Cour de Karlsruhe
Par Andrea • 9 Mai 2018 • 2 334 Mots (10 Pages) • 444 Vues
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Néanmoins, l’Allemagne, donnant, au vue de son histoire, une importance particulière aux droits fondamentaux, à imposer une voie différente.
Après la signature du traité de Maastritcht, pour continuer la participation à la construction européenne sans abandonner ces valeurs constitutionnelles, la Cour a mis en place une ligne de conduite de la jurisprudence nationale dite « so lange » (qui signifie en allemand « aussi longtemps que »). Elle s’autorise, par ce biais, un recours contre les normes et actes communautaires « tant que » les Communautés Européennes n’assureront pas une protection des droits fondamentaux équivalente à la Loi fondamentale allemande. Cette procédure Solange I établie en 1974 est modifiée en 1986 en une procédure variante, Solange II. Constatant en effet une avancée en terme droits européens, elle accepte « aussi longtemps que » les droits fondamentaux sont garantis par le droit européen, de cesser le contrôle de la constitutionnalité des lois européennes.
Néanmoins, la Cour de Karlsruhe s’accorde, par ces procédures, un droit de véto contre la primauté du droit européen. Elle a la possibilité, si le droit communautaire allait à l’encontre de la Constitution nationale, de refuser d’appliquer les normes européennes, supposées pourtant supérieures hiérarchiquement dans la cadre de la construction d’une Communauté européenne.
Ce cas de figure est par exemple survenu dans le cas de l’affaire sur le mandat d’arrêt européen en 2005.
L’affaire concerne M. Darkazanli, résidant en Allemagne, qui aurait entretenu des relations avec le groupe terroriste Al-Qaïda en lui procurant notamment un appui financier. Il est arrêté en 2009 suite à un mandat d’arrêt d’un juge espagnol.
L’accusé utilisa alors le recours constitutionnel devant la Karlsruhe. En effet, son arrestation va à l’encontre de l’article 16 de la Loi fondamentale : « Aucun Allemand ne peut être extradé à l’étranger. » et met en exergue une erreur lors de la transposition d’une décision-cadre du 13 juin 2002 qui légalise le mandat d’arrêt à l’échelle de l’Union. Le parlement allemand a du alors voter une nouvelle loi sur ce sujet et le mandat d’arrêt n’a pas été applicable aux ressortissants allemands (notamment à M. Darkazanli) durant cette procédure.
La Cour a alors bloqué une loi européenne établie. Elle continue à accorder la suprématie à la Constitution nationale et non au droit communautaire. On peut voir la un frein à l’édification d’une Communauté Unie.
b) Des « blocages » au projet Communautaire de plus en plus fréquents
Les arrêts et décisions de la Karlsruhe sont attendus et craints par la communauté des pays membres de l’Union.
En effet, l’Allemagne étant la première puissance économique de la zone euro, elle dispose d’un pouvoir décisionnel immense lors de la mise en place de mesures communes.
Ainsi, plusieurs mesures sont confrontées à des blocages du Tribunal Constitutionnel allemand et donc cautionnées par la décisions des juges.
On peut ainsi lister un grand nombre d’arrêts importants émanant de la Cour.
Le premier, 12 octobre 1993 contre les lois d’approbation du traité de Maastricht. La Cour y dénonce un manque de protection efficace des droits fondamentaux à l’échelle communautaire.
Un arrêt majeur a été déposé, le 30 juin 2009 contre traité de Lisbonne et retarde l’adhésion allemande à l’Union européenne. La Cour y exige un pouvoir décisionnel accru du Parlement allemand lors de l’édification des lois communautaires.
L’arrêt 7 septembre 2011 juge non conformes à la constitution les lois allemandes traitant des aides budgétaires au sein zone euro votées en 2010 qui rendent l’Europe garant des capacités des Etats membres de l’Union monétaire, à rembourser leurs dettes.
L’arrêt du 19 juin 2012 remet en cause les lois allemandes sur traité instituant le MES et bloque pendant un premier temps sa mise en place en Allemagne. Il juge notamment que la souveraineté budgétaire allemande était mise en cause par l’instauration du MES (Mécanisme Européen de Stabilité).
Enfin, le 15 octobre 2014, la Karlsruhe transmet une plainte sur l’OMT (programme de la BCE permettant à la Banque de racheter les dettes des Etats de la zone euro) à la Cour de Justice de l’Union Européenne. Elle juge que ce projet pourrait conduire à l’endettement des banques nationales et constitue une atteinte à la souveraineté budgétaire de l’Allemagne.
Tous ces arrêts montrent que la Cour pèse sur l’Union Européenne et sur la mise en place de mesures communes. En effet, elle n’hésite pas à s’opposer aux organes européens et à user du poids de l’Allemagne au sein de l’Europe pour imposer sa loi.
On constate en outre, surtout sur les questions financières, que les blocages de la Cour deviennent plus fréquents depuis la crise, alors que Solange II est supposé réduire leur nombres. De plus, ces blocages sont de plus en plus frontaux et dans le cas du de l’OMT vont jusqu’à s’opposer à la justice européenne, ce qui remet en cause sa crédibilité.
Néanmoins, les arrêts de la Cour ne sont pas sans fondements et malgré les nombreuses critiques qui puissent lui être adressées, la Cour de Karlsruhe a été et est essentielle dans le processus de construction européenne. Nous verrons ainsi dans quelle mesure cette Cour offre à l’Union, un contrôle juridictionnel utile et constructif.
II- Un contrôle indispensable et constructif
Loi Fondamentale allemande, Article 23 alinéas 1 :
« Pour l’édification d’une Europe unie, la République fédérale d’Allemagne concourt au développement de l’Union européenne qui est attachée aux principes fédératifs, sociaux, d’Etat de droit et de démocratie ainsi qu’au principe de subsidiarité et qui garantit une protection des droits fondamentaux substantiellement comparable à celle de la présente Loi fondamentale. »
a) Assure la garantie des droits et principes fondamentaux :
Tout d’abord, on a vu que le Tribunal constitutionnel allemand assure une mission essentielle : la garantie des droits fondamentaux. Dans le cadre de l’intégration des Etats dans une organisation supra-nationale
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