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Faut-il opposer parole théâtrale et image cinématographique ?

Par   •  26 Juillet 2018  •  1 311 Mots (6 Pages)  •  306 Vues

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moderne du complexe d’Œdipe n’est pas anodin car Pasolini lui-même en a fait l’expérience : « Mon amour pour ma mère est resté quelque chose de latent. Historiquement, je me suis placé dans un rapport de rivalité et de haine envers mon père. » Cela permet donc de montrer que si la parole théâtrale et l’image cinématographique peuvent parfois s’opposer car l’une n’est pas forcément nécessaire à l’autre, elles peuvent aussi se compléter, raison pour laquelle l’adaptation filmique d’une œuvre littéraire permet de donner une nouvelle perspective à, dans le cas présent, une tragédie antique, et de l’actualiser.

II. Non

Néanmoins, paroles théâtrales et images cinématographiques ne sont pas deux éléments à opposer systématiquement. En effet, s’ils sont support d’une opposition sémantique (parole/image), ils restent, pour autant, similaires en plusieurs points. C’est ainsi que Sophocle utilise de nombreux récits pour relater des évènements antérieurs à la pièce, et sa parole poétique permet au lecteur/spectateur de visualiser parfaitement la scène. Ainsi, la narration de la querelle entre Œdipe et Laïos, précédent la mort de ce dernier, nous dépeint un tableau de la scène « Au moment où, suivant ma route, je m’approchais du croisement des deux chemins, un héraut, puis un chariot attelé de pouliches, un homme tout pareil à celui que tu me décris, venait à ma rencontre. Le guide, ainsi que le vieillard lui-même, cherche à me repousser de force. Pris de colère, je frappe, moi, celui qui me prétend écarter ma route, le conducteur. Mais le vieux me voit, il épie le moment où je passe près de lui et de son chariot il m’assène en pleine tête un coup de son double fouet. ». Récit que Pasolini transpose, en en faisant une véritable scène de son film, où dialogue et parole n’ont pas de place et similaire en beaucoup de point, au récit de Sophocle. Ainsi, on retrouve dans cette scène des similitudes : « « atteint par le bâton que brandit cette main » devient une branche qu’Œdipe utilise pour couvrir son visage du soleil en arrivant devant Laïos, « un chariot attelé de pouliches »…

De la même façon, alors que la mort de Jocaste est raconté par un récit chez Sophocle « la femme est pendue ! Elle est là, devant nous, étranglée par le nœud qui se balance au toit », Pasolini nous en montre une image : celle de Jocaste accrochée au lit nuptial. En somme, pour les deux auteurs, le but des paroles comme des images est de toucher le spectateur/lecteur, voire même de le choquer, et chacun parvient à rendre son image ou ses mots assez marquant pour atteindre cet objectif. De ce fait, il semble important de ne pas opposer images et paroles sur ce point. Un exemple encore plus frappant est la peste qui ravage Thèbes ; en effet, Sophocle montre les dégâts causés par l’épidémie en valorisant les lamentations du peuple au sein du parodos « tout mon peuple est en proie au fléau. Les fruits de ce noble terroir ne croissent plus à la lumière et d’heureuses naissances ne couronnent plus le travail qui arrache les cris aux femmes. L’un après l’autre, on peut voir les thébains se précipiter sur la rive où règne le dieu du Soleil Couchant. », et Pasolini fait de longs panoramiques sur la ville désertiques, zoomant sur les corps déchiquetés et cireux, avec un effet de gradation car il se focalise d’abord sur un corps puis élargit son champs en en ajoutant de plus en plus.

Pour autant, si la parole rejoint l’image, l’inverse est également possible : l’image rejoint la parole. En effet, Pasolini, qui créé le terme de « cinéma de poésie », utilise les images cinématographiques pour s’exprimer. Il parle à travers son film, et ce grâce à un jeu de double identification. D’abord, les personnages s’identifient entre eux, et un même acteur joue plusieurs rôles, liant ainsi partie réelle et partie mythique. Ensuite, en s’identifiant lui-même à Œdipe et exprimant ainsi à travers le film, son propre complexe d’Œdipe mentionné précédemment.

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