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Candide, chapitre 19

Par   •  29 Janvier 2018  •  1 206 Mots (5 Pages)  •  927 Vues

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un véritable réquisitoire contre l’esclavage. Il est particulièrement intéressant de constater que Voltaire a choisi de donner la parole aux victimes et on peut se demander si l’esclave n’est pas en fait la parole de l’auteur. En effet, le niveau de langue employé (« généalogiste » par exemple) et la rigueur implacable de la démonstration (abondance de liens logiques, « cependant… », « mais », « Or », le modalisateur « vous m’avouerez ») semblent peu propres à un être élevé en esclavage. Le réquisitoire du « nègre » n’épargne aucun des responsables de son malheur. Il se fait le porte-parole de tous les esclaves comme en témoigne l’utilisation du pronom « nous ». Le pronom impersonnel « on » désigne Vanderdendur et tous les esclavagistes. Cependant le choix de l’impersonnel et les références implicites au code noir nous invitent à nous demander si ce ne sont pas tous les européens qui sont mis en cause. L’emploi du pronom « vous » dans »c’est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe » est en tout cas une dénonciation sans équivoque de la responsabilité des consommateurs européens. L’insistance sur le thème du sucre (« Quand nous travaillons aux sucreries… », «vous mangez du sucre… ») oppose l’atrocité de l’esclavage à la futilité d’une consommation réservée à l’époque à une population privilégiée.

L religion est implicitement mise en cause dans le discours de l’esclave. Significativement, le christianisme est mis sur le même plan que la religion animaliste africaine dans l’expression « fétiches hollandais » ; c’est que les deux religions cautionnent la barbarie de l’esclavage, les pasteurs en « prêchant » une morale incompatible avec l’esclavage comme en témoigne la succession des termes « enfants », « cousins issus de germains » et « parents », et la mère en présentant l’esclavage comme un état enviable (champ lexical du bonheur : « heureux », « fortune ») pour peu que l’esclave préserve sa croyance (« …bénis nos fétiches, adores-les toujours… »).

L’absurdité d’un système fondé sur le racisme apparait d’abord subtilement dans le texte lorsque le narrateur désigne l’esclave par substantif « nègre » puis par « pauvre homme ». Le terme home caractérisé par l’adjectif pauvre (seule trace de pathétique dans le récit) annonce l’argumentation de l’esclave : la conjonction »et » dans « …tous enfants d’Adam, blancs et noirs.» insiste sur l’égalité des races. L’accumulation « Les chiens, les singes et les perroquets… » met en évidence l’injustice dont sont victimes les africains, moins bien traités que des animaux de compagnie comme en témoigne l’hyperbole « …mille fois moins malheureux que nous. ».

Le recours au discours direct pour rapporter les paroles de la mère permet enfin d’évoquer la responsabilité des africains eux-mêmes dans l’esclavage. L’opposition des termes « honneur » et « esclave, le fait que le terme »mère » soit sujet du verbe « vendit » soulignent cette responsabilité.

Ainsi, c’est toute la chaîne des responsabilités qui est dénoncée dans le discours du « nègre » qui fait preuve d’une rigueur argumentative implacable, ce qui nous autorise à penser qu’il est effectivement le porte-parole de voltaire.

En choisissant la forme narrative, Voltaire renforce l’efficacité de sa dénonciation. L récit, vivant, le recours au discours direct lui permettent de parvenir à son but sans tomber dans un moralisme ennuyeux. La variété des registres, le choix de donner la parole aux victimes font de ce texte un plaidoyer efficace en faveur des droits de l’homme, valeur chère aux philosophes des Lumières et à voltaire en particulier comme en témoignent les nombreux combats qu’il a livrés, parfois au péril de sa liberté. Il suffit de citer ici l’affaire Calas

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