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Le logement : un marché à réguler

Par   •  23 Mars 2018  •  2 281 Mots (10 Pages)  •  641 Vues

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Parmi les principaux griefs adressés par les entreprises du bâtiment aux pouvoirs publics, celui de la multiplication des normes constitue un reproche récurrent. Bien que le surcoût soit difficile à mesurer, l’empilement des normes s’avère réel. Ainsi, entre 2002 et 2012, le code de l’urbanisme est passé de 1 584 à 3 266 pages ce qui correspond à l’inscription de 6 000 nouvelles normes. A titre d’exemple le rapport des sénateurs Lambert et Boulard de 2013, s’est penché sur le cas de la réglementation antisismique. Depuis 2010, elle « est applicable aux nouvelles constructions dans des zones qui n’ont jamais connu de secousses sismiques ». La ville du Mans est citée en exemple : malgré l’absence de risque sismique, elle doit malgré tout appliquer des normes requises. Le surcoût est estimé entre 1 et 5%.

Il apparaît que l’Etat et les collectivités locales ne soient pas organisés de façon optimale pour initier des projets d’habitat et notamment en ce qui concerne Souvent est reproché le « malthusianisme foncier » des communes. Bien que la loi portant l’Engagement national pour l’Environnement de 2010 ait rendu obligatoire l’initiative du Plan Local d’Urbanisme (PLU) à charge des intercommunalités et que la loi Alur renforce ce caractère obligatoire, il existe toujours des possibilités de recours de la part des communes. Ainsi, sur plus de 2 000 intercommunalités, le ministère recensait en 2015 seulement 280 PLUi. De même, si l’on peut saluer l’objectif quantitatif des 500 000 logements à construire au niveau national, il n’est pas adapté aux besoins très divers des territoires. Il est trop tôt pour juger de l’efficacité des Schémas Régionaux d’aménagement Durable du Territoire (SRADDT), introduit par la loi Notre, qui ont pour objectif de définir des objectifs chiffrés en terme de logement notamment. On peut cependant espérer que ce cadre, établi en cohérence avec les PLU, permettra le développement de l’offre de logement.

II Une régulation raisonnée doit permettre de combattre les effets parfois pervers de la politique sociale du logement.

A Les aides sociales au logement mal orientées pénalisent les ménages les plus modestes.

Dans un contexte de chômage et de mal-logement de masse, il y à ce jour 1,8 millions de demandes d’attribution de logement social en cours. Pourtant, la France consacre deux fois de dépenses publiques (en valeur relative par rapport au PIB) que la moyenne des 28 pays de l’UE dont la moitié, soit un point de PIB, est distribuée sous forme d’aides personnelles au logement. Ce mode de distribution peut avoir des effets pervers car une partie des aides perçues par le ménage se traduit par une hausse de la valeur des loyers. Selon l’économiste Gabrielle Fack, « la réforme de l’extension des aides au logement au début des années 1990 a fortement contribué [à l’augmentation rapide des loyers des locataires les plus modestes] : selon les estimations réalisées, entre 50 % et 80 % des allocations de logement ont été absorbées par des hausses de loyer dans le secteur privé ». Ces ménages devenus davantage solvables, la demande croît, ce qui, dans un contexte de rareté de l’offre, implique une hausse des loyers. Afin d’enrayer cette hausse, on peut envisager la suppression des aides personnelles au logement pour les étudiants non-boursiers.

Par ailleurs, la faible mobilité du parcours résidentiel, c’est-à-dire le turnover des locataires, constitue un très grand frein à ce que de nouveaux ménages puissent bénéficier des HLM. Le logement social s’est bâti sur le principe du « droit au maintien dans les lieux ». Cela signifie qu’un ménage ayant un revenu supérieur au plafond requis pour l’éligibilité au logement social pouvait rester dans les lieux. Bien que ce droit soit tout à fait avantageux pour les locataires – un HLM est toujours financièrement plus intéressant – et pour les bailleurs sociaux – les locataires les plus « riches » sont les meilleurs payeurs – cette situation nuit considérablement au nécessaire turnover des locataires et possède en lui un effet anti-redistributif. Depuis, la loi Molle de 2009, des mécanismes de supplément de loyer (dits SLS) s’appliquent pour les ménages ayant un revenu supérieur à 20% au plafond. Cette disposition permet donc une progressivité du loyer. Cependant, on peut s’interroger sur la pertinence de ces 20% et imaginer une progressivité dès le premier euro de revenu supplémentaire. De plus, les ménages dépassant de plus de deux fois le plafond de ressources doivent quitter les lieux dans un délai de quatre ans. Les premiers effets de cette mesure devraient se faire sentir en 2015, mais avec un effet limité (0,4 % du parc, soit près 10 000 logements). De même, le niveau de ressource « deux fois supérieur » et la durée de quatre ans peuvent paraître abusifs compte tenu de la forte demande de logement social. Pour le logement social, l’instauration de baux renouvelables sous conditions de ressources paraît pertinente. Par ailleurs, des mesures simples et peu coûteuses peuvent être prises pour améliorer la mobilité interne des locataires de HLM. Alors que selon le CREDOC, 11 % des individus en recherche d’emploi déclarent avoir renoncé au cours des cinq dernières années à un emploi à cause du surcoût financier provoqué par le déménagement, il n’existe pas de dispositif « d’échanges ». Un ménage qui veut déménager dans un autre HLM doit rejoindre la liste d’attente générale si bien que sa mobilité est découragée.

B L’encadrement des loyers risque de contracter l’offre.

En France les derniers exemples d’encadrement des loyers se sont soldés par des échecs : en 1982, l'application de la loi Quillot a entraîné une chute de la construction de 35% ; en 1989, le blocage des loyers à la relocation a de nouveau été pratiqué mais son application n'a duré que 4 ans du fait d’une contraction de l’offre. Bien qu’il soit trop tôt pour juger de l’expérimentation d’encadrement des loyers à Paris institué par la loi Alur (l’expérimentation a débuté en août), cette mesure pourrait constituer un mauvais signal auprès des investisseurs, qui risqueraient de voir le rendement locatif décroitre. Même si la mesure paraît favorable aux locataires, elle pourrait se révéler néfaste du fait d’une baisse éventuelle de l’investissement locatif ou de la rétention des biens sur le marché officielle. Un encadrement trop strict peut voir l’émergence d’un marché parallèle comme ce fut le cas en 1982.

L’idée de la loi Alur

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