Incipit de Bel Ami de Bel Ami

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Tous ces éléments suggèrent déjà sa psychologie: le portrait en mouvement campe un personnage offensif,grossier,brutal ,brutalement, heurtant, poussant, ne point déranger, défier , qui se lance dans une campagne de conquête(s) avec des méthodes quasi militaires parce qu'il est sans le sou.

Dès la première ligne , le lexique de l'argent apparaît. Le message est clair:l'argent conditionne ses actions : Quand la caissière lui eut rendu la monnaie de sa pièce de cent sous, Georges Duroy sortit du restaurant, et occupe son esprit.Toutes ses pensées sont centrées sur sa précarité matérielle qu' il évalue au sou près : il lui restait juste en poche ...ce qui représentait encore deux collations au pain et au saucisson, plus deux bocks sur le boulevard. C'est un calculateur,au propre comme au figuré.Ses vêtements portent aussi des traces de sa pauvreté,son chapeau à haute forme assez défraîchi, Quoique habillé d'un complet de soixante francs, ce qui peut expliquer le côté à la limite de l'outrancier de son attitude qualifiée d' élégance tapageuse, un peu commune, réelle cependant par le narrateur .

Le lecteur découvre un héros conscient de ses limites pécuniaires mais arrogant, sûr de son pouvoir de séduction sur les femmes ,jugées selon leur « valeur » sociale:encore « inséré » dans une ambiance populaire ,bocks de bières, pain, saucisson, gargote, collation …, il a vite fait jauger les clientes présentes, comme une sorte d' échantillon à ne pas séduire, trois petites ouvrières, une maîtresse de musique entre deux âges, mal peignée, négligée,... et deux bourgeoises avec leurs maris, habituées de cette gargote à prix fixe.(Le lecteur appréciera le rythme ternaire,la classification selon le statut social, ici trop bas pour notre ambitieux).

Aucune attirance sentimentale ou physique dans le regard que Duroy porte sur les femmes, mais un regard rapide et circulaire, un de ces regards de joli garçon, qui s'étendent comme des coups d'épervier : grâce à son entraînement militaire,il jauge vite et « juste » avant de lancer son filet pour prendre ,à l'épervier , (filet de pêche conique garni de plomb,que l'on lance à la main),le « poisson qu' il aura estimé intéressant » pour sortir définitivement de sa misère.

Nous découvrons un héros donc ambigu,pour lequel le narrateur ne semble éprouver aucune complaisance comme le prouvent le lexique péjoratif et la dernière phrase il ressemblait bien au mauvais sujet des romans populaires.

Nous constatons donc que Maupassant a bien installé dans son incipit selon le point de vue de son narrateur omniscient le cadre spatio-temporel du début d' une histoire comme toile de fond de l' entrée en scène de son héros .Mais,si ce début de roman remplit son rôle ,les éléments qu' il révèle sur le personnage principal ne semblent pas du tout faire l' écho de son surnom Bel Ami,éponyme du roman.

Pourrait-on considérer dès les premières lignes Duroy comme un anti-héros,que son créateur lui-même semble ne pas apprécier ?