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Commentaire La Religieuse de Diderot - « Voici le moment le plus terrible de ma vie » - « Et je présentai mon cou. »

Par   •  24 Novembre 2018  •  1 184 Mots (5 Pages)  •  629 Vues

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nécessité, l’inflexibilité, et qui m’ôtait le courage de les implorer. (L.79 à 82) ».

Le manque de compassion des religieuses à l’égard de Suzanne permet à Diderot de dénoncer l’oppression religieuse dans les couvents féminins, et cette oppression suggérée par la torture morale : « J’avais bien entendu dire que cela se pratiquait quelquefois dans les couvents de certains religieux, qu’ils jugeaient, qu’ils condammaient à mort et qu’ils suppliciaient. (L.39 à 46) » et qui semble être un cas unique dans ce couvent puisque Suzanne, qui jusqu’à maintenant, « [...] ne croyait pas qu’on eût jamais excercé cette inhumaine juridiction dans aucun couvent de femmes. (L.39 à 46) ». En plus de priver de toute liberté, les religieuses jugent sans entendre l’accusée : « Demandez-lui pardon des péchés de toute votre vie, parlez-lui comme si vous étiez au moment de comparaître devant lui. (L.34 à 36) » ou encore « [...] je voulus crier, mais ma bouche était ouverte, et il n’en sortait aucun son [...] (L.47-48) ».

Ce manque de compassion est d’autant plus flagrant lors de la scène d’évanouissement puisque aucune des trois religieuses ni même la mère supérieure ne viennent en aide à Suzanne : « J’entendais seulement bourdonner autour de moi des voix confuses et lontaines ; soit qu’elles parlassent, soit que les oreilles me tintassent, je ne distinguais rien que ce tintement qui durait. (L.56 à 60) ». Il y a la présence de forts contrastes entre la posture de supériorité des soeurs qui jugent d’un « air qui marquait la nécessité, l’inflexibilité, et qui m’ôtait le courage de les implorer. (L.80 à 82) » et la posture prisonnière, quasi animale, de Suzanne qui se retrouve « [...] traversée d’eau », « [...] couchée sur le côté, étendue dans cette eau, la tête appuyée contre le mur, la bouche entrouverte et les yeux à demi morts et fermés. (L.66 à 69) », à cause du « grand bénitier qu’on m’avait répandue sur le corps. (L.65-66) ». A travers ce sadisme, Diderot montre que l’autorité religieuse se mue en un despotisme qui vient agir sur l’esprit humain.

L’état de terreur extrême qui parcourt Suzanne souligne véritablement l’absence de compassion et de bonté de la part des religieuses et nous pouvons mettre en parallèle terreur et évanouissement lorsque son corps « [...] défaillant se renversait en arrière. (L. 49-50) ». Sa perte de sens et d’équilibre montre que son corps sombre dans une sorte de folie : Suzanne est subite à des « [...] moments de transe, où la force abandonne insensiblement, les membres se dérobent, s’affaissent, pour ainsi dire, les uns sur les autres [...] (L. 51 à 54) ». Comme Suzanne ne sent plus son corps, on suppose qu’il ne lui appartient plus. Elle cherche à retrouver ses sens : « [...] la bouche entrouverte et les yeux à demi morts et fermés. Je cherchai à les ouvrir et à regarder [...] (L. 67 à 69) », sa « plainte inarticulée, entrecoupée et pénible. (L. 79) » montre la stupeur face à la privation du corps.

En critiquant dans un registre polémique, Diderot montre, à travers la figure des trois soeurs et de la mère supérieure, la figure de l’autorité de l’Eglise au 18ème siècle. Suzanne, à travers cette violence, semble se perdre et entraîne chez elle de néfastes conséquences sur sa liberté. Ainsi cloitrée, son humanité disparait et les religieuses, dénué de sens moraux voire d’intelligence, se donne à cœur ouvert dans le sadisme tout en outrepassant la morale religieuse.

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