Faut-il préférer le dénument au luxe ?
Par Junecooper • 8 Octobre 2018 • 2 207 Mots (9 Pages) • 490 Vues
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en haillons), sans pour autant produire une pensée philosophique intéressante.
A- Une opposion entre l’apparence intérieur et extérieur
Sénèque relie l’apparence extérieure et intérieure à l’aide d’une asyndète, qui exprime une opposition forte entre ces deux termes : « Intus omnia dissimilia sint, frons populo nostra conueniat ». L’opposition symétrique des deux termes « intus » (à l’intérieur) et « frons » (à l’extérieur) accentue encore ce phénomène. De plus, le « omnia » insiste sur le fait qu’il est possible d’être radicalement différent de la foule, sans pour autant se couper du monde,« conueniat populo ». Autre phénomène d’insistance, la longue énumération de choses à proscrire : «asperum cultum (...) peruersa uia sequitur »,qui se termine de manière violente par un « euita » sans appel, qui frappe par sa brièveté (en opposition avec la longueur de l’énumération). Dans la longue énumération de choses à ne surtout pas faire, on peut distinguer deux grandes catégories : celles ayant pour sujet l’apparence physique, «asperum cultum et intonsum caput et neglegentiorem barbam »,avec lesquelles Sénèque condamne avec virulence une apparence volontairement négligée, dans le but de ressembler à un animal, et celles ayant trait au comportement, à la vie sociale, « et indictum argento odium et cubile humi positum et quidquid aliud ambitionem peruersa uia sequitur », avec lesquelles
qSénèque condamne cette fois-ci un comportement volontairement asocial, cynique au sens Romain du terme : refuser la civilisation et retourner à l’état animal est antithétique avec la fonction même du philosophe qui se doit d’appartenir à cette civilisation. Ainsi, selon Sénèque, d’une certaine façon, l’apparence extérieure révèle l’apparence intérieure, ce qui est paradoxal.
B- Le refus du luxe
Mais si Sénèque condamne le dénuement volontaire dans lequel vivent sciemment certains philosophes, il ne fait néanmoins pas l’apologie de l’opulence la plus totale. En effet, le « non habeamus argentum », du domaine de l’ordre, ne laisse planer aucun doute : il faut refuser l’excès de luxe. Car c’est bien l’excès qui est ici dénoncé, avec notamment avec « solidi auri » (or massif) et comme si cela ne suffisait pas, « caelatura descenderit » (incrusté de ciselures) (ou encore avec le « auro argentoque » où la fusion de ces deux métaux précieux apparait comme le summum du luxe). Enfin, « frugalitatis indicium » nous montre que selon Sénèque, l’apparence extérieure ne peut servir de référent pour juger quelqu’un.
III- Une philosophie du juste milieu
À Rome, les philosophes ont très mauvaise presse, et ce depuis toujours. Ils sont en effet perçus comme des individus dangereux, inquiétants. Certains furent même chassés par Claude (le prédécesseur de Néron). C’est cela que Sénèque sous-entend en disant « Satis ipsum nomen philosophiae, inuidiosum est ». Il faut selon lui parvenir à dépasser l’a priori négatif qu’ont les Romains vis-à-vis des philosophes, et cela est impossible en se comportant comme un être animal, et en refusant la civilisation. C’est pourquoi « sensum communem », « humanitatem », « congragationem » (ces deux derniers termes ayant trait à la participation à la bonne marche de la cité) sont très importants dans le discours de Sénèque : pour lui, un philosophe doit vivre parmi la Cité. On voit donc qu’ici, Sénèque donne une définition d’un bon philosophe : il ne s’agit pas pour lui d’un être à part et excentrique, mais au contraire d’un acteur politique (agissant dans la Cité), ce qui est la seule façon pour un philosophe d’être accepté. De cette manière, Sénèque condamne les épicuriens et les cyniques.
Conclusion :
Sénèque donne dans cet extrait une définition humaniste des philosophes. Ils doivent pour lui posséder deux caractéristiques principales : – une apparence commune; – une action politique. Sénèque veut donc se démarquer des philosophes parasites, car pour lui, l’intégration dans la cité est seule garante de l’acceptation des philosophes.
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