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Liberté contractuelle et contrôle du juge

Par   •  17 Novembre 2018  •  7 405 Mots (30 Pages)  •  539 Vues

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B.L’exégèse des clauses

Outre la qualification du contrat, le juge peut également interpréter le contenu du contrat. Pour que la volonté des parties s’impose au juge, celle-ci doit être claire et sans ambigüité. Il convient donc de se demander à quel moment un contrat devient obscur, à partir de quel moment les clauses sont ambigües. Cette question est une question de fait, qui reste donc à l’appréciation souveraine du juge. Le rôle d’interprète du juge est strictement encadré par des règles légales d’interprétation, prévues dans le code civil aux articles 1156 à 1164. L’article 1156 du code civil rappelle le principe fondamental de l’interprétation légale : l‘esprit l’emporte sur la lettre. Le juge va également devoir apprécier les clauses, les unes par rapport aux autres, et leur redonner le sens nécessaire à leur exécution. En effet, il peut arriver que, selon le sens donné à la clause, celle-ci ne puisse plus s’appliquer. Grace à cette interprétation des clauses, le juge va pouvoir éliminer toute contradiction dans la convention et ainsi valoriser ses effets. Il doit donc préférer une interprétation globale du contrat à une interprétation fragmenté. Cette position tend à se confirmer avec l’admission de la notion d’économie du contrat. En effet, la Cour de cassation a de plus en plus tendance à prendre en considération la notion d’économie du contrat. Par là, elle consacre une vision plus globale du contrat permettant de déterminer l’utilité des clauses et leurs effets plus facilement.

b : L’interprétation créatrice d’obligation

Face au contrat, le juge va parfois dégager des obligations qui n’ont pas été prévues par les parties dans le contrat, mais qui sont pourtant logiquement rattachables à l’objet de celui-ci. Forçant le silence du contrat, le juge va imposer de nouvelles obligations aux parties (A). Ce pouvoir créateur reste cependant sous le contrôle de la Cour de cassation qui veille à ce que le contrat ne soit pas dénaturé (B).

A-Le forçage du contrat

Outre l’interprétation permettant d’éclaircir le contrat et ainsi d’en faciliter la compréhension, le juge peut également être un interprète créateur d’obligations nouvelles, découlant du contrat. L’article 1160 du code civil dispose que l’on doit suppléer dans le contrat les clauses qui y sont d’usage, même si celles-ci n’ont pas été mentionnées dans la convention. Cet article reprend les idées développées dans l’article 1135 du code civil qui rappelle que les parties à la convention sont soumises aux obligations crées par la convention mais également aux obligations découlant de l’équité, l’usage et la loi. Ainsi, le juge va pouvoir se référencer à l’équité, la bonne foi, la loyauté dans le contrat pour établir certaines obligations non mentionnées dans la convention, et qui sont pourtant nécessaire à sa bonne exécution. Cette technique là a été qualifiée de « forçage » par Josserand car le juge va forcer les parties à exécuter certaines obligations qu’elles n’avaient pas prévues. Le forçage du contrat par le juge a ainsi permis de dégager plusieurs obligations s’imposant aux contractants même si ceux là ne l’avaient pas prévue. Ce fut notamment le cas pour l’obligation de sécurité, découverte dans un arrêt de 1911. Un transporteur marseillais était mis en cause après les dommages subis par une passagère durant la traversée. La Cour avait alors déclaré que le transporteur était soumis à une obligation de sécurité durant la traversée. Cette obligation a depuis été reprise dans les contrats pouvant atteindre à la sécurité des personnes.

L’obligation d’information a également été dégagée grâce à la méthode du forçage. Dans un premier temps, c’est une obligation d’information qui a été mise à la charge du vendeur, d’informer l’acheteur, notamment sur la chose vendue. Mais cette obligation n’a eu de cesse de s’étendre et concerne désormais tout les professionnels à l’encontre des non-professionnels, et même à l’encontre du professionnel qui ne possède pas les compétences nécessaires pour connaitre la chose vendue. Dans ce domaine, le juge a souvent précédé le législateur en déduisant cette obligation de la notion de bonne foi posée par l’article 1134 du code civil. En effet, si le législateur a précisé les contours de l’obligation d’information concernant les contrats de consommation, c’est la jurisprudence qui a dégagé les principaux axes de l’obligation d’information aussi bien dans son contenu que dans son application. Les juges ont également dégagé un devoir de conseil pour les professionnels tels que les banquiers, les assureurs ou encore les professionnels du droit tels que les notaires ou les avocats. Les informations doivent être nécessaires, de natures pertinentes et exactes. L’obligation d’information a une nature particulière puisque la Cour de cassation a par ailleurs décidé que la preuve de cette obligation pesait sur le débiteur de l’obligation, le professionnel. Le juge peut donc faire peser à la charge de l’une ou l’autre des parties des obligations considérablement importante. L’intangibilité de la force obligatoire du contrat, s’imposant en tant que loi des parties, est donc remise en cause. A travers la technique du forçage, le juge s’impose réellement et bouleverse l’équilibre du contrat. Le contrôle de la Cour de cassation est alors indispensable pour limiter le pouvoir du juge et éviter le foisonnement d’obligations créées de toute pièce par l’imaginaire des juges.

B-Le contrôle de la Cour de cassation

La question s’est posée de savoir si l’interprétation était une question de droit ou de fait. Dans un arrêt de la Cour de cassation du 2 février 1808, la Cour a expressément reconnu que le pouvoir d’interpréter le contenu du contrat appartenait aux juges du fond qui l’exercent de manière souveraine. Cette solution s’explique en raison de la mission pour laquelle la Cour de cassation a été institué : maintenir l’unité de la loi, en harmonisant la jurisprudence. Or le contrat, en raison de l’autonomie des parties, est une unité particulière, différente de celle de la loi. Son contrôle ne rentre donc pas dans les attributions de la Cour de cassation. De plus, l’interprétation suppose une recherche de la volonté des parties, donc une recherche d’éléments de fait. Cette enquête relève du pouvoir d’investigation des juges du fond, la Cour de cassation ne pouvant se prononcer sur le fond

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