Commentaire Les Précieuses Ridicules Molière Acte I Scène 4
Par Ninoka • 21 Août 2018 • 4 474 Mots (18 Pages) • 2 008 Vues
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filles se
targuent de vouloir construire une relation intellectuelle et émotionnelle avec des
hommes avant de les épouser. Enfin, la préciosité des filles est critiquée à travers les
tirades de Gorgibus. Gorgibus, qui ne doit pas être totalement inintelligent car il est
commerçant et semble gagner sa vie, a une façon de s’exprimer qui contraste avec
celle des jeunes filles. Elles sont capables de produire des tirades de dizaines de
lignes pour ne pas dire grand chose, alors que les répliques de Gorgibus sont courtes
et concises, Gorgibus étant un homme beaucoup plus terre-à- terre. L’auteur ajoute au
contraste en soulignant que l’expression des jeunes filles est incompréhensible pour
Gorgibus. Ceci est démontré notamment par la réponse de Gorgibus à la longue
critique des nobles faite par les filles. Il déclare : « Je pense qu’elles sont folles toutes
deux, et je ne puis rien comprendre à ce baragouin. », montrant son incompréhension
du langage et du raisonnement des précieuses.
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Un second élément de la pièce qui est critiqué est la vision irréaliste de l’amour
des jeunes filles. Comme nous l’avons constaté précédemment, les précieuses ont
une vision de l’amour complètement décalée de celle de l’époque. Elles veulent vivre
une aventure passionnée, et non épouser un inconnu. Elles sont choquées par les
pratiques courantes du mariage : « Quoi ? Débuter d’abord par le mariage ! ». Le
premier élément qui démontre la critique de cette vision est l’opposition d’idées entre
Gorgibus et les filles. Pour Gorgibus, le mariage est une union sacrée, une
consécration de traditions et de valeurs : « et ce lien sacré où ils aspirent, n’est-il pas
un témoignage de l’honnêteté de leurs intentions ? ». Les précieuses ne sont pas du
même avis : « Ah ! mon père, ce que vous dites là est du dernier bourgeois. » Elles
trouvent que le mariage arrangé est une conception bourgeoise qui ne s’accorde pas
avec leur conception plus romanesque, sentimentale de l’amour. Cela est d’ailleurs
très ironique puisque les jeunes filles sont les premières à profiter de leur situation
bourgeoise. De plus, aux valeurs cardinales exprimées par Gorgibus, les filles
opposent la superficialité (trouvée dans leur langage) : « il faut qu’un amant […] sache
débiter les beaux sentiments, […] et que sa recherche soit dans les formes. » ; les
mots «débiter » et « dans les formes » rappelant l’automatisme, le manque d’attraction
naturelle qui leur importe tant. Ensuite, elles comparent leurs vies à un roman. Elles
se voient le même type de destiné que les personnages de certains d’amour écrits par
Mademoiselle de Scudéry. Cyrus, Mandane, Aronce et Clécie sont tous des
personnages de ses romans. Une autre référence au monde littéraire est la remarque
de Magdelon selon laquelle ébaucher une relation dans le but du mariage est
équivalent à « prendre le roman par la queue ». Cela montre de nouveau que les
attentes des précieuses sont irréalistes car elles basent leur vie sur des romans de
fiction. Ces références au monde littéraire critiquent les attentes, montrant à quel point
elles sont irréalistes. Après ceci, on peut venir à s’intéresser aux autres aspects de la
société mis en scène par le dramaturge.
Dans un dernier temps nous observons que, à travers la scène 4 des
« Précieuses Ridicules », Molière amène le spectateur à réfléchir sur des aspects
importants de la société au 17 ème siècle. Molière semble penser négativement du
mariage arrangé. Ceci est tout d’abord démontré par la vision du mariage de Cathos
et de Magdelon. Tous les personnages sont « nuancés ». Le ridicule de leur langage
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doit être distingué de leur vision de l’amour qui est très moderne au 17 ème siècle, et se
rapproche de celle que l’on trouve de nos jours. De plus, le personnage de Gorgibus
est aussi nuancé. C’est un bourgeois qui a un bon sens pratique, qui doit être un
minimum éduqué puisqu’il est commerçant. Malgré ceci, il ne semble pas être doté du
« bel esprit », de réparti et de finesse auquel les filles trouvent tant d’importance. Il
reste relativement primaire dans sa manière de s’exprimer et de comprendre les filles.
Egalement, il a une approche primaire au mariage et à comment doit se former un
couple. Il n’essaye pas de comprendre les filles : « elles sont achevées. Encore un
coup, je n’entends rien à toutes ces balivernes. » Il n’argumente pas, mais exprime
seulement qu’il ne comprend pas leur point de vue. Cela montre que cette vision est
inconcevable pour l’époque. Comme le veut la tradition à l’époque, Gorgibus sent qu’il
est le patriarche, le maître
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