Essays.club - Dissertations, travaux de recherche, examens, fiches de lecture, BAC, notes de recherche et mémoires
Recherche

Cassation, Assemblée plénière, 15 avril 2011

Par   •  22 Août 2018  •  1 966 Mots (8 Pages)  •  457 Vues

Page 1 sur 8

...

Droits de l’Homme.

Les différentes décisions de la Cour de cassation et celle du Conseil constitutionnel rendent la présence de l’avocat obligatoire dès le début de la garde à vue. Ceci n’avait pas été mis en œuvre dans la procédure en l’espèce puisque l’on relève que dans tous les cas, les personnes gardées à vue n’avaientt pas bénéficié de l’entretien d’un avocat avant interrogatoire et même pendant.

L’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’Homme consacre le droit à l’assistance effective d’un avocat dont la présence est immédiatement rendue obligatoire dès le début de la procédure de garde à vue. C’est ce que nous retirons comme principal enseignement de la décision rendue en l’espèce.

Pour justifier sa décision, la Cour de cassation invoque notamment les arrêts Salduzan c/ Turquie et Dayanan c/ Turquie, rendus par la Cour européenne des Droits de l’Homme respectivement le 27 novembre 2008 et le 13 octobre 2009.

Ces arrêts avaient consacré expressément le droit de bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le début de la mesure de garde à vue et pendant les interrogatoires. La Cour de cassation consacre donc sans retenue les solutions jurisprudentielles dégagées antérieurement par la Cour européenne des Droits de l’Homme.

La décision du 15 avril 2011 de la Cour de cassation intervient le lendemain de l’adoption d’une loi du 14 avril 2011 reprenant tous les points de la jurisprudence de la CEDH en matière de garde à vue. Cependant cette loi ne devait pas entrer en vigueur immédiatement. Celle-ci ne devait s’appliquer que le 1er juin seulement. C’est pourquoi, beaucoup ont dit que la Cour de cassation avait ordonné l’effet immédiat de la loi du 14 avril 2011 relative à la garde à vue. Il n’en est rien, puisque la Cour de cassation ne s’est limitée qu’à appliquer une jurisprudence de la CEDH elle-même reprise par la loi du 14 avril 2011.

II) L’application immédiate des décisions de la Cour à l’intégralité des Etats membres

L’autorité et l’application des arrêts de la Cour se décompose en deux axes. Premièrement, elle est immédiate (A), deuxièmement, elle concerne l’intégralité des Etats membres (B).

A) L’immédiateté de l’application des décisions de la Cour européenne des Droits de l’Homme

Les arrêts de la cour européenne des droits de l’homme s’appliquent immédiatement dès qu’ils sont prononcés, tel est le second enseignement de cet arrêt de la Cour de cassation.

La controverse qui était née de la décision constitutionnelle du 30 juillet 2010 était que celle-ci prévoyait une application différée des effets de la décision. En effet, elle avait laissé près d’un an au législateur pour modifier la législation en matière de garde à vue. Il ressortait donc de cette décision que le juge constitutionnel n’était que peu pressé de voir appliqués pleinement les droits contenus dans la Convention européenne des Droits de l’Homme et particulièrement le droit à la défense.

De même, la Cour de cassation qui s’était alignée sur la décision du Conseil constitutionnel le 19 octobre 2010 en déclarant l’inconventionnalité du régime de la garde à vue, avait déclaré que les effets de cette inconventionnalité ne saurait produire d’effets avant le 1er juillet 2011.

Il y avait donc là un problème tendant à l’immédiateté de la déclaration d’inconventionnalité. En somme le régime de la garde à vue était reconnu contraire à la Convention européenne des Droits de l’Homme mais rien empêche de poursuivre son application pendant un certain temps au titre du principe de bonne administration de la justice.

Cela a notamment laissé penser à beaucoup que la déclaration d’inconventionnalité était inférieure au principe de bonne administration de la justice invoqué alors tant par le gouvernement, que par les juges, qu’ils soient du siège ou du parquet.

La Cour de cassation met donc, le 15 avril 2011, un terme à la controverse en déclarant que les arrêts de la Cour européenne des Droits de l’Homme obligeant à la présence et à l’entretien avec un avocat dès le début de la garde à vue sont d’application immédiate en dépit des délais laissés au législateur par le Conseil constitutionnel et par la Chambre criminelle.

B) La dimension multilatérale des décisions de la Cour

L’un des arguments principaux du législateur et du Gouvernement français, exprimé par la voix du Procureur général, pour tarder à mettre en place la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme est celui selon lequel cette jurisprudence n’aurait pas été prononcée dans une affaire impliquant la France.

Le Procureur général avance notamment que l’article 46 de la Convention stipule qu’un État n’est tenu de se conformer aux décisions de la Cour que dans les litiges auxquels il est directement partie.

L’une des questions majeures posée à la Cour de cassation en l’espèce est donc celle du champ d’application des décisions rendues par la Cour européenne des Droits de l’Homme. Le Procureur général estime qu’il faut, pour que la France soit contrainte d’adapter sa législation immédiatement, qu’elle soit condamnée.

La Cour de cassation nous dit qu’il n’en est rien, les décisions de la Cour européenne des Droits de l’Homme s’applique d’une part immédiatement, d’autre part à tous les Etats membres de la Convention européenne des Droits de l’Homme, qu’ils aient été impliqués dans l’affaire ou non.

La Cour de cassation consacre donc une solution qui permet la pleine effectivité des arrêts rendus par la Cour européenne. Nous ne pouvons que saluer la décision de la Haute juridiction puisqu’elle vient enfin mettre un terme à ce que certains considèrent comme une aberration juridique. Une aberration juridique caractérisée, selon beaucoup, par le fait que les institutions juridictionnelles de notre pays autorisaient à déroger temporairement à la Convention européenne des Droits de l’Homme or de tout cadre conventionnel.

Il n’est donc pas nécessaire que la France soit condamnée par la Cour européenne pour qu’elle soit obligé d’adapter sa législation si celle-ci semble manifestement violer la Convention.

...

Télécharger :   txt (12.8 Kb)   pdf (52.5 Kb)   docx (14.8 Kb)  
Voir 7 pages de plus »
Uniquement disponible sur Essays.club