La vie Antérieure, Baudelaire
Par Matt • 12 Décembre 2017 • 1 371 Mots (6 Pages) • 667 Vues
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Le poète exprime son Idéal, grâce à la description d'un univers onirique et l'évocation des sens et d'une vie parfaite. Cependant, l'Idéal n'est que rêve, imaginaire et souvenirs, tandis que le Spleen est bien réel. La nostalgie de Baudelaire est omniprésente, par les regrets d'une vie antérieure et le spleen inévitable généré par l'Ennui.
D'abord, le poète fait resurgir ses souvenirs d'une vie passée et révolue et déplore le caractère éphémère du bonheur. En effet, le titre « La Vie Antérieure » et l'emploi de verbes au passé composé (« ai habité » v.1 et « ai vécu » v.9) sont des indices de l'aspect révolu de cette vie, qui n'est plus qu'un souvenir. L'expression au 1er tercet « C'est là que j'ai vécu » est un rappel du 1er quatrain et met en valeur les regrets du poète. Dans les deux quatrains, la présence humaine est imaginaire et non physique (peinture d'un paysage seul, ce n'est que dans les tercets que le poète fait partie du paysage), ce qui rappelle au poète ainsi qu'au lecteur que tout cela n'est que rêve. De plus, les 1ers et le dernier vers de la 1ère strophe, rapprochés par la rime riche et la comparaison, sont une opposition entre la lumière : « vastes portiques », « les soleils », « mille feux » (ici, l'impression de lumière est accentuée par le pluriel et le nombre mille) ; et l'obscurité : « le soir » est mis en exergue par des virgules et placé à la césure, les « grottes basaltiques » connotent l'aspect sombre. Cette opposition laisse présager que tout n'est pas que perfection, que derrière l'univers décrit existe une réalité différente. En outre, on peut faire un parallèle entre ce paysage paradisiaque et le jardin d'Eden : cela laisse présumer que Baudelaire, comme Adam et Eve, sera chassé du paradis.
En outre, un ennui est généré par de la lassitude éprouvée par le poète, et celui-ci est détenteur d'un lourd secret qui engendre le Spleen. En effet, l'adverbe « longtemps » au 1er vers suggère que la durée de la vie antérieure n'est pas mesurable d'après la mesure humaine du temps. Cela est accentué par l'emploi de verbes à l'imparfait tout au long du poème, par exemple « teignaient » v2 ou bien « faisait » v14, qui marque la durée et la répétition, ainsi que par le pluriel « les soleils » v2, qui traduit un éternel renouvellement des journées. Cette éternelle répétition, ainsi que le dernier tercet, est à l'origine d'une lassitude qui engendre l'Ennui, le pire des vices pour Baudelaire. De plus, le verbe « approfondir », au vers 13, connote la profondeur, le gouffre, qui est une image du Spleen. Enfin, le dernier vers nous apprend l'existence d'un « secret douloureux qui me faisait languir », sans plus de précision sur la nature de ce secret : peut-être est-ce la connaissance de la fin de ce bonheur, la mort du rêve ? C'est ce secret qui est à l'origine du Spleen : il arrive comme une désillusion, le poète retombe dans le Spleen immanquablement car le bonheur est éphémère.
Quoique dissimulée, la nostalgie est omniprésente tout au long du poème car il est le récit d'un temps heureux révolu, et le Spleen finit par prendre le dessus sur l'Idéal aux deux derniers vers.
Dans « La Vie Antérieure », Baudelaire nous expose un univers onirique, un paradis terrestre qui est le reflet de son Idéal, qu'il essaie d'atteindre. Cependant, ce monde est hors de portée et il en est nostalgique. Baudelaire retombe toujours, fatalement, irrémédiablement, dans le Spleen : c'est le retour brutal à la réalité. Il dira d'ailleurs : « Il y a dans tout homme à toute heure, deux postulations simultanées. L'une vers Dieu, l'autre vers Satan. L'invocation à Dieu ou spiritualité est un désir de monter en grade ; celle de Satan ou animalité est la joie de redescendre. »
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