Cours sur le bonheur.
Par Matt • 23 Mai 2018 • 1 444 Mots (6 Pages) • 641 Vues
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Un autre argument tend à montrer que le plaisir peut être à l’origine de malheur, en effet le plaisir est souvent associé au corps et non à notre âme, par conséquent, l’homme qui se réduit à ne satisfaire que ses plaisirs superflus perd quelque chose de son âme au profit de réjouissances qui ne sont que matérielles et éphémères.
A la différence des plaisirs qui sont éphémères, il existe un état, qui lui est permanent : la joie.
La joie dure, la béatitude est éternelle
La « vie heureuse » va prendre une nouvelle signification. La vie de plaisirs a une dimension physiologique, le plaisir étant la satisfaction d'une excitation nerveuse rythmée par des phases successives de tension et de détente. Il suit une courbe sinusoïdale que le héros esthéticien transforme en conception de l'existence. La vie heureuse, elle, va s'imaginer pour le moins dans la durée. Elle prend d'abord, avec Spinoza, le nom de « félicité ». Le but de la philosophie, qui est une « méditation de la vie », est la recherche d'un bien véritable capable de procurer une joie souveraine et permanente. L'Éthique démontre que l'homme n'est pas une âme liée à un corps mais un être unitaire que l'on peut comprendre selon deux aspects : dès lors, l'unité de l'être humain, c'est le désir, c'est-à-dire l'effort qu'éprouve tout vivant de persévérer dans son être. Ce que le désir poursuit, c'est l'accroissement de cette puissance intérieure d'exister, ce que Spinoza nomme la joie. La joie est cette dilatation de l'être humain qui comprend ce qu'il est, c'est-à-dire ce qui le détermine réellement et lui permet ainsi de se délivrer de toutes les superstitions qui ne lui parlaient que de malheurs. Elle correspond au moment où l'être humain comprend (ce verbe est à prendre alors au sens le plus fort : « prendre avec soi », « ne faire plus qu'un ») qu'il est un « être pour le bonheur », que sa nature est joie. La félicité, le bonheur n'est donc dans un premier temps que l'affirmation du désir, l'accès à la joie. Mais le désir a besoin, pour éviter de tomber dans la servitude souvent conflictuelle des passions, de se « libérer » par un travail de réflexion grâce auquel il pourra gagner une autonomie réelle : en se connaissant lui-même pour ce qu'il est, l'être humain peut alors accéder à la joie de la connaissance. Cette joie est bonheur en ce qu'elle nous permet de comprendre en quoi notre « être de désir » coïncide avec la nature à laquelle nous appartenons. Elle deviendra « béatitude » en devenant un sentiment si intense qu'il nous permet de nous rencontrer nous-mêmes sub specie aeternitatae, sous l'aspect de l'éternité.
Conclusion
Résumons… Le plaisir, c'est l'instant ; le bonheur, la durée ; la béatitude, l'éternité. Une vie de plaisirs a une dimension physiologique. Le bonheur y est peut-être possible, mais plutôt dans son sens étymologique, une « bonne chance ». Une vie heureuse suppose une conception choisie de l'existence par celui qui doit la vivre, sans garantie pour autant de réussite, mais au moins dans un engagement raisonnable, il faut choisir entre vie de plaisirs et vie heureuse. Enfin, le bonheur peut devenir une dimension par laquelle l'être humain réalise tout ce qu'il est, donc ce qu'il peut être, comme but ultime de lui-même ; il devient son propre but et sort ainsi des limites du temps. Comme idéal de sagesse, la béatitude nous ouvre soit à l'immortalité (Platon), soit à l'éternité. En ce sens donc, la vie heureuse n'est pas une existence de plaisirs. La vie heureuse est celle qui réalise intérieurement ce qu'elle a compris pouvoir être, sans soumission aux caprices des modes de l'instant. La vie de plaisirs se condamne sans fin à de l'insatisfaction. Le tonneau des Danaïdes, comme le prédisait Gorgias ?
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