtre ? ≫, l. 35-36) et formule des affirmations polémiques (≪ vous avez des travers, mon ami ≫, l. 23). Dans cette scène, il semble donc mener le dialogue et c’est lui qui incite Lorenzo à l’action (≪ votre esprit se torture dans l’inaction ; c’est là votre malheur ≫, l. 22-23). Les rôles sont en quelque sorte inverses par rapport au reste de la pièce car le héros, contrairement à son habitude, est présenté comme particulièrement passif et inactif. Dans son discours, il personnifie son ennui et lui apparaît soumis, étant complément d’objet du verbe dont ≪ l’ennui ≫ est le sujet : ≪ l’ennui […] me prend ≫ (l. 39-40). Cette structure grammaticale se répète d’ailleurs un peu plus loin, mais c’est cette fois le manque de désir du personnage qui est mis en avant : ≪ c’est assez, il est vrai, pour faire de moi un débauché, mais ce n’est pas assez pour me donner envie de l’être ≫ .

III. Un dénouement inéluctable

1. Une mort inévitable

Au fil du texte, la mort de Lorenzo paraît de plus en plus inévitable. L’évocation de la mort encadre cette dernière apparition du héros. Elle ouvre la scène à travers la lettre annonçant le décès de Marie, et l’achève par celui de Lorenzo, jeté dans la lagune par le peuple après avoir été poignardé. Or la dernière discussion du héros avec Philippe montre qu’il semble avoir accepté cette fin inévitable. Un certain nombre d’expressions et d’images le suggèrent. Tout d’abord, on remarque son insistance à vouloir sortir malgré sa mise à mort par proclamation. Philippe la lui rappelle pourtant au début de la scène : ≪ vous allez et venez continuellement, comme si cette proclamation de mort n’existait pas contre vous ≫ (l. 4-5). De plus, le héros parle déjà de lui-même au passé et suggère qu’il n’a plus de raison de vivre depuis l’exécution du meurtre : ≪ j’étais une machine à meurtre, mais à un meurtre seulement ≫ (l. 33-34). Lorenzo utilise enfin des métaphores funèbres. Ainsi, la ≪ statue de fer-blanc ≫ (l. 17) à laquelle il se compare connote à la fois la rigidité, la froideur et la blancheur de la mort ; le fait que cette statue soit ≪ vide ≫ semble de surcroît annoncer la disparition de l’âme.

Séquence VI – L.A. N°4 - Analyse de la scène 7 de l’acte V, l. 1-55, p. 179-181

(suite)

III. 2. Une pulsion suicidaire

Lorenzo ne cesse d’exprimer son désir de sortir tandis que Philippe l’invite au contraire à rester caché. Lorenzo signifie ainsi son désir suicidaire de promenade. Les formules utilisées par le héros pour signifier son désir de sortir sont de plus en plus injonctives et suppliantes. Lorenzo semble éprouver un réel désir de hâter sa mort. On peut relever un certain nombre d’expressions pour souligner cette évolution du ton : ≪venez donc faire un tour de promenade, Philippe ≫ (l. 2) ; ≪ je vous en prie, venez faire un tour de promenade ≫ (l. 20-21) ; ≪ sortons, je vous en prie ≫ (l. 42). La première formule, qui suit l’évocation de la lettre annonçant la mort de Marie, est déjà injonctive. La conjonction ≪ donc ≫ traduit l’impétuosité du désir du personnage. Le ton se fait ensuite plus pressant. Dans la deuxième réplique, Lorenzo supprime l’apostrophe à Philippe et la remplace par la tournure d’insistance ≪ je vous en prie ≫. Par la suite (l. 42), le personnage formule son souhait plus brièvement, ce qui renforce l’impression d’urgence. La première partie de la phrase se réduit au verbe à l’impératif ≪ sortons ≫. Enfin, par sa dernière assertion, ≪ je vais faire un tour au Rialto ≫ (l. 54-55), Lorenzo marque sa rupture par rapport à Philippe : le ≪ je ≫ remplace le ≪nous≫, montrant la détermination du personnage.

3. Un destin tragique?

L’expression de la fatalité ancre la scène dans le registre tragique. Philippe apparaît dans cette scène comme la voix du destin et Lorenzo semble obéir à une forme de fatalité tragique. En effet, Philippe ne cesse de rappeler à Lorenzo le danger de mort qui le guette. Pour ce faire, il utilise tantôt l’impératif et le vouvoiement (≪ je vous en supplie, mon ami, ne tentez pas la destinée ≫, l. 3), tantôt le futur catégorique et le tutoiement (≪ tu te feras tuer dans toutes ces promenades ≫, l. 43). De plus, c’est aussi lui qui rappelle au héros ≪ la proclamation de mort ≫ qui a été prononcée contre lui (l. 4-5). Lorenzo, en veritable héros tragique, reste sourd aux avertissements de Philippe. A la fin de la scène, il s’avance vers son destin malgré les avertissements qui lui sont donnés et choisit de quitter le cabinet où le vieux

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