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L'Avare, Acte IV, scène 7, Molière

Par   •  18 Août 2018  •  1 732 Mots (7 Pages)  •  2 297 Vues

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b) L’irruption du tragique

En effet, si le délire d’Harpagon et l’amour qu’il porte à sa cassette sont franchement comiques, la détresse du personnage colore cet extrait d’une tonalité tragique…et le rire du spectateur n’est pas exempt d’une certaine gravité. Si la folie de l’autre peut faire sourire, elle est également inquiétante. Dépossédé de son bien, c’est également, nous l’avons vu, un homme dépossédé de lui-même qui s’agite sur scène. Le malaise ressenti par le spectateur est provoqué par la forte présence des champs lexicaux de la mort et de la torture qui relèvent du registre tragique : « meurtrier », « on m’a coupé la gorge », « je suis mort », « impossible de vivre », « faire donner la question », « potences et des bourreaux », « pendre », « je me prendrai moi-même ». Ce dernier verbe, mis en valeur par l’intermédiaire d’un polyptote, évoque une image violente – mettre à mort quelqu’un en le suspendant par le cou au moyen d’une lanière, d’une corde -. Quant à l’insistance sur la première personne, qui se réalise à travers le pronom « me » et sa reprise sous la forme accentuée « moi », renforcée par l’adverbe « même », elle laisse entendre que la folie meurtrière d’Harpagon pourrait s’exercer contre lui-même.

c) La prise à parti du spectateur

La violence inattendue qui parcourt cet extrait, alliée à l’abolition temporaire de la frontière entre la scène et la salle, montre au spectateur l’étendue de la folie d’Harpagon et l’amène à s’interroger. Tel est bien l’objectif que Molière assigne à ses comédies, car selon lui, « rien ne reprend mieux les hommes que la peinture de leurs défauts ». La prise à parti du spectateur s’illustre de manière exemplaire puisque le quatrième mur est brisé à plusieurs reprises. La phrase exclamative « Que de gens assemblés ! » désigne le public qu’Harpagon inclut dans son délire de persécution, lorsqu’il affirme « [qu’il] ne jette [s]es regards sur personne, qui ne [lui] donne des soupçons », le passage de la scène à la salle se réalise grâce au verbe « jeter » qui sous-entend un mouvement vers l’avant. Puis Harpagon pose des questions et l’on peut considérer que le destinataire est le public : « Quel bruit fait-on là-haut ? », « Est-ce mon voleur qui y est ? », « de quoi est-ce qu’on parle là ? ». En effet, les adverbes « là-haut », « y » et « là », ne sont compréhensibles qu’en référence à la situation d’énonciation et renvoient donc à l’espace de la salle. De même, les pronoms personnels « vous », « que dites-vous ? », « ils » (renforcé par le pronom « tous »), « Ils me regardent tous et se mettent à rire » décrivent l’attitude des spectateurs riant de la folie d’Harpagon. Ce procédé dédouble l’effet comique de la scène. Toutefois, ce jeu avec le public instauré par le dramaturge oscille entre le rire », «Ils (…) se mettent à rire », et l’inquiétude, car Harpagon menace de « faire pendre tout le monde ». Cette ambivalence, ce jeu avec les frontières et les registres conduisent le spectateur à s’interroger sur les dérives auxquelles la « passion de posséder » peut conduire.

Conclusion :

Une scène qui allie avec brio les codes du registre tragique aux effets comiques les plus puissants. Molière donne à voir toute la folie du personnage dans un monologue où les ruptures dans le jeu (prise à parti du spectateur) sont nombreuses et assumées.

Molière dénonce un travers de ses contemporains (toujours d’actualité) : la passion de posséder, la passion de l’argent (un travers à son époque typiquement bourgeois) qui peut conduire à la folie.

Définition :

Monologue : Il y a monologue quand l’acteur seul en scène parle au public ou à lui-même. Le monologue nous permet de connaître les pensées, les intentions, les sentiments d’un personnage. Il est la pensée verbalisée

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