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La science et le réel

Par   •  21 Juin 2018  •  2 033 Mots (9 Pages)  •  382 Vues

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Seulement la connaissance scientifique nuit le réel qu’elle cherche à connaître. La science moderne se constitue au profit d’une abstraction qui substitue au monde ''réel'' un monde purement ''idéal''. En effet nous avons vu que l’idéal de la science est de parvenir à poser des relations objectives, à représenter, dévoiler le réel loin de nos existences personnelles. Seulement, la perception, selon Bachelard, nous révèle un monde qualitatif : un entremêlement complexes de sons, de couleurs, d’odeurs qui constituent ce que l’on nomme des qualités sensibles. Elle nous fait découvrir un univers divers et hétérogène, constitué par des êtres distincts et pluriels. Il montre alors que la connaissance scientifique transforme les qualités perçues en quantité. C'est par l’avènement de la mesure, que le scientifique substitue, par exemple, à l'expérience sonore les vibrations d'ondes mécaniques de fréquence variable et mesurable. Puis, là où l’observation immédiate voyait des êtres, la science, elle, se contente de reconnaître des rapports, par exemple le marbre n’est pas froid en lui-même mais il est conductible ou encore le poids dépend du champ de gravitation. Ainsi à la diversité empirique, la science substitue l’unification rationnelle. Plus la connaissance scientifique progresse, plus elle tend à s’éloigner du fait brut, c’est-à-dire du fait tel qu’il est donné à la perception vulgaire. Au monde perçu, la science remplace un monde “construit”. La science élabore une reconstruction, où la réalité est excessivement objectivée. Par exemple lorsqu'on fait en mécanique, la théorie des machines simples, on suppose l'existence de machines idéales. Dans la théorie de la catapulte, on émet une catapulte qui subit aucuns frottements sur son axe. La théorie simplifie, ou néglige certains éléments du réel. Il existe alors un décalage entre la théorie et la pratique : ''ce qui est vrai en théorie n'est pas toujours vrai en pratique''. La pratique, qui est au contact du réel ne doit en aucun cas mépriser sa complexité. L'architecte devra calculer la résistance de ses matériaux en tenant compte de leur imperfections, de la charge à supporter. Ou encore le médecin doit avoir égard à l'âge, au tempérament individuel de son malade, à l'état de ses organes et à son état général. L'idéal scientifique cherche à s'imposer universellement en dépouillant le réel de ses qualités sensibles et en le soumettant à des ''lois causales''. Ainsi la science peut apparaître comme une ''représentation'' du réel qui a éliminé toute la dimension qualitative. La science d'une certaine manière vient figer la vie dans une conceptualisation mathématique. Les déplacements sont perçus comme un ensemble d'équations, la vitesse devient le rapport entre la distance et le temps. Le monde réel se transforme en un monde d'Idées. Les essences intelligibles, immuables deviennent les archétypes des choses sensibles.

Cependant, ces pratiques croissantes nous pousse à croire que la connaissance scientifique n’est aucunement une contemplation désintéressée de la nature et du réel, ce qu’elle était autrefois pour les grecs, mais qu’elle est commandée par une volonté de domination. La connaissance scientifique implique une rupture de la compréhension du monde tel qu’il se donne. Heidegger montre que la connaissance qu'à la science du réel, ne répond pas à une volonté de connaître le réel mais à une volonté d’arraisonner le réel, de le soumettre au principe de raison. L’objectivité scientifique, qui constitue son indice de vérité, n’est pas la réel vrai, mais c’est le produit d’une abstraction. En effet en réduisant la réalité à sa représentation objectivée, la science tend à la rendre parfaitement transparente pour la pensée calculante. L’homme peut désormais ''dominer'' cette réalité, le réel devient prévisible, et par conséquent aussi manipulable. L'exemple des probabilités et des statistiques illustre parfaitement cette volonté de l'homme à vouloir avoir un ascendant sur le hasard. Par un ensemble de raisonnements mathématiques il cherche à contrôler et prévoir le réel, c'est à dire la fréquence d’occurrence d'un événement. C'est en ce sens que Nietzsche souligne, dans Humain trop humain, que la science ne se contente pas de refléter passivement le réel. En s’efforçant de dégager des lois dans la succession des phénomènes, elle les soumet à une volonté d’agir. L'homme pourrait voir en la science l'existence d'un véritable outil qui lui permettrait de régulariser, d'ordonner le ''chaos'' du ''monde'' pour s'adapter à son environnement. La connaissance n'est plus une fin en soi. Elle n'est plus un savoir pour savoir mais pour pouvoir. L'homme va pouvoir l'utiliser à des fins pratiques et elle va ''nous rendre comme maîtres et possesseurs de la Nature'' écrit Descartes dans Discours de la méthode. Le pouvoir conféré par la connaissance permet à l'homme de se libérer des puissances d'asservissements et de maîtriser ce qui a commencé par disposer de lui. Il est alors nécessaire de comprendre que ce qui suppose l'usage des moyens techniques doit être réglé par de véritables choix éthiques : une réalité non évidente que l'Histoire nous illustre constamment. Ainsi la science n'est pas un ensemble de connaissances neutres qui vise à expliquer le réel. Elle devient une connaissance au service de l'homme.

Ainsi, défendre le réalisme scientifique, c'est défendre la volonté de la connaissance à livrer le réel. La science essaierait de connaître les choses en soi, et jusqu'à un certain point il est possible de dire qu'elle y parvient. Cependant la difficulté, comme l'explique Bouveresse, est que l'homme à l'impression qu'il y a deux réalités : la réalité scientifique et la réalité que nous expérimentons dans la relation sensible que nous envisageons avec l'environnement. Face à la complexité du réel, le scientifique ne peut échapper à son désir d'objectivité. Le conduisant inévitablement à réaliser des abstractions, à omettre certaines réalités. La science ne livre plus le réel tel qui l'est mais tend à le transformer en ''représentation''. Cette mise à distance créer un nouveau rapport entre la science et le réel. Elle peut laisser présager une relation de domination et de soumission. Le

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