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Les empêchements à mariage en droit français sont-ils encore justifiés ?

Par   •  14 Janvier 2018  •  1 994 Mots (8 Pages)  •  692 Vues

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Dans le cas de la bigamie – et en omettant les exceptions ci-avant mentionnées relatives à la reconnaissance de mariages non-célébrés en France et à la validité d’un second mariage dans le cas où le premier est annulé – la jurisprudence est tout autant claire en ce qui concerne les mariages célébrés en France. Un arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation considère que « l'état de bigamie[,] contraire à l'ordre public français[,] constitue une cause de nullité absolue de la seconde union qui entraine l'annulation de cette union de son origine »[2]. La Cour de cassation affirme ici qu’une personne ayant contracté un second mariage sans avoir dissout le premier au préalable ne saurait régulariser le second en dissolvant le premier a posteriori. De plus, l’arrêt de la même chambre du 3 février 2004 va encore plus loin. Il considère que la contraction de deux mariages par les mêmes époux, en l’occurrence au Zaïre et en France, peut être l’objet d’une annulation du second mariage, dans la mesure où elle viole l’article 147, disposant qu’« on ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier ». Il n’est nullement question dans cet article que les époux doivent être différemment unis.

Néanmoins, si les liens de sang et la bigamie constituent des empêchements continus entraînant nullité, certains autres peuvent faire l’objet de dérogations et ne pas faire l’objet d’une annulation a posteriori.

II – Des empêchements prohibitifs et relatifs

Les empêchements prohibitifs, qui ne constituent pas une cause de nullité, semblent pour leur part de plus en plus malléables. Ces empêchements s’accompagnent des empêchements relatifs, empêchements qui font l’objet de dérogations par la loi. Ces empêchements apparaissent bien moins vivaces que ceux de l’inceste et de la polygamie, dans la mesure où seule la loi la réprimande. Ces empêchements sont donc tout d’abord modérés par la loi (A), et relativisés par la jurisprudence (B).

A – Des empêchements modérés par la loi

Au sens canon des empêchements, l’âge, la capacité, les liens de sang et la publicité peuvent être l’objet d’empêchements à mariage. Ces derniers sont néanmoins prohibitifs et relatifs par leur caractère plus juridique que sociétal. Dans le cas de l’âge, l’article 144 du Code civil fixe l’âge minimum des futurs époux à 18 ans et ce depuis 2006. L’ancienne rédaction faisant état de la maturité des femmes et leur accordant le mariage à partir de 15 ans. En principe donc, personne ne peut contracter mariage avant sa majorité. Pourtant, les articles 145 et 148 à 150 prévoient des dérogations. En effet, les parents des futurs époux, s’ils donnent leur accord à l’union (accord régit par les articles 148 à 150), peuvent saisir le procureur de la République pour obtenir une dispense pour des motifs graves ; dérogation prévue à l’article 145.

Concernant la capacité, l’article 460 encadre l’union de futurs époux sous tutelle ou curatelle. Dans le cas d’une curatelle, l’avis du curateur, ou à défaut celui du juge, est requis. Dans celui de la tutelle, l’autorisation du juge ou du conseil de famille est demandée ; les parents et l’entourage peuvent également être sollicités. En principe donc, le mariage d’une personne incapable est interdit. Seule l’autorisation des personnes compétentes peut débloquer la situation.

L’interdiction d’inceste ensuite, telle qu’elle est régie par l’article 163 entre les oncles et nièces, les tantes et neveux etc., fait l’objet d’une possible dérogation du Président de la République à l’article 164. Ainsi ce dernier dispose-t-il qu’ « il est loisible au Président de la République de lever, pour des causes graves, les prohibitions portées : (…) 3° par l’article 163 ». L’empêchement pour liens de sang semble donc tout relatif lorsqu’il touche les oncles et nièces, les tantes et neveux, etc.

Enfin, la publicité des bans. Empêchement négligeable régit par l’article 63 du Code civil, il fait l’objet d’une dérogation à l’article 169 du même Code. Ce dernier donne au procureur de la République le pouvoir de dispenser les futurs époux de l’obligation de la publicité des bans.

Si la loi semble contenir en elle-même quelques dérogations, les juges accordent eux-aussi que quelques exceptions soient faites.

B – Des empêchements relativisés par la jurisprudence

Les empêchements prévus par le Code civil font également l’objet de quelques aménagements par les juges, parmi lesquels : les liens d’alliance et, à moins forte raison, la bigamie entre époux étrangers. Les prérogatives du Président de la République ont d’ailleurs aussi été la cause de débats entre instances.

Dans les cas d’alliance tout d’abord, l’article 161 qui prohibe le mariage entre alliés a été nuancé par la jurisprudence avec un arrêt en date du 13 septembre 2005, rendu par la Cour européenne des droits de l’Homme contre le Royaume-Uni. Celui-ci considérait que les conditions imposées aux futurs époux pour se marier ne devaient pas être si lourds et si coûteux que la liberté de mariage s’en trouverait altérée. Bien qu’attenant au système anglais, cet arrêt peut tout aussi bien concerner la France, dans la mesure où les deux procédures de dérogation pour mariage entre alliés sont peu ou prou similaires. Ainsi l’article 164 du Code civil dispose-t-il qu’ « il est loisible au Président de la République de lever, pour des causes graves, les prohibitions portées : 1° par l’article 161 aux mariages entre alliés en ligne directe lorsque la personne qui a créé l’alliance est décédée ». Les magistrats n’ont d’ailleurs pas invalidé un mariage entre un homme et sa bru après que le fils de celui-ci est intenté une action aux fins d’annuler le mariage. La 1ère chambre civile de la Cour de cassation a relevé le 4 décembre 2013[3] que cette demande avait été formulée 22 ans après la formation du mariage, et que si cette union avait posé un problème, il ne pouvait plus être réparé aussi tard.

En outre, la bigamie a été autorisée par la jurisprudence dans un cas précis, qui finalement regarde moins le droit interne que le droit international. Le 14 juin 1995, la Cour d’appel de Paris a considéré que pouvaient être reconnus les mariages bigames, à la seule condition qu’ils fussent contractés à l’étranger et par deux époux dont les lois nationales

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