Chômage : a-t-on vraiment tout essayé ?

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Ainsi dans la troisième sous-partie (Une pile de poissons mal cuits), David Graeber invente la métaphore d'un ébéniste qui serait embauché pour frire du poisson afin de décrire sa vision de l'enfer Pour lui, « l'enfer est un rassemblement d'individus qui passent l'essentiel de leur temps à travailler à une tâche qu'ils n'aiment pas et qu'ils n'accomplissent pas vraiment bien ». Il reste toutefois prudent en avançant que personne (et surtout pas un anthropologue comme lui) n’a la légitimité pour décider quels boulots sont utiles et quels boulots ne le sont pas.

La quatrième sous-partie de l'article (Des salariés lucides) avance un argument infaillible pour distinguer ces emplois, celui de la lucidité des personnes qui les occupent. Ainsi, « si 1 % de la population contrôle l'essentiel de la richesse disponible, ce que nous appelons le marché reflète ce que ces personnes [...] jugent important ou utile. Plus encore, cela montre que la plupart des gens qui occupent des emplois sont lucides ».

Une cinquième partie (Les emplois utiles mal rémunérés...) vient prouver que, d'une manière générale, un métier est d’autant moins payé qu’il est utile à la société. Pour Gaeber, il ne s’agit pas d’une distinction entre travail productif et improductif, mais plutôt entre travail socialement utile et travail vidé de sens. L'argument est tiré à l'extrême quand l'auteur traite des conséquences catastrophiques de l'éventuelle disparition de certains postes comme ceux de nounous, d'éboueurs, d'enseignants, de dockers et même d'écrivains de sciences fiction et de musiciens de ska. En revanche, les effets seraient moindre s'il n'y avait plus de lobbyistes , d'opérateurs en télémarketing, de consultants juridiques, etc. L'auteur nuance toutefois ses propos car les médecins par exemple sembleraient échapper à la règle qui dit que « plus le travail de quelqu'un bénéficie explicitement aux autres, moins il est probable qu'il soit bien rémunéré ».

Dans une sixième et dernière sous-partie (...et vilipendés), Gaeber conclut sur le fait que les emplois réels et productifs sont sans arrêt écrasés et exploités et que le reste serait divisé en deux groupes. D’abord il y a les sans-emploi qui sont universellement vilipendés. Puis, il y a les emplois inutiles « pourvus de statuts conçus pour qu'ils puissent s'identifier aux vues et aux valeurs de la classe dirigeante, et en particulier de ses avatars financiers ». Mais ce que ces métiers ont en commun, c'est que les occuper produirait « un ressentiment envers quiconque a un travail doté d'une valeur sociale claire et indéniable ».

▪ QUEL LIEN AVEC LE CHÔMAGE STRUCTUREL ?

Le chômage structurel désigne celui engendré par le fonctionnement trop rigide du marché du travail et par une inadaptation qualitative de l'offre de travail par la population active. Le chômage structurel est donc lié aux déséquilibres des structures socio-économiques comme les déséquilibres démographiques, le déclin d'activités traditionnelles, le changement dans la structure des emplois et l'inadéquation entre la formation et les attentes des employeurs, etc. S’agissant d’un chômage que même les salaires ne peuvent pas éliminer, une des solutions serait alors de rendre le marché du travail plus flexible, en en éliminant par exemple les rigidités qui empêchent les ajustements.

Ainsi, les « boulots de merde » seraient un moyen de lutter contre le chômage en créant du travail, même inutile. Ainsi, ce processus macro-économique crée des emplois pour les personnes qui sinon seraient au chômage. Mais, selon la vision anarchiste de David Graeber, l’invasion de ce type d’emplois se serait davantage généralisée afin d’occuper une population qui pourrait être dangereuse si elle avait du temps libre.