Les violences conjugales cas
Par Matt • 4 Avril 2018 • 6 044 Mots (25 Pages) • 518 Vues
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II/ Les violences conjugales et les normes sociétales
J’ai choisi de traiter ce volet en trois points bien distincts. Dans un premier temps, je développerai d’une manière générale, la violence conjugale en m’appuyant sur des exemples vécus lors de mon stage. Dans un second temps, j’aborderai les législations appliquées notamment dans les pays du Moyen-Orient. Enfin, je terminerai, en évoquant l’impact des normes sociétales subies par ces femmes victimes de violences conjugales.
- Les violences conjugales
La notion de violences comporte plusieurs dimensions, d’après Hanna Arendt[1] « la violence est un moyen utilisé pour assurer le pouvoir sur l’autre. Il s’agit d’un rapport de force dans lequel l’un est sujet, l’autre objet ». En ce qui concerne les violences conjugales, l’ONU[2] définit la violence faite aux femmes comme : « tout acte de violence fondé sur l’appartenance au sexe féminin, causant ou susceptible de causer aux femmes des dommages ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, et comprenant la menace de tels actes, la contrainte ou la privation de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée . » La violence[3] au sein du couple est un processus évolutif, identifiable et cyclique. Ce cycle, est mis en place et orchestré par l’agresseur, il permet à celui-ci de maintenir son emprise sur sa victime.
Tout au long de mon stage, j’ai pu assister à différents entretiens auprès de femmes victimes de violences conjugales. Leur récit m’a percuté et j’ai ainsi pu mesurer l’ampleur des violences que ces femmes subissent. Certaines sont humiliées et harcelées moralement, d’autres sont battues pour une raison des fois inconnue.
Une femme me raconte « Nos disputes se faisaient de plus en plus violentes, et je commençais à me sentir vraiment humiliée. Détestant faire la vaisselle, il trouvait souvent une raison de m’en vouloir lorsque c’était son tour ; il m’est arrivé plus d’une fois de recevoir l’éponge sale en plein visage pour avoir osé le contredire. Pour des motifs toujours anodins, la violence montait : j’ai reçu son portefeuille en plein visage, il m’a un jour fouetté le visage avec un t-shirt mouillé, assez fort pour casser mes lunettes. Des coups de pied dans le dos (il faisait particulièrement attention à ne laisser aucune marque visible) m’ont fait mal pendant plusieurs jours. A chaque fois, il se confondait en excuses, en promesses, et j’y croyais. C’était une violence invisible, mentale et physique, qui me rendait malade. Je n’étais plus heureuse, ni joyeuse, comme je l’étais avant ».
Une autre dame me raconte : ‘Au bout de trois, quatre mois, ça a commencé à se dégrader, il a commencé à me maltraiter, puis à m’obliger à faire ce qu’il voulait. Il voulait absolument avoir des relations sexuelles même si moi je ne voulais pas, il s’est mis à me violer ».
Comment une femme peut-elle accepter de telles violences ? Pourquoi reste-t-elle à son domicile ? Je me suis rendue compte, d’après ces deux entretiens, que la première était prête pour entamer une procédure, je l’ai donc orienté au Centre d’Information des Droits de la Femme, association qui se trouve sur Valence. La deuxième n’était pas dans cette démarche, alors dans ce cas-là quels sont les moyens que nous, travailleurs sociaux pouvons-nous mettre en place pour accompagner au mieux cette personne ? Comment supporter moralement de recevoir régulièrement cette dame tout en sachant les graves violences qu’elle subit ? J’ai trouvé une citation qui dit « Le danger existe quand la femme adopte cette image de dominée et quand elle accepte sa position et la situation d’humiliation »[4], quel sens prend donc notre accompagnement ? Est-ce réellement de notre domaine de compétence?
2.2 Du point de vue de la législation
Dans les pays du Moyen-Orient, les femmes ne bénéficient pas pleinement de leur citoyenneté civile. Elles sont notamment spoliées de droits. Des lois inéquitables, des constitutions discriminatoires et des préjugés culturels, qui ne les reconnaissent pas comme des citoyennes égales, entravent leurs participations à la vie politique et limitent leur sécurité en matière économique, de mobilité et de protection sociale.
« Dans de nombreux cas, les lois et les codes des pays de cette région du monde contribuent à renforcer les inégalités de genre et à exclure les femmes. Il arrive aussi que l’Etat intensifie le contrôle religieux et familial à leur égard, les rendant encore plus dépendantes de ces institutions.» (Nepton, 2003, in citoyennes de seconde zone). A la différence du contexte occidental, comme en France par exemple, où l’individu est l’unité de base du système de la structure sociale, c’est la famille qui forme la base des structures sociales arabes. Ceci signifie que l’Etat s’intéresse avant tout à la protection de la famille en tant qu’entité plutôt qu’à celle de ses membres pris individuellement. Dans ce contexte, les droits des femmes s’expriment uniquement dans le rôle d’épouse et de mère. Alors que l’Etat se pose en garant de la protection des femmes dans le cadre de leur rôle au sein de la famille, cette protection fait défaut en matière de violence conjugale.[5]
Je souhaiterais illustrer ces propos avec l’accompagnement d’une femme venue du Liban et arrivée en France avec son mari et ses deux enfants depuis six mois. Madame avait appris le Français dans son pays, elle avait été à l’école et s’exprimait clairement. Quand je suis arrivée sur mon lieu de stage ma référente suivait cette dame de façon très régulière, une fois par semaine, depuis deux mois. Malgré les sollicitations de l’assistante sociale pour rencontrer Monsieur, celui-ci ne s’est jamais présenté à un rendez-vous. Au début l’accompagnement a débuté car Madame souhaitait connaître les démarches à effectuer pour acquérir un logement ainsi que les aides financières possibles. En effet, cette famille logeait depuis son arrivée sur le territoire chez un couple d’ami. Monsieur avait trouvé un emploi et avec Madame ils souhaitaient maintenant avoir leur propre logement. Ma référente a donc effectué des démarches pour le logement et pour des aides financières. Elle poursuivait l’accompagnement sur le plan budgétaire et entreprenait des démarches administratives pour l’accès à la couverture maladie universelle, à une mutuelle santé, etc. Ma référente avait des doutes quant à une éventuelle violence conjugale à l’égard de Madame.
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