Commentaire - Phèdre, Acte I, scène 3 - Phèdre.
Par Andrea • 7 Juin 2018 • 2 652 Mots (11 Pages) • 925 Vues
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Oenone, de par sa présence offre à Phèdre l’occasion de se confier et de livrer aux publics leurs pensées de façon vraisemblable. Oenone porte ici la double énonciation. Néanmoins, son dévouement avec corps et âme pour le bonheur de Phèdre est dévastateur comme la passion amoureuse de Phèdre qui révèle un gouffre entre les deux interlocutrices.
- Un échange inexistant
Si les deux femmes semblent converser du début de la scène jusqu’à notre limite qu’est le vers 184.On ne peut pas dire qu’ils s’agissent d’un véritable dialogue. Phèdre s’adresse moins à Oenone qu’a un être absent, Le Soleil qui n’est autre que son aïeul vers 172, sa nomination est mise en valeur par une césure décalée en rapidité aux vers 173 et 176 comme si Phèdre s’enfermait dans sa propre parole. Mais rien de ce qu’Oenone dit l’interpelle, soumise à sa passion, elle formule un souhait qui donne pour ainsi dire corps à son fantasme qui est celui de mourir pour voir Hyppolite sans être vue qui nous ai dit entre les vers 176 à 178. Phèdre s’en retrouve davantage isolée d’Oenone. Phèdre qui nous avait signalé son affaiblissement physique et morale, nous dit qu’elle est isolée par sa passion tel un personnage tragique. Phèdre n’est touchée seulement à la fin par l’ultime question du dialogue d’Oenone qui la fait revenir à la raison, à la situation de communication. Elle dit « Quoi, Madame ? » ou l’on peut entendre, de par les répliques précédentes de Phèdre, un ton virulent soutenue par la virgule qui ralentit la parole. La réponse donnée assez rapidement par Phèdre nous a traduits grâce à l’utilisation d’une stichomythie laissant entendre une soudaine lucidité chez Phèdre, sa réplique étant bâtie sur une exclamation et deux interrogations ou elle confirme son égarement « Insensée, où suis-je ? Et qu'ai-je dit ? Où laissé-je égarer mes vœux, et mon esprit ? » C’est à ce moment qu’Oenone reprend son statut d’interlocutrice. À la fin de cette scène la tension est palpable, un repli synonyme d’égarement à la fin de la part de Phèdre et des interrogations, des exclamations et certains harcèlement de l’autre côté de la part d’Oenone. Tout dans cette scène est structuré sur une dichotomie : celle de la parole et du silence, celle du repli et de la lucidité.
Les deux dichotomies sont corolaire. Prise au piège dans sa passion amoureuse, Phèdre s’enferme dans sa parole et dans son fantasme, elle rejette tout, même son interlocutrice principale Ce double rejet montre donc matériellement un impossible repli dans le mutisme. L’esprit de Phèdre est perturbé, elle est atteinte. Cette solitude qui est la conséquence d’une malédiction dont elle clame son innocence.
III/ Le Jeu de l’ombre et de la Lumière
- Le poids d’une hérédité
L’héroïne tragique est souvent victime de son sort. On l’a vu, Phèdre est directement concernée par la vengeance des Dieux. Cet amour est une malédiction qui lui a était envoyée par Vénus à cause de son grand-père (le soleil) qui a éclairé les amours illégitimes entre Mars et Vénus. Donc Vénus se venge sur la famille de Phèdre. Le motif du dévoilement s’accompagne de celui de la vue en relation avec la question de la lumière. Phèdre est recluse dans son palais, elle décrit sa famille tel un soleil et est éblouie par la lumière du jour qu’elle revoit. Elle en valorise la connotation par une périphrase telle que « Noble et brillant auteur » (v. 169). Quand elle s’adresse à ces derniers elle joue sur le regard, je cite : « Je te viens voir pour la dernière fois » (v. 172), « Vous verrai-je » (Oenone v. 174), « trouble où tu me vois » (v. 171) et « je te laisse trop voir » (v. 183). La famille regarde Phèdre mais Phèdre veut se cacher. Hippolyte lui, est associé à « l’ombre des forêts » (v. 176), avec qui elle voudrait sortir du palais et marque un signe de regret et désir. Mais n’est-elle pas en cela contradictoire. Oenone confirme ce paradoxe, Phèdre chercher cette lumière « revoir cette lumière » vers 166 mais va désormais Phèdre va désormais fuir cette lumière « Vous la voyez, Madame, et prête à vous cacher, Vous haïssez le jour que vous veniez chercher ?» (v. 167-168). Cette situation paradoxale a une portée dramatique car importante dans cette scène. Puisque ce paradoxe, nous rappelle ce qui est propre à la nature même de Phèdre : Elle est à la fois la petite fille Soleil et fille de l’ombre, par son père Rhinos qui siège en enfer. Hippolyte lui, est don associé à « l’ombre des forêts » (v. 176), avec qui elle voudrait sortir du palais et marque un signe de regret et désir.
Racine joue sur l’ombre et la lumière pour représenter les dieux et confirmer le désarroi de Phèdre qui veut se sent coupable de cette passion et dont elle reporte la faute sur ces derniers.
- Innocence et culpabilité
Phèdre est fasse à l'enfermement de sa famille, de sa malédiction, elle ne pourra jamais en sortir. « Tout m'afflige et me nuit, et conspire à me nuire » (v. 161), L’utilisation du verbe « conspirer » laisse à entendre un complot à son égard. Les « nœuds » dont elle souligne la formation et l’utilisation du « malgré moi » (v. 184) marque le fait que c’est une victime. Le chiasme présent vers 166 à 168 montre un désordre grammatical rhétorique et stylistique, elle traduit la honte qu’elle a à l’égard de la lumière du aux sentiments incestueux qu’elle ressent. Pour Phèdre se montrer un jour, au soleil (son ancêtre), reviendrait pour elle à dévoiler sa culpabilité. Phèdre cherche le dévoilement, la vérité, autant qu’elle les craint. Cette culpabilité nous est donnée son champ lexical : « Honteuses » (v. 183), « la rougeur » (v. 182) et « rougis » (v. 171), elle se sent coupable d’aimer Hippolyte. Elle veut que cette malédiction s’estampe, les vers 169 à 172 peuvent être interprétés comme une forme de prière. Le vers 184 « Et mes yeux, malgré moi, se remplissent de pleurs » est une image hyperbolique comme un vase trop plein et qui déborde, Phèdre est malheureuse, un ton tragique est engagé. De plus le désir de mort n’est pas explicitement cité elle contourne son désir en annonçant « [c’est] la dernière fois » (v. 172) traduisant une appréhension qui s’accompagne de sa contradictoire avec la volonté de sortir du Palais, ce qui révèle la passion.
Phèdre subit son désarroi, c’est un personnage tiraillé, paradoxale, fidèle aux héros tragique. Le jeu de l’ombre
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