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Préjugés cas

Par   •  16 Mai 2018  •  1 713 Mots (7 Pages)  •  431 Vues

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où l’instruction serait dispensée en tenant compte des progrès des connaissances rationnelles. Les facultés doivent être développés selon leur importance respective. La mémoire est indispensable, mais elle doit rester une faculté subordonnée au service de la raison, qui discerne des principes, et du jugement, qui s’efforce d’évaluer correctement le réel en fonction d’eux. Dans l’Émile, Rousseau propose une expérience intéressante. Il imagine un enfant gravissant une montagne avec son précepteur pour voir le soleil se lever, et il demande expressément que le maître ne parle pas mais laisse l’enfant ressentir la beauté sublime du spectacle. Il ne s’agit pas de rejeter les mots, mais de faire en sorte qu’ils ne précèdent pas les sentiments, afin que ceuxci ne soient pas d’emblée recouverts par une perception intellectuelle dont l’enfant n’est pas encore capable. Il faut donc ici le laisser juger par luimême afin que les mots ne préjugent pas pour lui de ce qu’il voit. Par-delà leurs différences, Rousseau et Kant sont chacun attentifs à élever l’esprit dans le but qu’il développe sa puissance. La culture doit remplacer l’ignorance et les faux savoirs.

[Transition] L’éducation est-elle le remède pour venir à bout des préjugés ? Il nous semble que ce processus est lui-même problématique.

3. Le statut du préjugé A. Une nécessaire imperfection ? Kant fait remarquer que l’homme est fait d’un bois si courbe qu’il est impossible d’espérer y tailler quelque chose de tout à fait droit. Or cette nécessaire imperfection de l’être humain a de lourdes conséquences sur la question de l’éducation. L’éducateur ne peut être parfait puisqu’il fut luimême éduqué par une personne qui ne l’était pas non plus. Kant s’efforce de déterminer les conditions d’un progrès permanent dans la lutte contre les préjugés politiques, religieux et sociaux, mais il sait que ce processus nous engage sur la voie d’un combat sans fin. Certes, cette entreprise n’est pas insensée. Il est indispensable que l’ignorance recule pour que la bêtise et la haine ne triomphent pas. Mais les préjugés ne semblent pouvoir être que réduits, jamais totalement éliminés. La logique des États, le poids des idéologies exprime des d’intérêts qui rendent très problématiques l’accès de l’humanité à une véritable autonomie. B. La place du présupposé Mais ce qu’une collectivité ne peut faire est peut être possible à un individu isolé. Dans les Méditations métaphysiques, Descartes se propose de « commencer tout de nouveau depuis les fondements » afin de parvenir à une vérité absolue dans les sciences. Descartes est conscient qu’il est impossible de réfuter une à une toutes les opinions admises au cours de sa vie sans vérification préalable. Les préjugés sont semblables à l’hydre de Lerne, ce monstre dont les têtes se multipliaient au fur et à mesure qu’on les tranchait. Ne faut-il pas alors procéder comme Hercule, qui la vainquit en coupant toutes les têtes d’un seul coup ? En clair, une démarche qui veut « en finir » doit être radicale, et donc prendre le problème à la racine. La mise en œuvre d’un doute méthodique qui décompose l’origine de toutes ses pensées permet à Descartes de parvenir à une vérité indubitable qu’il saisit dans une intuition intellectuelle : « je suis, j’existe » ou « je pense, donc je suis. » Tout est douteux excepté le fait d’être un sujet pensant. Il semble que la radicalité cartésienne nous ouvre une voie. Terminons cependant en notant que les préjugés occupent une place remarquable. Ils sont le commencement inéluctable de toute pensée. Ne faut-il pas alors les considérer comme des présupposés inévitables ? Chacun ne peut s’exercer sa raison qu’à partir de ce qu’on lui a inculqué. Dès lors, il est possible de reconnaître aux préjugés un statut qui ne soit pas entièrement négatif, pourvu qu’on sache les penser. Nous commençons toujours par avoir des opinions sans pouvoir les fonder par nous-même. La conscience rationnelle ne peut s’éveiller qu’à partir de son contraire, qui la précède temporellement. L’essentiel est de lui donner l’occasion de cet éveil. C’est en ce sens que Platon définit la philosophie comme « la fille de l’étonnement. » S’étonner, c’est rompre le cours de nos pensées habituelles, irréfléchies, et se disposer ainsi à chercher par soi-même, en s’instruisant, à découvrir la valeur de ce que nous jugions vrai ou faux, juste ou injuste.

Conclusion Il est nécessaire de critiquer les préjugés pour essayer de penser par soimême et d’être ainsi à la hauteur de notre statut d’être doté de raison. L’autonomie du jugement est une valeur éminente qui demande des analyses instruites. Toutefois, la réalisation de ce principe nous a fait voir le caractère problématique, bien qu’indispensable, de l’éducation, ainsi que la complexité du préjugé qui est aussi le présupposé de toute pensée qui le nie. L’expression « en finir avec » reçoit donc un double sens. Nous dirons que nous devons tâcher de dépasser nos préjugés, c’est-à-dire de les comprendre. Mais leur élimination totale semble ne pas tenir compte de la fonction nécessaire d’un présupposé. Même Descartes le reconnaît en écrivant que « nous avons été enfants avant que d’être hommes ». Le préjugé nous rappelle ainsi la limitation de notre condition et le

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