Eluard, Capitale de la douleur, 1926
Par Christopher • 30 Octobre 2018 • 1 974 Mots (8 Pages) • 916 Vues
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Poésie particulière → Entre tradition et innovation :
Recherche de la beauté → parole n'est pas son simple outil, la simplicité, la fluidité, la prose et la sentimentalité sont ces outils majeurs. Intérêt donc pour le sonnet, l'alexandrin même si il bouscule souvent l'ordre métrique et utilise grandement le vers libre et la prose. Variété formelle et variation des formes : fait des sortes d'haïkus/ utilise la prose/ récits aussi de rêve / textes automatiques (monologue de débit aussi rapide que possible, où l'esprit critique du sujet ne puisse porter aucun jugement). Recueil majoritairement en vers blancs (aucunes rimes), le registre varie : à la fois pathétique, ironique , tragique mais aussi burlesque, élégiaque... Importance aussi des blancs topographiques, qui délimitent le poème et sa forme, mais aussi pour créer des images et des idées particulières avec ces blancs. Œuvre foisonnante et variation des formes importante pour délivrer des images variées.
Citations de 4 vers consécutifs :
« La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu
C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu »
La courbe de tes yeux, Eluard
La courbe de tes yeux, étude :
I. L'éloge des yeux
1. Un blason (= poème qui fait l'éloge d'une femme par un détail physique)
C'est un éloge insolite > courbe des yeux mais aussi courbe du regard On trouve un champ lexical très riche
- Dénotation claire de la courbe : "tour", "courbe", "rond", de la figure géométrique du cercle, de l'ondoiement de la courbe.
- Connotation poétique : "feuilles", "gouttes de rosées", "les roseaux", "les ailes", "les ¦ufs", "astres", "bateau", "berceau", "danse".
Ce sont les yeux qui sont au centre mais on retrouve aussi les lèvres.
2. Structure circulaire du poème
Tout dans ce poème est ondoyant.
- Le vers 15 revient au vers 1 >> il ferme le poème par un retour au vers 1. On remarque un chiasme entre ces 2 vers.
- Beaucoup d'assonances en [ou] >> courbe (cf. vers 1, 2, 4, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 15). Ce ne sont pas les seuls jeux mélodieux ([r].....)
- Cette cadence circulaire est aussi marquée par la fantaisie des rimes, qui sont souples comme une courbe.
Toute cette structure formelle du poème suggère l'ondoiement heureux du regard.
3. Pouvons-nous discerner dans ce texte des éléments descriptifs de l'œil ?
- Jaillissement d'images opposées les unes à la courbe des yeux, les autres aux yeux purs.
- Peut-être que nous pouvons les déchiffrer :
couleur : "feuille" et "mousse" >> vert ?
"ciel" et "mer" >> bleu/gris ?
"feuille de jour" > quand les paupières se lèvent Gala voit le jour.
"ailes" > paupières ?
"rosée" > regard humide ?
"roseau" > les cils ?
Les yeux de Gala ne sont pas simplement des yeux physiques, mais des "yeux purs">> monde moral, intérieur
Il n'y a pas vraiment de description.
II. Le couple
1. Bonheur d'un amour partagé
On a ici tout un jeu des pronoms personnels et possessifs (vers 1 : "tes"; "mon")
vers 1 : Gala enveloppe d'amour
vers 15 : Eluard lui répond en lui rendant ce qu'il a de plus précieux : son "sang", c'est-à-dire sa vie.
On observe un parallélisme entre les sonorités des vers 1 et 15 :
"La courbe de tes yeux...."
"Et tout mon sang coule dans..."
Cela peut évoquer un couple enlacé. Tout au long du poème, des éléments évoquent la sensorialité et la sensualité (parfums, couleurs, bruits)
2. L'homme dépend de la femme
"dépend de" vers 14
Elle agit, il subit, l'homme est passif.
Les vers 4 et 5 contrastent avec le reste du poème, ils sont plus prosaïques, les mots sont plus courts. Ils marquent la fragilité de cette dépendance -> Eluard ne vit que par son amour.
3. A la femme amante, on a la mère
"berceau" (vers 3) >> le cœur d'Eluard est le nouveau-né dans le berceau.
"ailes" (vers 8) >> évoquent la mère protectrice. On note que le vers 8 se trouve exactement au milieu du poème.
"couvée d'aurore" (vers 11)
Gala est pour Eluard une nouvelle mère : elle l'a fait renaître. A ces images de maternité correspondent des images de naissance. Elle est la mère de leur enfant mais aussi celle de l'homme qu'elle aime.
III. La femme offre le monde au poète
On n'assiste ici nulle part à un repliement à 2, mais au contraire à une ouverture généreuse. La femme est plus proche physiquement de la terre : elle donne sens à tout.
1. Le poème est fondé sur une envolée
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